Les législatives anticipées du 17 décembre 2022 en Tunisie continuent de susciter des interrogations sur les conditions générales du processus électoral, critiqué par des experts et contesté par des partis, qui mettent en doute la légitimité du parlement qui en sera issu.
La campagne électorale pour les législatives anticipées, décidées unilatéralement par le président de la république Kaïs Saïed, débute le 25 novembre prochain et se termine le 15 décembre. A quelques semaines du scrutin, plusieurs partis politiques et organisations de la société civile appellent toujours à l’annulation ou au report du scrutin en raison des «irrégularités qui l’ont entaché depuis le lancement du processus».
Les prochaines élections législatives seront «différentes» en termes de résultats et de participation électorale, ont déclaré des experts électoraux. Le nouveau mode de scrutin, l’indécision des électeurs, dont beaucoup ne voit pas l’utilité de cette énième consultation et ont la tête ailleurs, et le laxisme dont fait preuve l’Instance supérieure indépendante pour les élections (Isie) à l’égard des infractions constatées tout au long du processus électoral et qui ne peuvent aboutir qu’à des élections aux résultats pour le moins discutables.
Un mode de scrutin très contesté
Pour les organisations d’observation des élections, le décret n° 55 modifiant la loi organique sur les élections et les référendums a faussé le processus électoral. Les amendements à la loi électorale n’étaient pas fondés sur des indicateurs et des critères scientifiques précis, notamment en ce qui concerne la répartition des circonscriptions électorales qui ne peut établir l’équité électorale.
Le système à deux tours, qui sera appliqué pour la première fois en Tunisie, fera de la plate-forme électorale ainsi que de l’appartenance politique des candidats deux critères secondaires pour les électeurs. Les candidats seront choisis en fonction de leur statut social et de leur influence dans leur région.
Pour les partis politiques opposés à la tenue d’élections, les critères de candidature – contrairement à ce qui avait été prévu – ont ouvert la voie à l’argent sale et privé de nombreux Tunisiens de leur droit de se présenter aux élections. Ils ont également critiqué l’interdiction du financement public de la campagne.
Abstention record en perspective
De nombreux électeurs sauteront les élections, plus nombreux que ceux du référendum du 25 juillet sur la réforme constitutionnelle. Un large éventail d’électeurs «montre un désintérêt pour les élections législatives de décembre 2022», a déclaré le directeur exécutif de l’Observatoire Chahed Naceur Harrabi. Le boycott annoncé par certains partis politiques aura un impact négatif sur la participation.
Dix circonscriptions connaissent déjà leurs élus puisqu’une seule candidature y a été retenue; sept autres n’ont tout simplement pas de candidats. Ce qui ne plaide nullement pour la crédibilité du prochain parlement.
La campagne électorale se déroulera jusqu’au 15 décembre dans les circonscriptions à l’étranger. Le silence électoral commence le 16 décembre, rappelle-on aussi, tout en se demandant s’il y aura vraiment une campagne et si celle-ci sera un tant soit peu suivie par les électeurs.
I. B. (avec Tap).
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