Tunisie : l’Etat est-il démuni face aux saboteurs ?

Quand c’est le chef de l’Etat qui se plaint dans la lenteur de la mise en œuvre des projets publics et parle même ouvertement de sabotage, alors qu’il est censé avoir la haute main sur l’administration publique, cela a de quoi surprendre et susciter des inquiétudes sur la manière dont les affaires sont gérées.  

Lors de son entretien mardi 11 juin 2024, au palais de Carthage, avec la ministre de l’Economie et de la planification, Feryel Ouerghi Sebai, le président de la république, Kaïs Saïed, a passé en revue le bilan de la 4e réunion de la Commission supérieure pour l’accélération de la réalisation des projets publics dans plusieurs secteurs.

Ladite commission a été créée en vertu du décret n° 68-2022 du 19 octobre 2022. Elle a pour mission de trouver des solutions appropriées pour accélérer la réalisation des projets de développement économique et social.

Le président Saïed a surtout mis le doigt sur le secteur de la santé où les projets de construction de nouveaux hôpitaux et de développement des services de santé, n’avancent pas vraiment, s’ils ne sont pas bloqués pour diverses raisons.

Cité dans un communiqué de la présidence, le chef de l’Etat a souligné que le retard pris dans la mise en œuvre des projets publics n’est pas «innocent», ajoutant qu’au final c’est la collectivité nationale qui pays malheureusement les frais en supportant les charges supplémentaires dues aux retards enregistrés.

Le président Saïed a dressé un constat glaçant de la situation du secteur de la santé publique en Tunisie qui, a-t-il dit, a s’est détérioré depuis le début des années 90, soulignant que ceux qui sont à l’origine de cette détérioration s’acharnent par tous les moyens pour faire obstacle à la réalisation des dits projets. Mais le chef de l’Etat n’a pas cru devoir nommer ces «saboteurs» qui auraient mérité de rendre publiquement compte de leurs méfaits. Il s’est contenté, dans ce contexte, d’exhorter les différents organes de l’Etat à se mobiliser en vue de faire face à ces lobbies qui n’hésitent jamais à user de tous les moyens pour saboter tout projet public.

L’Etat et ses institutions ne doivent plus baisser les bras et sont appelés à opérer une refonte du dispositif législatif relatif aux projets publics, a encore dit le président de la république, admettant, à demi-mot, que ce sont les lois et les règlements obsolètes qui sont souvent responsables des retards pris dans la mise en œuvre des projets dont les financements sont parfois disponibles.

Sur un autre plan, le président Saïed a affirmé qu’on ne peut prétendre bâtir une économie nationale solide et résiliente sans créer la richesse et la distribuer à tous les Tunisiens, dénonçant, au passage, la logique sous-tendant l’économie rentière qui entretient l’illusion de la croissance.

Dans le même ordre d’idées, le chef de l’Etat a évoqué la planification en tant que vecteur de développement, indiquant à ce propos que toute planification efficace doit s’appuyer sur des objectifs clairs fixés par la collectivité nationale et non sur les intérêts étriqués des lobbies.

I. B. (avec Tap).

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