Tunisie : à quoi servent encore les municipalités ? (Vidéo)

Les visites inopinées du chef de l’Etat se suivent et se ressemblent, les mêmes constats sont faits et les mêmes menaces proférées à l’encontre de ceux qui, au sein de l’administration publique, sabotent le travail de l’Etat par leur immobilisme, leur laxisme ou leur gabegie. Le problème est que rien pratiquement ne change et la situation continue d’empirer dans tous les domaines où les services publics continuent de se détériorer jour après jour : éducation, santé, transport, propreté, environnement, etc.

Imed Bahri

Lors d’une visite effectuée, jeudi 27 juin 2024, aux départements des équipements et de l’hygiène de la municipalité de Tunis, le président de la république, Kaïs Saïed a relevé de nombreux manquements, ainsi que l’absence totale d’entretien des équipements, dont certains sont hors-service depuis des années. Vidéo.

Suite à cette visite, le chef de l’État s’est entretenu avec plusieurs responsables au siège de la municipalité de Tunis, leur ordonnant de remédier à la situation en urgence et de redoubler d’effort pour répondre aux besoins des citoyens.

Au cours de cet entretien, le président de la république a déploré la situation prévalant au niveau de la collecte des déchets, des services fournis aux citoyens, de l’éclairage public, de l’entretien des cimetières, des parcs et des espaces verts et des entrepôts municipaux dont la plupart sont en état de délabrement et d’abandon.

Immobilisme, laxisme et gabegie

Le chef de l’État a également rendu visite à la direction de l’hygiène du milieu et de la protection de l’environnement (DHMPE), relevant de la même municipalité, ainsi que la pépinière municipale, où il a également constaté de nombreux manquements.

Au terme de sa visite, le président Saïed a appelé, une nouvelle fois, à faire assumer leurs responsabilités à tous ceux qui ont porté préjudice au peuple tunisien, qui sont au service de lobbys d’intérêt et non des citoyens.

Les visites inopinées du chef de l’Etat se suivent et se ressemblent, les mêmes constats sont faits et les mêmes menaces sont proférées à l’encontre de ceux qui, au sein de l’administration publique, sabotent le travail de l’Etat par leur immobilisme, leur laxisme ou leur gabegie. Le problème est que rien pratiquement ne change et la situation continue d’empirer dans pratiquement tous les domaines où les services publics se détériorent jour après jour : éducation, santé, transport, propreté, environnement, etc.

Où se situe le problème? Si la volonté de réforme et d’assainissement s’exprime aussi solennellement à la tête de l’exécutif, pourquoi l’intendance ne suive-t-elle pas?

Il est facile de parler de complot et de sabotage et de partir en guerre contre des moulins à vent. Il serait plus juste et plus judicieux d’admettre que la méthode adoptée n’est peut-être pas la bonne et que le diagnostic, qui s’arrête souvent au niveau du constat, doit s’accompagner de solutions pratiques et de moyens adéquats, sinon rien ne se fera et la situation continuera d’empirer, et nous nous retrouverons, dans un an ou deux, dans le même pétrin, incapables de faire bouger les choses dans le bon sens et d’améliorer le quotidien des citoyens.         

L’Etat ne peut pas tout faire

S’agissant ici de municipalités, pourquoi ne commence-t-on pas par faire un diagnostic précis de la situation induite par la dissolution, il y a trois ans, de tous les conseils municipaux et l’attribution de leurs prérogatives à un simple fonctionnaire de l’Etat souvent dépassé par l’ampleur de la tâche et qui ne sait plus où donner de la tête?

Pat ailleurs, l’Etat doit accepter l’idée qu’il ne peut pas tout faire, car il n’en a ni les compétences ni les moyens. Il doit apprendre à déléguer certaines de ses prérogatives de service public à la société civile afin que les citoyens apprennent à prendre en charge certains de leurs besoins. Et si l’Etat n’est pas capable – ou s’il refuse – de déléguer aux municipalités, qui ont une longue tradition de gestion autonome, à quelles autres institutions pourrait-il déléguer certaines charges, comme celles de la propreté urbaine où il a montré l’ampleur de son incapacité et de son impuissance.