The Guardian rapporte dans un article publié vendredi 13 septembre 2024, en citant des «fuites», qu’un document de 5 pages détaillant la «détérioration» de la situation des droits et des libertés sous Kaïs Saïed alimente les inquiétudes de l’Union européenne (UE) concernant son accord migratoire avec la Tunisie. (Illustration : accord stratégique Tunisie-Union européenne signé en juillet 2023).
L’UE craint que sa crédibilité ne soit en jeu alors qu’elle cherche à peser les inquiétudes croissantes concernant l’écrasement de la dissidence en Tunisie tout en préservant un accord migratoire controversé entre Bruxelles et Tunis, indique le journal britannique, citant le document fuité.
Il s’agit d’un rapport interne rédigé par le service diplomatique de l’UE, que The Guardian affirme avoir consulté, et qui parle d’«une nette détérioration du climat politique et un rétrécissement de l’espace civique» sous le président Saïed depuis qu’il a concentré tous les pouvoirs dans ses mains à partir du 25 juillet 2021.
«Les responsables de l’UE s’attendent à ce que Saïed reste au pouvoir après les élections présidentielles du 6 octobre. La préparation du vote a été marquée par l’emprisonnement d’opposants et la poursuite en justice de dissidents sous prétexte de diffusion de fausses informations», écrit le journal, ajoutant que le document consulté alimente les inquiétudes concernant l’accord migratoire UE-Tunisie de 2023, qui vise à empêcher les personnes d’atteindre l’Europe depuis notre pays.
«Les relations UE-Tunisie sont devenues plus complexes», conclut le document que le plus haut diplomate européen, Josep Borrell, a envoyé aux ministres des Affaires étrangères du bloc le 7 juillet. «L’UE continue d’avoir un vif intérêt à préserver son partenariat avec la Tunisie afin d’assurer la stabilité du pays», poursuit le rapport, décrivant ce lien comme un moyen d’assurer la stabilité socio-économique, le respect des droits de l’homme et de «continuer à agir efficacement en matière de gestion des migrations».
L’UE craint que sans un tel soutien, la Tunisie ne tombe sous l’influence de «pays tiers hostiles» qui, bien que non nommés, font presque certainement référence aux «concurrents» que sont la Russie, l’Iran et la Chine.
Il s’agit donc pour l’UE de «trouver un équilibre de plus en plus difficile entre [sa] crédibilité en termes de valeurs et son intérêt à rester engagé de manière constructive avec les autorités tunisiennes».
Le rapport de cinq pages relate l’arrestation d’hommes politiques de l’opposition, de journalistes, d’avocats et d’hommes d’affaires avant les élections présidentielles du 6 octobre prochain. Des personnes travaillant pour des ONG qui aident les migrants ont également été arrêtées, «dont la majorité sont des partenaires de mise en œuvre de programmes financés par l’UE», note le document de l’UE.
I. B.