Meloni réussira-t-elle à infléchir la position des Etats-Unis à l’égard de la Tunisie ?

La séance de confirmation de l’ambassadeur Bill Bazzi par le sénat américain, dont la date n’a pas encore été annoncée, sera un véritable indicateur du sentiment de la classe politique américaine au sujet de la situation en Tunisie sous ses multiples facettes et les lignes directrices de la mission du nouvel ambassadeur américain en Tunisie.

Elyes Kasri *

Le nouvel ambassadeur américain à Tunis Bill Bazzi, désigné par le président Donald Trump, devra être confirmé par le sénat, selon l’article 2 (section 2) de la constitution américaine qui stipule que le président nommera les ambassadeurs … avec le consentement et conseil du sénat.

La nomination de l’ambassadeur Bazzi a été communiquée à la commission des affaires étrangères du sénat depuis le 24 mars et attend de se voir fixer une date pour l’audition de confirmation. Cette audition risque d’être houleuse tant la majorité républicaine et la minorité démocrate au sénat ont accumulé des griefs au fil des ans contre la politique intérieure et surtout la politique étrangère de la Tunisie. Il y a surtout une perception américaine d’un militantisme pro-palestinien de la part de notre pays, en démarcation avec le consensus arabe, surtout celui des pays clés de la région, à l’exception d’une Algérie en voie d’endiguement et de marginalisation. Sans parler d’une éventuelle perception d’une proximité suspecte de notre pays avec un Iran en voie d’être réduit à sa plus simple expression après la sérieuse dégradation de son axe de la résistance de Damas à Gaza, au Sud Liban, en passant par le Yémen et autres satellites.

Les sentences prononcées récemment à Tunis à la suite des procès pour atteinte à la sécurité de l’Etat seront très probablement évoquées par les sénateurs américains qui exigeront une évaluation sans ambiguïté par l’administration Trump de la situation politique en Tunisie et une ligne de conduite conforme aux appréciations et désidératas des cercles influents en matière de politique étrangère américaine dans notre région.

On pense principalement aux néoconservateurs avec leur penchant islamiste, aux milieux pro-israéliens avec le credo des accords d’Abraham ainsi qu’au complexe militaro-industriel soucieux de garder la Tunisie dans le giron de l’Otan en raison de sa situation stratégique. Notre pays est situé, en effet, dans le détroit de Sicile (143 km), point de contrôle de tout passage de la Méditerranée orientale, proche du Moyen Orient riche en hydrocarbures et en marchés d’armement, à la Méditerranée occidentale débouchant sur l’océan Atlantique, zone de sécurité existentielle pour l’Occident.

La séance de confirmation de l’ambassadeur Bill Bazzi par le sénat américain, dont la date n’a pas encore été annoncée, sera un véritable indicateur du sentiment de la classe politique américaine au sujet de la situation en Tunisie sous ses multiples facettes et les lignes directrices de la mission du nouvel ambassadeur américain en Tunisie.

S’il y a lieu de s’attendre à une certaine inflexion en raison d’un éventuel lobbying de la part de l’italienne Giorgia Meloni se prévalant d’une certaine proximité personnelle avec le président Trump, et qui semble gagner en popularité en raison de sa politique migratoire et des arrangements conclus notamment avec la Tunisie, il reste que les groupes de pression et d’influence à Washington pourraient se prévaloir d’arguments de nature à surpasser celui  migratoire de notre chère amie italienne.

* Ancien ambassadeur.

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