Le projet de loi de finances et celui du budget de l’Etat pour l’exercice 2019 sont actuellement débattus par l’Assemblée des représentants du peuple (ARP). Quels en sont les points saillants ?
Par Khémaies Krimi
1- Principales caractéristiques : c’est une loi électoraliste. Elle ne comporte pas de nouvelles taxes ni pour les particuliers ni pour les entreprises. Elle ne supprime pas celles instituées par les lois de finances 2017 et 2018. Elle ne détermine pas les critères sur la base desquelles le budget économique est généralement calculé, en l’occurrence le prix du baril de pétrole et la parité du dinar. Ces critères ne sont pas fixés par la loi de finances 2019.
2- Montant du budget : le budget de l’Etat prévu pour l’exercice 2019 est fixé à 40.741 millions de dinars tunisiens (MDT), soit une hausse de 8% par rapport à l’année 2018. Cette augmentation serait due surtout à la dépréciation du dinar.
3- Croissance : ce budget table sur un taux de croissance de 3,1% contre 2,6% attendus en 2018, après son actualisation. Ce taux sera réalisé sur la base des hypothèses suivantes : quasi stabilité de la valeur ajoutée du secteur agricole (une production de 19 millions de quintaux de céréales en 2019, contre 14 millions de quintaux en 2018), la croissance de la valeur ajoutée des industries manufacturières de 4,2%, de l’électricité et du gaz (23,3%) , des hydrocarbures (5,3%) et une hausse des services (4,1%), grâce à la reprise du tourisme et des industries extractives (pétrole et phosphate…).
4- Recettes : le financement du budget sera assuré, à hauteur de 22.516 MDT, par six ressources : recettes fiscales et non fiscales, emprunts extérieurs et intérieurs, recettes des biens confisqués, participations de l’Etat et concours extérieurs.
Dans le détail, au chapitre des recettes fiscales, les impôts directs devraient atteindre 9.997 MDT, soit une hausse de 12,3% par rapport aux résultats prévus pour 2018. Quant aux recettes non fiscales, elles ont été fixées à 1.139 MDT (revenus de l’Etat provenant du pétrole brut et du recouvrement de la redevance du gazoduc acheminant le gaz algérien vers l’Italie via la Tunisie.
Les besoins en crédit de la Tunisie pour l’année 2019 sont estimés à 10.140 MDT. L’endettement intérieur (2.350MDT) sera essentiellement mobilisé grâce aux bons de trésor et l’endettement extérieur s’élèvera à 7.792 MDT.
Ce budget sera financé également par une enveloppe de 390 MDT, mobilisée au titre d’une «tranche des montants et des biens confisqués» (Banque Zitouna, Alfa Ford ainsi que des biens immobiliers).
Une autre enveloppe de 850 MDT sera mobilisée au titre des revenus provenant des participations de l’Etat dans la Banque centrale (390 MDT), l’Etap (390MDT), et des concours extérieurs aux alentours de 150 MDT.
5- Dépenses : ce budget prévoit le financement des dépenses de gestion à hauteur de 25.2.35 mds de dinars soit une hausse de 1578 MD (6%) par rapport aux dépenses de 2018.
Le budget de gestion servira à financer le service de la dette. Ce dernier atteindrait 9037 MD contre 7841 MD (chiffre actualisé) en 2018, soit une hausse de 1466 MD.
Ce même budget financera la masse salariale dans la fonction publique qui atteindra 16485 millions de dinars soit 14,1% du PIB contre 14% en 2018.
Au rayon du budget du développement et de la compensation un montant total de 10 mds de dinars a été prévu.
L’enveloppe budgétaire dédiée aux dépenses de développement est estimée à 6 mds de dinars contre 5.893 MDT de dinars en 2018. Ce montant représente 5,1% du PIB.
Pour la compensation, le gouvernement a consacré une enveloppe de 4.350 MDT, répartis entre 1.800 MDT réservés à la subvention des produits de base, 450 MDT (transport public) et 2.100 MDT (hydrocarbures).
6- Emploi: les recrutements continueront à être suspendus, l’année prochaine, dans le secteur public. Les retraités ne seront pas remplacés. Les postes vacants (démission, décès ou rattachement) ne seront pas comblés toute au long de l’année prochaine. Les besoins seraient couverts par la réaffectation des ressources humaines disponibles dans les structures publiques, ministérielles ou régionales et par les concours en cas de besoins spécifiques (intégration des enseignants suppléants…).
7- Déficit budgétaire : il sera contenu, sur la base de ces projections précitées, dans la limite de 3,9% du PIB (4.512 MDT) contre 4,9% (5.214MDT) en 2018.
8- Taux de l’endettement public : il ne devrait pas dépasser, l’année prochaine, les 70,9% du PIB contre 72% attendus pour 2018.
9- Ressources propres de l’Etat : elles devraient se situer aux alentours de 75% en 2019.
10- Réformes : elles seront engagées dans le secteur bancaire et financier et en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme : éclaircissement de la question du secret bancaire.
Il est prévu de créer une banque des régions (fusion entre la Sotugar et la BFPME), d’inciter les petites et moyennes entreprises à s’introduire en bourse, de restructurer les associations des microcrédits et de créer 24 nouvelles associations régionales.
En matière de change, il est prévu de publier, en 2019, la loi portant sur l’amnistie des infractions de change.
Des réformes sont également prévues dans l’administration, la fonction publique, la gouvernance et la lutte contre la corruption via la facilitation de l’accès à l’information, la mise en place d’un système numérique d’accès à l’information, la suppression de la légalisation et des copies conformes des documents de certaines administrations publiques. Il est prévu également d’entamer la révision du statut de la fonction publique, d’entreprendre la réforme des entreprises publiques et de promouvoir leur gouvernance.
Il va de soi qu’il s’agit là de projet et d’estimations provisoires. Des modifications peuvent être introduites sur les projets de loi de finances et le budget de l’Etat 2019, lors de leur discussion par l’Assemblée des représentants du peuple (ARP).
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