Les dirigeants du parti islamiste Ennahdha et leurs alliés (et comparses), qui ont détourné la révolution du peuple tunisien, phagocyté son Etat et détruit son économie, rêvent aujourd’hui d’une intervention étrangère qui les remettrait en selle. Mais les Tunisiens, qui les ont vomis, empêcheront sans doute leur retour. (Manifestation d’Ennahdha à Tunis, le cadavre bouge encore!)
Par Elyes Kasri *
Le faux extrait du livre de l’ancienne secrétaire d’État américaine Hillary Clinton paru en 2014 évoquant les circonstances du départ forcé de feu Ben Ali, le 14 janvier 2011, dans des circonstances restées inexpliquées à ce jour, et qu’on a fait circuler à nouveau récemment sur les réseaux sociaux, a tout l’air d’un écran de fumée pour occulter les nombreuses trahisons et complicités de parties tunisiennes désireuses de se refaire une virginité patriotique. **
De plus, l’échec des manifestations du 14 janvier 2023 à Tunis, pour célébrer le 12e anniversaire de la «Révolution du Jasmin» et dénoncer la dérive autoritaire de Kaïs Saïed, dont certaines parties politiques et syndicales rêvaient de faire une réédition du 14 janvier 2011, a mis a nu leur incapacité de mobiliser les Tunisiens, malgré l’immense frustration de ces derniers et leur crainte pour l’avenir.
La «révolution» de qui et de quoi ?
Cet échec associé au désintérêt général pour le deuxième tour des élections législatives, fixé au 29 janvier courant, après un record mondial d’abstentions lors du premier tour (près de 90%), est une preuve supplémentaire que les parties actives sur la scène politique tunisienne n’ont pas pu être à l’origine du départ de Ben Ali et de l’écroulement de son régime, malgré tous les slogans et les prétentions assénés avec conviction pendant plus d’une décennie.
Il semble de plus en plus évident que ces parties auraient été des figurants et au mieux des comparses, procédant par la suite, tels des brigands de grand chemin, au détournement de l’angoisse et des aspirations de nombreux segments de la population pour satisfaire leur soif de pouvoir et de richesse ou faire passer à travers la gorge du peuple tunisien leurs chimères d’adolescents immatures.
La conjoncture internationale qui a été à l’origine du prétendu printemps arabe et du départ de Ben Ali laisse penser que la perspective d’un changement de trajectoire ou carrément de régime en Tunisie n’est plus entre les mains des Tunisiens mais devra, selon toute vraisemblance, attendre une intervention étrangère probablement à la faveur d’une reconfiguration géostratégique de toute la région, conséquemment au conflit russo-otanien en Ukraine dans le cadre d’une nouvelle architecture de la paix et de la sécurité dans la région euro-méditerranéenne qui pourrait être précipitée par la cascade de scandales et de commissions d’enquête contre une administration Biden désormais aux abois.
Le salut viendra-t-il de l’étranger ?
En dépit de la gloire à laquelle ont pu prétendre fallacieusement et sans vergogne plusieurs pseudo révolutionnaires et faux prophètes, il semble qu’à la lumière de l’impasse et du blocage actuels, les forces extérieures qui ont, en toute vraisemblance planifié et téléguidé le prétendu printemps arabe, soient les seules capables de refermer cette parenthèse qui a fait d’une Tunisie émergente, en dépit de nombreux défis, un État défaillant dans plusieurs secteurs et techniquement en faillite.
Entretemps, alors que les politicaillons de tout bord continueront de gesticuler sans convaincre et réaliser quoi que ce soit, la Tunisie s’enfoncera inexorablement dans la crise socio-économique et le désespoir avec un coût de sauvetage de plus en plus exorbitant et douloureux.
* Ancien ambassadeur.
** Le titre et les intertitres sont de la rédaction.
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