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La «désassemblée» nationale, refuge idéal pour les escrocs de la république

Le mal que nous vivons, nous autres Tunisiens, est très profond. Donnons une chance au gouvernement actuellement en cours de formation. Mais au préalable, les postulants aux portefeuilles ministériels devraient prouver qu’ils aiment la Tunisie plus que leur propre mère. C’est la condition sine qua non pour réussir toute œuvre de réforme.

Par Mohamed Rebai *

En Tunisie, il y en a de tout pour faire des partis politiques (226). Que cela nous plaise ou non, il y a tant de professions régénérées, relookées, remises à neuf et montées en grade depuis la révolution. Elles sont exercées par «les nouveaux riches» qui siphonnent la richesse du pays.

Après une période de flottement, ces malins ont rapidement compris le filon. Ils ne soudoient plus les petits et les gros poissons de l’administration. Ils se liguent en bandes organisées pour former des partis politiques, accéder au pouvoir et se servir directement à la caisse. Ils nouent des alliances contre-nature aussi facilement que leurs lacets.

La racaille de la nation dans la «désassemblée»

Il s’agit de truands, de terroristes, de trafiquants, de contrebandiers, de voyous, de malfrats, de bagnards, de mafieux, d’escrocs, de faussaires, de fraudeurs, de voleurs, d’assassins, de criminels, de délinquants, de corrompus, d’incompétents, d’incapables, d’ignorants, de menteurs, d’impolis, de revanchards, de manipulateurs, de clowns, de traîtres, d’ingrats et autres égarés aux prises avec la justice.

Ils s’y plaisent dans leurs nouvelles fonctions quitte à démolir le pays. Ils s’en foutent comme d’une guigne. Certains larbins qui nettoyaient autrefois les latrines sont déjà partis avec des milliards de mégots et de butin. L’argent dérobé réapparaît en Europe ou dans les paradis fiscaux.

Pour protéger leurs arrières, ils parviennent à instaurer un climat de panique dans tout le pays, des actes terroristes ici et là, des incendies ravageurs de nos usines et de nos forêts. L’intelligentsia, la crème, la fine fleur des cadres quittent le pays sans bruit. Fait étrange : tout ce beau monde utilise la religion comme paravent à leurs activités illégales. Finalement, tu ne sais pas comment séparer le bon grain de l’ivraie.

Ils trouvent dans la «désassemblée» un refuge idéal pour se protéger. Ils s’y cachent et envoient les jeunes au front ou se noyer en Méditerranée. Ils te félicitent un matin d’élections et ils t’oublient le lendemain. Des bons à rien qui se chamaillent de gros mots comme des ratons enragés. Tous ces distinguos subtils qui se croient sortir de la cuisse de Jupiter sont en réalité des moins que rien à l’intelligence d’un cendrier. Tous des fumiers

Le temps perdu ne se rattrape plus

Le paradis perdu et la patrie perdue, la jeunesse perdue, le temps perdu telle est notre recherche désespérée. L’intention même de revenir ou de retrouver le pays d’antan est annihilée. Les patriotes s’efforcent à contre-courant et à rebrousse-temps pour oublier et repartir de bon pied. Ils finiront très vite par se mettre à l’évidence qu’ils ne peuvent jamais remonter le cours de la durée.

Le temps nous file sous le nez à une vitesse hallucinante. L’écart se creuse de plus en plus entre la Tunisie et les nations émergentes. Le temps qui passe est notre principal ennemi et plus les jours, les mois et les années passent, plus ces personnes excellent dans la médiocrité.

Certains populistes de gauche comme de droite s’obstinent à nous promettre un meilleur devenir pour faire semblant. Ils ne savent pas que l’avenir n’est pas à venir. Il est déjà advenu. Nous tournons tous en bourriques pour rattraper un paradis perdu. Et la fin nous ramène au commencement sans issue ni perspective. La décomposition du composé. La déconstruction du construit.

Ce qui est fait durant des décennies d’indépendance a été défait en très peu de temps. La quasi impossibilité du refaire atteste l’existence d’une infection au sein de l’équipe dirigeante pire que le coronavirus essentiellement inguérissable parce qu’elle est inscrite dans leur ADN. La désinfection de l’esprit et du corps tarde à se faire.

Depuis 14 siècles, les Tunisiens n’ont jamais terminé un voyage circulaire qu’ils effectuent en boucle vers le passé comme s’ils veulent soustraire et anéantir le présent et le futur. Ils vont et reviennent dans des frontières imaginaires. Ils montent et descendent dans une cage toujours la même. Ils s’attachent et se détachent de la civilisation. Ils construisent et détruisent leurs propres vies.

Le mal que nous vivons est très profond. C’est un grand malaise qui mérite qu’on s’y attarde un peu pour le décortiquer et proposer les solutions et les issues possibles. Donnons une chance au gouvernement qui est en train d’être formé par Hichem Mechichi. Mais au préalable, les postulants aux postes ministériels devraient aimer la Tunisie plus que leur propre mère. C’est la condition sine qua non pour réussir toute œuvre de réforme.

* Economiste à la retraite.

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