Accueil » Ahmed Safi Saïd drague les islamistes pour détrôner Kaïs Saïed

Ahmed Safi Saïd drague les islamistes pour détrôner Kaïs Saïed

Ahmed Safi Saïd veut devenir président de la république. Sa première tentative en 2019 a échoué, mais il n’est pas du genre à lâcher prise. Celui que les sondages situent à la seconde ou troisième position après Kaïs Saïed s’est construit une certaine popularité via le petit écran mais aussi et surtout sur le terrain. Cependant, cette popularité ne lui garantit pas l’accès au second tour de la prochaine présidentielle, en 2024. Pour pouvoir y accéder et mettre en ballottage le président en exercice, dont la popularité reste intacte malgré ses maigres «performances», a besoin de puiser dans un réservoir électoral important et quoi de mieux que celui du parti islamiste Ennahdha qu’il drague ostensiblement en ce moment. Vidéo.

Par Imed Bahri

Le sulfureux journaliste, ancien propagandiste attitré des dictateurs arabes et ami des affairistes fâchés avec la loi, sait pertinemment qu’il n’y a pas mieux pour attirer la bonne grâce de son ami Rached Ghannouchi que de taper sur Kaïs Saïed, la bête noire des islamistes dont ces derniers veulent se débarrasser lors des prochaines élections. Or, dans le camp islamiste personne ne peut battre Kaïs Saïed surtout pas Rached Ghannouchi, très clivant et très impopulaire.

De l’autre côté, Ahmed Saf Saïd a toujours eu d’excellentes relations avec les islamistes et surtout avec Rached Ghannouchi, dont il a refusé de voter le retrait de confiance en tant que président de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), et qu’il considère comme un ami et ce, bien avant 2011.

Par conséquent, les deux monstres froids peuvent s’allier pour détrôner le rigide professeur de droit constitutionnel. Ainsi, Ahmed Safi Saïd, qui aime le pouvoir et les honneurs et se considère comme quelqu’un de très important, réalisera son rêve et Ghannouchi aura de nouveau un ami à Carthage, comme lors de la présidence de Mohamed Moncef Marzouki et Béji Caïd Essebsi.

L’homme lige de l’alliance islamo-affairiste

Cependant, en politique rien n’est gratuit et Ahmed Safi Saïd doit montrer qu’il mérite le soutien des islamistes qu’il ne critique d’ailleurs jamais. Pour les convaincre, il s’est joint à eux dans leur bataille contre Kaïs Saïed. Durant toutes ses dernières apparitions médiatiques, le journaliste, qui se considère comme un grand stratège et le crie sur tous les toits, multiplie les griefs contre le président de la république. Pas plus tard qu’hier soir, mardi 30 mars 2021, sur Radio Med, il déclare avec un sourire jaune et sur un ton moqueur que Kaïs Saïed partageait beaucoup de points communs avec les salafistes du parti panislamiste Hizb Ettahrir. «Comme il ne croit ni à l’indépendance, ni à la démocratie, ni au parlement, ni aux partis», dit-il, ce qui aurait mérité d’être nuancé, et il ajoute que comme ces derniers, le chef de l’Etat a une haine viscérale des Frères Musulmans et que, comme eux, il prie au milieu des citoyens.

Et là, Ahmed Safi Saïd fait étalage de sa grande mauvaise foi – mais cela ne nous étonne pas du tout venant de lui – qui consiste à considérer que prier au milieu des citoyens est une pratique spécifique aux dirigeants de Hizb Ettahrir, car selon lui, c’est au président de conduire la prière, or nous ne sommes pas dans une théocratie pour que le chef de l’Etat soit tenu de conduire la prière. L’attitude de Kaïs Saïed de prier au milieu des citoyens est donc juste et n’a rien à voir avec Hizb Ettahrir, par contre ce que dit Ahmed Safi Saïd, qui veut manipuler l’opinion publique, est faux.

Cependant, il n’y a pas uniquement Ennahdha dans la famille islamiste, il y a aussi la coalition islamo-populiste Al-Karama. Cette coalition dont le chef de file est le très agité Seïfeddine Makhlouf n’a aucune chance de se qualifier au second tour de l’élection présidentielle et encore moins de battre Kaïs Saïed et ainsi elle pourrait être incitée à jouer collectif et à rallier elle aussi, sous l’influence d’Ennahdha, Ahmed Safi Saïed pour faire un seul bloc contre Kaïs Saïed.

Quant à Qalb Tounes, autre satellite d’Ennahdha, ses dirigeants suivront les consignes de Ghannouchi et tout ce qui peut aider à les débarrasser de Kaïs Saïed, un homme déterminé à lutter contre la corruption, dont leur chef, Nabil Karoui, actuellement en prison, est accusé, les arrange.

Président de la république ou «walla chi»

De plus, Ahmed Safi Saïd à Carthage permettra à la coalition islamo-affairiste (Ennahdha – Al-Karama – Qalb Tounes) d’avoir un président qui s’en fout éperdument des principes, et qui ne considère pas la lutte contre la corruption et les forces de l’argent sale comme une priorité, au contraire, il y a toujours baigné jusqu’au cou, du temps où il faisait financer ses activités d’éditeur de presse par les dictateurs.

Avec Ahmed Safi Saïd, tous les corrompus, à commencer par les dirigeants d’Ennahdha, seront tranquilles, car il leur foutra une paix royale, et se contentera peut-être de goûter à leur miel – n’a-t-il pas pensé appeler le parti qu’il compte créer «Le jardin des abeilles» ? –, contrairement à Kaïs Saïed qui fait de la lutte contre la corruption une urgence absolue.

Maintenant, cette stratégie d’Ahmed Safi Saïd aboutira-t-elle? Qui vivra verra. Ce qui est certain c’est qu’il tentera un coup de poker : ou bien il réussit et il peut devenir président ou bien il échoue et il deviendra «walla chi» (rien du tout) comme il qualifie souvent ses adversaires, avec cet accent levantin, dont il joue comme une star de music-hall.

Vidéo.

Donnez votre avis

Votre adresse email ne sera pas publique.

error: Contenu protégé !!