«Depuis la mort d’Emma, le soleil n’a jamais brillé de nouveau dans le ciel du Tunistan et la puanteur n’a jamais quitté l’air de ce pays.»
Par Karim Ben Slimane*
Les vacances au Tunistan ne sont plus aussi tranquilles et paisibles qu’auparavant. Désormais la laideur y est légion et la bêtise est maitresse. Dans ces lignes je vous conterai sans fantaisies la réalité fictive d’un drame survenu sur une plage du Tunistan.
C’est l’histoire d’une jeune femme belge qui s’appelait Emma. Emma était belle, elle le savait et elle en jouait.
Emma aimait par-dessus tout attirer le regard des hommes. Elle aimait bien les mettre à ses pieds, les soumettre; elle jouait avec eux et jouait d’eux.
Quand elle se déhanchait à pas nonchalants dans la rue, les hommes étaient comme pris de torticolis ne pouvant plus décrocher leurs yeux posés sur ses formes généreuses.
Emma avait tout pour elle, de la dégaine, du caractère et de la sensualité. Dieu l’a tellement bien faite qu’on le soupçonnerait presque d’être jaloux quand les hommes se prosternaient à ses pieds.
Elle incarnait le supplice de Tantale qui frappe les hommes vaniteux, tout le monde lui courait après et personne ne pouvait l’avoir à lui tout seul. Mais Emma était aussi diabolique, c’est la rançon de sa beauté. Lui faire la cour, c’est courir les risques de briser sa vie, d’abandonner épouse et enfants, de dilapider fortune et dignité.
Emma se grisait de la déchéance des hommes qui se consumaient à petit feu à ses pieds faute de ne pouvoir l’avoir pour eux. Son exaltation se décuplait à la hauteur de la vanité, de la concupiscence et de la démesure de ses proies.
Un jour Emma apprit cette histoire étrange d’une femme violée dans un pays lointain appelé Tunistan, trainée dans boue et condamnée pour dépravation et atteinte aux bonnes mœurs alors que c’est elle la victime de l’ignominie. On ne sait pas si c’est le caractère sordide de cette histoire, la témérité ou la curiosité qui ont dépêché Emma d’aller au Tunistan, faisant fi des mises en garde de la communauté des Belges y vivant.
Une association de Belges vivant au Tunistan venait en effet de se fendre d’un communiqué déconseillant aux femmes de porter le string sur la plage de peur d’exciter des créatures étranges appelées salafistes. Emma ne connaissait pas les salafistes.
Intrépide, Emma se rendit alors au Tunistan dans une sorte d’expédition punitive des hommes de ce pays où l’on traine dans la boue les femmes violées. Son arrivée à l’aéroport fut très remarquée. Elle était vêtue d’une robe légère couleur pourpre qui laissait voir la naissance de ses cuisses sans les trahir et offrait un magnifique décolleté qui captive le regard et le promène de son cou voluptueux vers l’abîme du sillon qui sépare ses seins généreux et fermes.
Arrivée à l’hôtel, Emma se hâte de se déshabiller d’enfiler son bikini et de s’envelopper dans un magnifique paréo en soie d’un blanc immaculé.
Le ciel du Tunistan s’est éclairci quand Emma a foulé la plage plongeant ses pieds fins dans le sable, c’est comme si le soleil a fait des coudes pour chasser les nuages qui l’empêchaient de se remplir les yeux de cette créature à moitié divine.
La brise emmène au loin le parfum capiteux d’Emma annonçant sa venue et le vent se calme faisant taire les vagues pour mieux la contempler.
Elle se tient debout les mains sur les hanches sa jambe gauche légèrement avancée laissant transparaitre sa cuisse plantureuse et finement dessinée dans un geste par lequel elle s’intronise nouvelle maitresse des lieux. Elle défait de sa main droite le nœud du paréo qui glisse doucement sur son corps dans une course tranquille comme s’il n’était pas pressé de la quitter. A présent deux bouts de tissus insignifiants l’un sur sa poitrine l’autre encerclant ses hanches tiennent le regard à distance du secret le plus gardé de l’humanité.
La venue d’Emma a suspendu le temps sur cette magnifique plage du Tunistan où tous les yeux étaient rivés sur elle. Pas loin de cette créature venant d’ailleurs un homme dont la dévotion est telle qu’il se promenait avec sa natte de prière sur la plage a été pris d’une confusion si grande qu’au lieu de se prosterner en direction de la Mecque il dirigea sa prière vers Emma.
Soudain une voix rauque vient déflorer le silence qu’Emma a imposé : «C’est le diable, c’est le diable, mes frères c’est Satan». Prise de panique la foule s’éclaircit et les gens se hâtent de déguerpir. Seul un homme grand et fort à la barbe hirsute se tient devant Emma et s’avance vers elle d’un pas assuré et aussi déterminé qu’un bourreau sur un échafaud. Il lève son sabre vers le ciel dans un geste vif qui éventre le soleil, scande «Allahou Akbar» et loge sa lame entre les seins d’Emma. Les nuages reprennent leur place en première loge dans le ciel cachant le soleil, le vent souffle si fort qu’on entendit gronder la mer et une odeur pestilentielle remplit l’air.
Depuis la mort d’Emma, le soleil n’a jamais brillé de nouveau dans le ciel du Tunistan et la puanteur n’a jamais quitté l’air de ce pays. La vanité, la bêtise et l’ignorance ont eu raison de la beauté, les vacances au Tunistan ne sont plus aussi paisibles qu’auparavant.
*Spectateur engagé dans la vie politique tunisienne.
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