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Marzouki – Jebali : Le match du siècle

L’émir du Qatar, Moncef Marzouki et Hamadi Jebali: le linge sale se lave en famille. 

Selon Moncef Marzouki, Hamadi Jebali avait demandé à ce que les réunions de son gouvernement se déroulent au… Palais de Carthage.

Par Hassen Mzoughi

C’est ce qu’a déclaré l’ancien président de la république par intérim dans un récent entretien avec la chaîne qatarie Al Jazeera, se délectant de ses «confidences» débitées dans une longue série de rencontres qui rappellent, toutes proportions gardées, la fameuse série de discours d’Habib Bourguiba à l’Institut de presse et des sciences de l’information (Ipsi), dans les années 1970.

En évoquant cette demande, Moncef Marzouki dit l’avoir «refusé catégoriquement» et «appelé Jebali à garder son bureau au palais de la Kasbah comme tous ses prédécesseurs».

Etranges demandes, desseins cachés

L’ancien Premier ministre, qui se prenait pour le «Sixième Calife», cherchait donc à partager le Palais de Carthage avec son «ami» (et obligé, puisque Marzouki devait son poste au parti islamiste Ennahdha qui l’y a nommé), s’estimant être habilité à occuper une ou plusieurs ailes du palais pour «travailler dans les meilleures conditions possibles».

Le magnifique Palais de la Kasbah, où siège le chef de gouvernement et au sein duquel ont exercé, depuis toujours, les plus hauts responsables de l’Etat, est-il subitement devenu «incommode» et «inconfortable», n’offrant plus les conditions satisfaisantes pour tenir des conseils des ministres?

Etait-ce la seule motivation de l’étrange demande de l’ancien chef du gouvernement? Ou avait-il des desseins cachés?

Cette question est d’autant plus légitime que, toujours au cours de cette interview-marathon avec Al-Jazeera, qui dure depuis bientôt deux mois, Moncef Marzouki nous apprend aussi que Hamadi Jebali «a voulu placer la sécurité présidentielle sous ses ordres». Et Marzouki d’ajouter, en fanfaronnant, qu’il a bien fait de rejeter la demande de l’ex-chef du gouvernement, car, a-t-il expliqué, «ce rejet a permis d’éviter le pire et de sauver l’ambassadeur américain et les membres de la délégation diplomatique américaine lors de l’attaque de l’ambassade», le 14 septembre 2012.

Dans l’attaque de l’ambassade américaine, en 2012, Marzouki s’attribue le rôle du sauveur, et enfonce ses anciens alliés islamistes. 

Marzouki, le sauveur des Américains

Ce jour-là, rappelons-le, la police a été incapable de protéger le siège de l’ambassade des Etats-Unis, aux Berges du Lac de Tunis, et c’est la garde présidentielle qui a dû intervenir pour disperser les assaillants qui avaient déjà pénétré dans l’enceinte de la représentation diplomatique et mis le feu à des dizaines de voitures.

Dans cette interview, Moncef Marzouki a «chargé» Hamadi Jebali mais aussi l’ex-chef d’état major des armées Rachid Ammar et l’ex-ministre de l’Intérieur Ali Larayedh, qui n’auraient pas joué leur rôle dans cette affaire de l’attaque de l’ambassade américaine.

Selon l’ancien locataire du Palais de Carthage, l’armée a refusé d’obéir à ses ordres et les forces de l’ordre n’ont pas réagi durant l’assaut.

A ce propos, il affirme avoir essayé de prendre contact avec les hauts responsables sécuritaires mais «leurs téléphones étaient éteints, ce qui laisse poser de nombreuses interrogations». Ce qui, sans être une accusation de trahison ou de complot, y ressemble tout de même beaucoup.

Ces derniers temps, Moncef Marzouki et Hamadi Jebali se présentent comme deux boxeurs sur un ring, ne se ménageant guère et se permettant tous les coups bas. Ce n’est pas l’Etat tunisien qui en sort grandi, surtout quand le linge sale est lavé à l’étranger, sur le plateau de télévision d’un pays étranger et moyennant… de l’argent. Car il y a une autre question, qui mérite une réponse : combien la chaîne Al-Jazeera a-t-elle payé à Marzouki pour ce déballage médiatique des affaires de l’Etat tunisien?

Par ailleurs, et quand on sait que les deux belligérants ne font pas mystère de leur désir de se présenter à la présidentielle de 2019 et qu’ils chassent sur les mêmes plate-bandes, celles des mouvements islamistes et apparentés, on comprend qu’ils soient impatients d’en découdre et d’avoir ouvert les hostilités aussi tôt.

 

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