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La situation en Tunisie préoccupe ses partenaires occidentaux

André Parant reçu hier par Ahmed Nejib Chebbi.

Les partenaires occidentaux de la Tunisie s’inquiètent sérieusement de l’instabilité qui semble s’installer dans notre pays, et ils le font savoir, directement, à travers des déclarations officielles, et indirectement, en multipliant les rencontres avec les principaux acteurs de la scène tunisienne, d’abord pour s’informer, et ensuite pour essayer d’aider ces derniers à rapprocher leurs vues, à avancer vers des solutions pacifiques et à éviter les postures intransigeantes qu’affichent certains d’entre eux, à commencer par le président de la république Kaïs Saïed, et qui pourraient amener le pays vers l’inconnu des escalades et des confrontations.

Par Ridha Kefi

«Ahmed Nejib Chebbi a rencontré André Parant, l’ambassadeur de France en Tunisie. La rencontre a porté sur les relations entre les deux pays et entre la Tunisie et l’Union européenne. Elle a aussi été l’occasion de clarifier l’initiative lancée par M. Chebbi en vue de construire un front pour sauver la Tunisie de la crise sociale et politique actuelle.»

Cette information publiée, hier, jeudi 14 avril 2022, sur la page Facebook du parti Al-Amal doit être décryptée, d’autant qu’en dépit de son riche passé politique, le secrétaire exécutif du parti fondé par Salma Elloumi ne pèse pas beaucoup politiquement et son nom apparaît rarement sinon jamais dans les sondages d’opinion sur les personnalités politiques les plus populaires en Tunisie.

Interrogations sur une situation paradoxale

Cette information doit être située dans le contexte des rencontres que les représentants du corps diplomatique accrédité en Tunisie multiplient depuis plusieurs mois avec les principaux acteurs politiques dans notre pays. M. Parant, pour ne citer que lui, a déjà rencontré Abir Moussi, présidente du Parti destourien libre (PDL), Rached Ghannouchi, président du islamiste Ennahdha, Ghazi Chaouachi, président du Courant démocratique, qui sont les opposants les plus en vue du président de la république Kaïs Saïed et à ses «mesures exceptionnelles» annoncées le 25 juillet dernier.

Le fait que ces mesures, très contestées par la plupart des dirigeants politiques et des représentants de la société civile, soient soutenues par une écrasante majorité des Tunisiens et que, malgré, la grave crise économique et sociale que traverse actuellement la Tunisie, la popularité du locataire du palais de Carthage, qui accapare tous les pouvoirs, ne faiblit pas, semble susciter plus que de simples interrogations chez les principaux partenaires historiques de notre pays, notamment les Etats-Unis, l’Union européenne et particulièrement la France, premier client, premier fournisseur et premier investisseur en Tunisie.

Cette situation paradoxale suscite également beaucoup d’inquiétude, et pour cause : la Tunisie semble s’enfoncer dans la crise alors que ses dirigeants politiques, pouvoir et opposition, ne semblent pas encore en mesure de trouver le plus simple dénominateur commun pour élaborer et mettre en route un programme de sauvetage qui mettre fin à l’instabilité du pays et lui évite de sombrer encore davantage dans la crise.

C’est cette situation qu’à Paris, Bruxelles, Rome, Berlin et Washington, on appréhende le plus, car l’instabilité en Tunisie pourrait avoir des conséquences graves pour toute la région sud-méditerranéenne, où les tensions ne manquent pas, et rejaillir ensuite négativement sur la rive nord de la Méditerranée, notamment en alimentant les flux de migration illégale, déjà très importants depuis plusieurs années.

Prêter attention aux avertissements

L’intérêt que les chancelleries occidentales accordent à la situation volatile, incertaine et précaire actuelle en Tunisie se justifie donc amplement et on ne peut, dans une réaction épidermique aussi injuste et stupide, y voir une forme d’ingérence dans les affaires intérieures de notre pays, comme le font certains écervelés sur les réseaux sociaux. Car la Tunisie est historiquement et organiquement liée à l’Europe, sur les plans aussi bien économique que culturel, social et humain (plus d’un Tunisien sur dix vivent dans les pays européens). Elle bénéficie aussi d’importantes aides, financières et autres, qui lui permettent de soutenir son budget et de maintenir son économie sous perfusion, sans parler des énormes investissements européens dont elle bénéficie et qui créent des richesses et des emplois.

Il serait plus raisonnable et responsable d’essayer de comprendre les raisons de l’inquiétude des principaux partenaires de notre pays, de prêter attention à leurs avertissements, d’autant que nous avons beaucoup plus à leur demander qu’à leur donner et que nous dépendons beaucoup de leurs précieux coups de pouce pour ne pas sombrer davantage et nous noyer dans nos problèmes.

Pour revenir aux rencontres de M. Parant et de ses collègues européens en poste à Tunis avec les acteurs politiques et les représentants de la société civile en Tunisie, il convient d’y voir une volonté d’aider tous ces protagonistes à reprendre langue, à rapprocher leurs vues, à avancer vers des solutions pacifiques et d’éviter les postures intransigeantes sinon extrémistes qu’affichent certains d’entre eux, à commencer par le président de la république Kaïs Saïed, et qui pourraient amener le pays vers l’inconnu des escalades et des confrontations.

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