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La Tunisie face à la crise alimentaire mondiale

Face à la hausse des prix des produits alimentaires dont se plaignent sans cesse les citoyens, les autorités tunisiennes suivent une politique de l’autruche qui les enferme dans une logique de déni et ne leur permet pas de prendre les bonnes mesures pour régler les vrais problèmes. Au contraire, elle en fait des donquichotte guerroyant contre des moulins à vent et perdant un temps précieux dans la futilité des postures et l’auto-mensonge.

Par Imed Bahri

«Rien qu’en mars, les prix des denrées alimentaires ont augmenté de 13%, atteignant leur plus haut niveau depuis que les Nations Unies ont commencé à les suivre en 1990. Un panier de produits comprenant des céréales, de la viande et des produits laitiers coûte désormais 34% de plus qu’il y a un an», écrivait cette semaine le Washington Post, se faisant l’écho des inquiétudes partagées par tous les gouvernements à travers le monde, qui appréhendent, à juste titre, une grave crise alimentaire mondiale causée par la forte hausse des prix des céréales, des engrais, de l’énergie et du transport depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine.

La crise alimentaire est à nos portes

Au lendemain du déclenchement de cette guerre impliquant deux pays parmi les plus grands exportateurs de céréales et d’engrais au monde, la Banque mondiale a publié un rapport où elle alertait la communauté internationale contre le spectre de la famine qui pourrait se déclarer dans plusieurs pays pauvres ou alimentairement dépendants des approvisionnements mondiaux, en citant la Tunisie parmi les pays menacés.

Il n’y a donc qu’en Tunisie, un pays qui traverse une grave crise économique et financière et qui ne sait même pas encore comment financer son budget pour le restant de cette année 2022, où les autorités, présidence de la république en tête, ne semblent pas vraiment s’inquiéter face à cette menace qui se précise, alors que les prix des produits alimentaires (mais pas seulement) commencent à chauffer gravement et que le pouvoir d’achat des citoyens, rogné par la hausse continue du taux d’inflation, pique du nez.

Pire encore, les membres du gouvernement, relayés par les médias publics complaisants, n’ont qu’un seul souci : calmer les inquiétudes des citoyens confrontés à la forte hausse des prix constatée sur le marché local par des assurances auxquelles eux-mêmes ont du mal à croire.

Un président hors-sol et hors-temps

C’est ainsi, on ne le sait que trop, que fonctionnent les régimes autoritaires régentés par un seul homme, et c’est le cas de la Tunisie actuel, où le président Kaïs Saïed accapare tous les pouvoirs depuis le 25 juillet dernier et ne semble pas bien comprendre les charges liées à sa fonction et les urgences auxquelles son pays fait face.

Ce président hors-sol et hors-temps, qui vit dans sa bulle, la tête dans les nuages, s’échine – par déformation professionnelle puisqu’il est professeur de droit – à promulguer des décrets pour régenter la vie publique que personne, autour de lui, dans le gouvernement et dans l’administration publique, n’a vraiment les moyens de faire appliquer. C’est le cas, par exemple, du décret destiné à combattre la spéculation et les monopoles et qui prévoit de très lourdes sanctions privatives de la liberté (allant jusqu’à 30 ans de prison pour les auteurs de tels délits aggravés) que, parions-le, aucun juge un tant soit peu raisonnable n’appliquera. D’autant que les autorités, qui tentent d’expliquer les hausses des prix par les seuls agissements des réseaux de contrebande et de spéculation, ne sont pas parvenues jusque-là à débusquer les supposés barons de ces réseaux.

Des responsables qui rechignent à faire face aux problèmes

Ce qui inquiète vraiment dans les postures populistes du président de la république et de «son» gouvernement, c’est leur manière de botter en touche, de regarder ailleurs, de provoquer des écrans de fumée pour ne pas avoir à faire face aux problèmes et à leur trouver des solutions concrètes et, surtout, adaptées et applicables immédiatement, car la situation ne souffre plus la lenteur, l’hésitation et la procrastination.

Cette politique de l’autruche est d’autant plus suicidaire qu’elle aveugle ceux qui la suivent et ne leur permet pas de prendre les bonnes mesures pour régler les vrais problèmes. En les enfermant dans une logique de déni, cette politique fait des responsables politiques des donquichotte guerroyant contre des moulins à vent et perdant un temps précieux dans la futilité des postures et l’auto-mensonge qui est, on le sait le plus court chemin vers l’échec.

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