Tunisie – Affaire de l’«appareil secret» : Ennahdha botte en touche

Dans l’affaire de l’appareil secret d’Ennahdha, la stratégie de défense du parti islamiste tunisien consiste à éviter de s’attaquer au fond du sujet, notamment les preuves présentées par la défense de Belaid et Brahmi et que le juge d’instruction a jugé recevables et pouvant constituer de sérieux éléments à charge contre des dirigeants nahdhaouis. Il est plus facile, il est vrai, et moins compromettant, de botter en touche et de crier à l’ingérence du pouvoir exécutif dans les affaires judiciaires. Mais la couleuvre est trop grosse pour être avalée.

«Le mouvement Ennahdha et son président Rached Ghannouchi sont innocents des accusations portées contre eux par le comité de défense des martyrs Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi», a déclaré la responsable du bureau juridique du parti islamiste tunisien, Zeineb Brahmi.

«L’appareil secret est une affaire fabriquée», a-t-elle ajouté lors d’une conférence de presse tenue mercredi 1er juin 2022, au siège d’Ennahdha, en réaction aux déclarations des membres de la commission des avocats au cours d’une conférence tenue plus tôt dans la journée.

Mme Brahmi a réaffirmé que Ghannouchi n’avait pas été informé de la décision d’interdiction de voyager prise à son encontre par le tribunal de première instance de l’Ariana. «Cette décision, qui a été annoncée sur les réseaux sociaux, est purement politique», a-t-elle dénoncé.

Pour sa part, le porte-parole du parti, Imed Khemiri, a déclaré que la décision d’interdire à Rached Ghannouchi de voyager vise à «justifier le coup d’État du 25 juillet», par allusion à l’annonce des mesures exceptionnelles par le président Kaïs Saïed à cette même date. Pour lui, les affaires fabriquées visent à nuire aux partis politiques et aux personnalités, afin de «faire passer des mesures illégales et anticonstitutionnelles».

Le président de la république rencontre souvent les ministres de la Justice et de l’Intérieur pour faire pression sur la justice, a encore souligné M. Khémiri.

De son côté, le membre du bureau juridique d’Ennahdha, Sami Triki, a démenti les «graves accusations» portées contre Ghannouchi, en affirmant que le comité de défense de Belaïd et Brahmi, assassinés en 2013 par des extrémistes de la mouvance islamiste, soutient le «coup d’Etat» de Kaïs Saïed.

On remarquera que la stratégie de défense du parti Ennahdha évite de s’attaquer au fond du sujet, notamment les arguments et les preuves présentés par la défense de Belaid et Brahmi et que le juge d’instruction du tribunal de première instance de l’Ariana a jugé recevables et pouvant constituer de sérieux éléments à charge contre des dirigeants d’Ennahdha.

Il est plus facile, il est vrai, de s’attaquer au président Saïed en l’accusant de despotisme, alors qu’il est de notoriété publique que si l’affaire de l’appareil secret d’Ennahdha n’a pas bougé d’un iota au cours des dernières années, c’est parce que le parti islamiste était au pouvoir de 2011 à 2021 et qu’au cours de cette période, il a réussi à infiltrer la justice et à mettre ses larbins, des juges ripoux dont 57 ont été révoqués hier soir par décret présidentiel, à toutes les échelles de la justice.

Il reste cependant à espérer que la justice, ainsi libérée des influences nocives, accepte de faire amende honorable, de se réformer et d’examiner les affaires politiques avec professionnalisme, la rigueur et l’impartialité requis.

I. B.

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