Big Apple Farm : des investisseurs chinois à l’assaut des terres agricoles américaines

Des investisseurs chinois achètent des terres agricoles américaines à un rythme effréné au milieu des craintes de dirigeants états-uniens. Ils voient d’un mauvais œil l’appétit vorace de la Chine communiste à acquérir des terrains dans des endroits classés zones sensibles, des parcelles à courte distance des casernes et des bases militaires.

Par Mohsen Redissi *

D’après le rapport de 2021 du département américain de l’Agriculture, USDA, seulement 3% de terres agricoles sont détenues par des étrangers, les 97% restants sont entre les mains de citoyens américains. Il n’y a pas de quoi s’alarmer.

Rice Belt (1)

Des investisseurs chinois, une poignée de cent quarante six, détiennent 383935 acres (2) soit 155373 hectares. La plus grande parcelle se trouve au Texas. Elle couvre 65040 hectares. Toute possession confondue représente moins de 1% des terres détenues par des étrangers.

En superficie, les Chinois détiennent environ l’équivalent de deux fois la taille de la ville de New York, une infime partie dans ce vaste continent. Certains législateurs veulent interdire aux entreprises chinoises de posséder des terres agricoles américaines.

Total des acres détenus par des pays étrangers classés par origine et par importance.

Source: Agri Pulse.

La plupart de ces investisseurs sont à la solde du gouvernement communiste chinois, des espions déguisés en propriétaires terriens. «Ils ne devraient pas être autorisés à posséder des terres agricoles américaines, en particulier à proximité d’installations militaires critiques», tels sont les termes d’un nouveau projet de loi demandant au président Biden de prendre les mesures nécessaires pour leur interdire d’acheter des biens immobiliers publics ou privés sur tout le territoire américain. 

Leur rêve peut-être brisé par le regain de nationalisme conjugué avec un sentiment antichinois. Des relents de peur du péril jaune. Il est le résultat d’un duel au sommet entre les deux superpuissances, la Russie étant embourbée dans une guerre qui s’éternise et dont l’issue reste incertaine. La petitesse des lots et l’éparpillement des parcelles ne sont pas tenus en compte. La taille et l’appétit du pays possesseur qui prédominent.

Cette tension entre les deux nations est exacerbée aussi par les récents événements tragiques. Les Etats-Unis ont abattu un premier ballon espion chinois, puis un deuxième quelques jours après. Quatre en tout pour le moment. Joe Biden s’est engagé à abattre tout objet aérien qui menacerait la sécurité des Etats-Unis. La Chine déplore la méprise, l’objet volant abattu était un ballon météorologique. Le Pentagone est certain à 100% que le ballon chinois était un élément d’espionnage.
Ce n’est pas la première fois que la Chine viole l’espace aérien américain. D’après les rapports de renseignements du ministère de la Défense, des ballons chinois ont traversé l’espace aérien américain à trois reprises au moins sous la présidence de Donald Trump. Biden n’a donné l’ordre d’abattre le premier ballon qu’à son deuxième survol du territoire américain.

The Chinese Dream

L’investissement étranger dans les terres agricoles met la sécurité alimentaire du pays en danger pour certains parlementaires. Cette lubie de se voir à la merci de facteurs externes a poussé quatorze États à limiter ou à interdire d’une manière ou d’une autre aux étrangers d’acquérir des terres agricoles dans leur juridiction. Un comble pour un pays historiquement bâti sur l’achat de terres par des colons.

Avec la flambée des prix du pétrole au milieu des années 70 et la montée en puissance des pays exportateurs de pétrole, l’Etat fédéral a repensé sa politique agraire. Le Congrès, de peur de voir l’excédent en pétrodollars investis aux E-U dans l’achat de terres agricoles, a promulgué l’Agricultural Foreign Investment Disclosure Act, Afida. Cette loi oblige les parties contractantes à informer le département de l’Agriculture de toute mutation de terres agricoles à des entités étrangères. Les Etats peuvent ainsi tenir à jour leur registre foncier et utiliser à bon escient les mouvements de ventes ou de collaborations.

L’achat de territoires est la monnaie d’échange et un outil important dans l’expansion des États. L’acquisition en terre lointaine est aussi considérée comme un poste avancé et un rempart. 

Que se passe-t-il dans l’esprit de la Chine? Seul Pékin peut y répondre.

* Haut fonctionnaire à la retraite.

 Notes :

(1) Ceinture, dénomination utilisée par les Américains pour désigner les vastes régions où une monoculture est appliquée comme la Corn Belt (maïs), la Rice Belt (riz), etc.

(2) Une acre équivaut à environ 40,46 ares, 4 046 m2 ou 43560 pied.

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