20 Chinois construisent un barrage au Kef, 121 000 Tunisiens payés pour ne rien faire

«Dans le pays des merveilles, vingt Chinois construisent un barrage dans la région de Kef. En revanche, en Tunisie, nous trouvons plus de 16 000 travailleurs et cadres dans les sociétés dites d’environnement, de plantation et de jardinage, qui coûtent plus de 1000 millions de dinars chaque année, sans qu’aucun travail notable n’ait été réalisé depuis 2008, pas même la plantation d’un seul arbre…» (Illustration : barrage Mellègue Supérieur en construction au Kef).

Par Hssan Briki

Cette phrase est extraite d’une publication facebook de l’ancien membre de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), Mongi Harbaoui, qui décrit une scène à laquelle il a assisté lors d’un déplacement dans le gouvernorat du Kef, résumant ainsi les différences de sens du travail et de productivité entre les Chinois et les Tunisiens. Ainsi que l’écart de développement économique entre les deux pays qui étaient (presque) au même niveau de développement il y a 70 ans. 

Le député a observé les travaux du projet de barrage Mellègue Supérieur en cours d’achèvement, coûtant 277 millions de dinars, réalisé par une entreprise chinoise avec environ 20 ouvriers venus de Chine, soutenus par une poignée de locaux pour la surveillance et quelques tâches mineures. Le projet avançait rapidement, de manière méthodique et précise. 

Le député Mongi Harbaoui avec deux travailleurs chinois.

Ensuite, l’ancien député a fait une comparaison symbolique en évoquant les chiffres importants des travailleurs non productifs en Tunisie, tels que 16 000 ouvriers et cadres dans les sociétés de l’environnement, de plantation et de jardinage, 84 000 travailleurs des chantiers, 21 000 travailleurs faisant partie des mécanismes 16 et 20, soit un total de 121 000 salariés qui coûtent énormément à l’Etat sans une productivité significative.

Efficacité chinoise, inefficacité tunisienne

Cette comparaison met en évidence la différence flagrante entre l’efficacité et la productivité des travailleurs chinois et l’inefficacité observée chez la majorité des Tunisiens, soulignant la nécessité d’améliorer le sens et la valeur du travail chez les nôtres qui méritent, en quelque sorte, le sous-développement chronique où ils se trouvent aujourd’hui. 

Cette image révélatrice illustre effectivement la différence de perception du travail entre le citoyen chinois, qui a grandi avec le respect quasi-religieux de cette valeur et qui contribue à l’ascension de la Chine en tant que grande puissance économique mondiale aux côtés des États-Unis, et le citoyen tunisien dont la personnalité se forme dans le mépris de cette valeur, et l’attachement au gain facile et sans effort, par la rapine ou la ruse. 

Post Mongi Harbaoui.

En effet, la Tunisie, autrefois reconnue pour sa main-d’œuvre compétente et dévouée, fait face aujourd’hui à un déclin inquiétant de la valeur du travail. Cette dégradation se manifeste par plusieurs aspects préoccupants ayant des conséquences significatives sur la société et l’économie du pays. Pour mieux comprendre ce phénomène, il est essentiel d’examiner en détail ces différentes manifestations et d’analyser les causes profondes qui ont contribué à cette régression. 

Tout d’abord, la triche généralisée aux examens parmi les étudiants tunisiens est l’une des premières manifestations de cette dégradation culturelle. Selon une étude réalisée en 2008, 20% des élèves du collège et 17% des élèves du lycée ont été pris en flagrant délit de tricherie. Cette attitude non éthique témoigne d’un manque de considération pour l’importance du travail acharné et de l’apprentissage, sapant ainsi les fondements mêmes de la culture du travail. 

Un autre aspect alarmant de cette problématique réside dans le taux élevé d’absences injustifiées au travail. En 2020, ce taux a atteint une proportion inquiétante de 85%. Cette absence de respect pour le temps de travail entraîne une baisse de productivité globale et affecte négativement la compétitivité du pays sur la scène internationale. 

Parallèlement, l’inondation des marchés tunisiens par des produits turcs et chinois, avec une absence quasi totale de produits locaux, reflète un manque de confiance envers l’industrie nationale. La concurrence accrue des produits étrangers décourage les investissements et l’innovation dans le secteur local, contribuant ainsi à la dévalorisation du travail national. 

Emplacement du barrage Oued Mellegue Supérieur à l’est de la ville du Kef.

En outre, certains chômeurs tunisiens préfèrent fréquenter les cafés plutôt que de rechercher un emploi honnête. Cette préférence témoigne d’un manque de motivation pour s’engager dans la vie professionnelle. Le chômage élevé et l’absence de perspectives peuvent décourager les individus de chercher activement du travail, alimentant ainsi le déclin de la valeur du travail. 

Une autre manifestation de la dégradation de la valeur du travail chez les Tunisiens réside dans fait que certains emplois, principalement dans le secteur manuel, sont occupés par des travailleurs étrangers, notamment Africains subsahariens, tandis que de nombreux Tunisiens restent au chômage et préfèrent ne pas travailler.

Dévalorisation inquiétante de la valeur du travail

Cette situation soulève des inquiétudes quant à la perception du travail, car certains individus peuvent considérer ces emplois comme moins valorisants ou moins prestigieux, conduisant à un manque de motivation pour les pourvoir.

Le découragement face à l’avenir professionnel et le manque de considération pour ces emplois peuvent contribuer à une dévalorisation du travail et à une perte de sens chez certains Tunisiens. 

Pour remédier à cette situation, il est crucial de promouvoir une culture du travail valorisant toutes les formes d’emploi, tant au niveau de l’éducation, des médias que de la famille. L’éducation devrait inclure des programmes qui soulignent l’importance du travail et développent une éthique de travail forte chez les jeunes.

Les médias ont également un rôle essentiel à jouer en mettant en valeur des réussites professionnelles inspirantes et en célébrant la valeur du travail dans toutes ses dimensions.

Enfin, au sein des familles, il est essentiel de transmettre l’appréciation du travail en montrant l’exemple et en encourageant les enfants à développer leurs compétences et leurs talents professionnels. En unissant nos efforts à tous ces niveaux, nous pouvons former les générations futures avec une solide compréhension de la valeur du travail, créant ainsi une société épanouissante où chacun peut contribuer pleinement à l’économie et à la société dans son ensemble. 

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