Quand un chef de l’Etat convoque les responsables des médias pour leur faire la leçon sur la manière de gérer les entreprises dont ils ont la charge, on peut sérieusement craindre l’ingérence du pouvoir exécutif dans la ligne éditoriale de ces médias. Vidéo.
Après avoir fait la leçon, le 4 août 2023, à la directrice générale de l’Etablissement de la télévision tunisienne (ETT), Awatef Dali, provoquant une véritable polémique sur la relation des médias publics avec le pouvoir exécutif, le président Kaïs Saïed est revenu à la charge hier, mardi 8 août, au palais de Carthage, en rencontrant Chokri Ben Nsir, PDG de la Société nationale d’imprimerie, de presse et d’édition (Snipe La Presse), et Mohamed Hechmi Blouza, administrateur délégué de Dar Assabah.
Selon un communiqué de presse de la présidence, le président Saïed a exprimé son soutien aux deux anciennes institutions de presse, surtout après qu’elles n’ont pas pu publier hier à la suite d’un dysfonctionnement qu’on a tenté de réparer et qui a été suivi d’une second dysfonctionnement. «Cela soulève la question de savoir s’il s’agit d’un véritable dysfonctionnement ou d’un dysfonctionnement provoqué» , indique le communiqué, laissant entendre qu’il s’agit d’un sabotage, conformément à la théorie du complot qui permet au président Saïed d’expliquer tous les problèmes du pays, sachant que les deux entreprises relevant de la responsabilité directe de l’Etat souffrent de graves problèmes financiers et que leurs machines d’impression sont vieilles et mal entretenues, en raison, justement, de ces problèmes financiers.
Le président Kaïs Saïed a rappelé que la Tunisie n’est pas prête à abandonner son histoire, et que parmi ses phares se trouvent les journaux La Presse et Assabah, car «l’histoire, le présent et l’avenir de la Tunisie ne sont pas des marchandises à vendre», fermant ainsi la porte devant toute solution basée sur la cession des deux entreprises au privé.
Le président de la république a réitéré son engagement à faire fusionner les deux entreprises en une seule entité qui publierait les deux journaux et autres titres édités par les deux maisons, solution que les employés des deux entreprises appréhendent à juste titre, car elle n’a pas été précédé d’une étude préalable digne de ce nom qui établirait les conséquences positives et négatives d’une telle fusion.
L’entretien a également abordé l’histoire de la presse tunisienne et l’histoire des textes relatifs à son organisation. Le président de la république a rappelé que l’histoire de la presse tunisienne est ancienne et que le désir de liberté d’expression des Tunisiens est plus ancien que ces textes, qui remontent à la période coloniale française.
La rencontre a également été l’occasion d’évoquer un certain nombre de journaux et magazines publiés en Tunisie, dont le journal El-Hadhira et plusieurs autres, dont La Presse et Assabah, et la plupart de ces journaux ont joué un rôle historique dans le mouvement de libération nationale.
D’autre part, le président de la république a souligné la liberté de pensée précède la liberté d’expression et que le peuple tunisien fait bien la distinction entre les libres penseurs qui s’attachent à leur patrie et ceux qui prétendent défendre la liberté d’expression tout en n’étant pas libres dans leur pensée, réitérant ainsi ses attaques habituelles contre ceux qui l’accusent de museler les libertés en général et de porter atteinte à la liberté d’expression en particulier. Pour lui, il s’agit de personnes non-patriotiques et qui sont au service de lobbies intérieurs et extérieurs, étant entendu qu’un patriote n’est pas censé critiquer le chef de l’Etat.
I. B.
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