Les deux visages de la jeune démocratie tunisienne

Dans son ouvrage, ‘‘Janus ou la démocratie à deux têtes : Chroniques 2018-2020 ’’, paru en 2020 aux éditions Nirvana à Tunis, Hatem M’rad, professeur de sciences politiques, interroge la transition démocratique tunisienne dans sa continuité et ses ruptures.

Selon l’auteur, la jeune démocratie tunisienne a deux visages. Un visage positif dans la durée et dans la profondeur, celui d’une démocratie qui se consolide de proche en proche, d’élection en élection, régulière, plurielle, contrôlée, transparente, disputée, valide et incontestable, élargissant sans rupture la sphère des libertés. Le second visage, visible dans le quotidien, dans l’instant présent, est terne, alarmant et récusable. «Les deux visages ne se rencontrent pas. Et pourtant, ils coexistent et se confondent dans une seule démocratie en mal de repères», écrit M’rad.

C’est ce qui ressort de l’ensemble des chroniques de l’auteur, écrites entre 2018 et 2020 et publiées au journal Le Courrier de l’Atlas, où il suit au jour le jour les deux visages de la démocratie tunisienne, ses promesses et es incertitudes.

Ce n’est donc pas un essai pensé, structuré et développé suivant un plan préétabli et un cheminement rigoureux qu’imposent les règles académiques, mais une réflexion libre sur l’actualité quotidienne qui, à travers l’écume des faits, des actes et des déclarations, cherche à débusquer des tendances lourdes ou des lignes de fuite.

C’est toute l’histoire contemporaine de la Tunisie qui défile, avec ses figures tutélaires, de Bourguiba à Caïd Essebsi, en passant par Ben Youssef et Ghannouchi. Mais aussi les tournants, les points de rupture et les dates clés qui ont compté dans le cheminement cahotant d’une démocratie aux prises avec les démons de toujours : autoritarisme, islam politique, crise identitaire, syndicalisme, populisme, querelles d’égos, etc.  

«Entre l’illusion démocratique et le cauchemar antidémocratique, il doit y avoir place pour un juste milieu, celui d’une démocratie guidée par un réalisme constructif. Un réalisme qui ne doit pas prêter l’oreille aux sirènes de la fatalité, mais tenter toujours d’améliorer les idées et de faire progresser les institutions, les règles, les hommes et les pratiques… et de situer les évènements dans la durée», conclut Hatem Mrad, sur un ton qui se veut sciemment optimiste, car une démocratie a besoin de temps pour advenir et consolider ses assises. C’est un long processus de transition qui s’inscrit dans la durée.

Hatem M’rad est professeur de science politique à la Faculté des Sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis, Université de Carthage. Il est président-fondateur de l’Association tunisienne d’études politiques, ancien membre élu de l’Executif Committee of the International Political Science Association (Ipsa), et directeur-fondateur de la Revue tunisienne de science politique. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages portant sur le libéralisme, l’opinion publique, la citoyenneté, la gouvernance et la vie politique en Tunisie.

I. B.

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