La Tunisie a célébré hier, dimanche 13 août, la Journée nationale de la femme. Un sujet aurait dû être mis en avant à cette occasion: l’établissement de nouvelles normes contraignantes pour lutter contre les violences faites aux femmes, en forte croissance dans une société en crise.
Par Najet Zammouri *
Je reçois souvent des appels de femmes qui me font part de menaces et d’actes de violence qui ont considérablement augmenté au cours de la dernière décennie. J’entends des témoignages de femmes maltraitées, agressées, et victimes de comportements pervers et narcissiques.
Ces formes d’abus englobent des agressions verbales, psychologiques, ainsi que des menaces, des violences physiques et sexuelles. Ces abus persistent dans leur domicile, dans les espaces publics et sur leur lieu de travail, entraînant parfois des traumatismes physiques, psychologiques et sexuels graves.
Des militants des droits humains du monde entier partagent des récits similaires sur l’escalade de la violence envers les femmes. Par exemple, une amie turque m’a raconté l’histoire de femmes ayant été contraintes de quitter leur foyer en raison d’inondations, pour se retrouver dans des camps où les agressions sexuelles et le harcèlement étaient malheureusement monnaie courante. En Tunisie, la période de la pandémie de Covid-19 a vu une augmentation sans précédent de la violence domestique. Une collègue palestinienne a souligné l’augmentation dramatique des agressions sexuelles au sein de l’armée.
Contrer une violence croissante
Une question revient constamment : Pourquoi ? Pourquoi le monde ne prend-il pas des mesures concrètes face à cette situation ?
Je suis incapable de fournir une réponse à cette question. Au cours des trente dernières années, des experts, qu’il s’agisse de la Commission sur le Statut des Femmes, des Rapporteurs Spéciaux sur la violence envers les femmes ou des défenseurs de première ligne, n’ont cessé d’appeler à l’adoption d’un traité mondial visant à éliminer la violence envers les femmes et les filles.
Cependant, malgré la crise des droits humains la plus répandue sur terre, les gouvernements n’ont pas fait de la sécurité des femmes et des filles une priorité majeure. Même en période de crises telles que les conflits, les changements climatiques et la pandémie de Covid-19, les gouvernements n’ont pas cherché activement des solutions concrètes pour contrer cette violence croissante.
Des experts ont souligné que le cadre juridique mondial actuel est insuffisant pour répondre à l’ampleur du problème. Certains prétendent simplement qu’il faudrait mieux mettre en œuvre les instruments existants, tandis que d’autres estiment que le moment n’est pas opportun. Dans un contexte conservateur où l’on observe un recul des droits des femmes, négocier un tel instrument est perçu comme risqué.
De nos jours, la violence envers les femmes et les filles se propage à l’échelle mondiale, avec des taux en constante augmentation et des formes variées d’abus. Cette violence aura des répercussions sur la santé, la prospérité et la sécurité de chaque nation pour les générations futures.
Protection maximale pour les femmes
Des femmes et des jeunes filles sont en train de perdre la vie, tandis que les militantes qui les soutiennent sont pourchassées. La violence continue de croître. Cela nous amène à nous poser une question essentielle : Est-ce que les besoins des femmes et des jeunes filles sont pleinement satisfaits par le système actuel ? La réponse est sans équivoque : NON.
Bien que des progrès aient été réalisés grâce aux systèmes et cadres en place, ils ne suffisent pas à contrer la montée en puissance de la violence. Il est clair que cela ne suffit pas. Pourtant, nous n’avons pas encore adopté l’outil le plus puissant à notre disposition : un traité mondial spécifiquement conçu pour éradiquer la violence envers les femmes et les filles.
Face à la recrudescence de la violence envers les femmes, il est impératif de fournir aux femmes du monde entier une protection maximale à travers l’établissement d’une nouvelle norme contraignante. Il est temps de cesser de prétendre que nous avons épuisé toutes les possibilités, alors que ce n’est pas le cas. Nous devons reconnaître la réalité de ce qui est réalisable et nous y engager résolument.
* Première vice-présidente de la Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme.
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