L’Algérie, qui entretient des relations très étroites avec la Chine et la Russie, s’y voyait déjà, ou presque. Mais sa candidature à l’adhésion au groupe des Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) n’a pas été retenue. Déception et incompréhension à Alger qui aurait pu, s’il avait fait une bonne analyse, éviter ce qui ressemble à un camouflet.
Par Imed Bahri
En effet, le rejet de la candidature algérienne était attendu, sauf par l’Algérie qui a visiblement présumé de ses capacités et de ses chances. S’il était mieux conseillé, le président Abdelmadjid Tebboune aurait évité de faire de l’adhésion de son pays aux Brics une priorité. En décembre 2022, il déclarait aux médias locaux que «l’année 2023 sera couronnée par l’adhésion de l’Algérie aux Brics». Il avait aussi fait le forcing auprès de certains pays membres afin qu’ils plaident en faveur de l’entrée de son pays dans ce club. Cela avait notamment été le cas lors de ses récentes visites en Russie, en juin, et en Chine, en juillet, dont il avait reçu les soutiens respectifs. Mais cela n’était visiblement pas suffisant…
Ces pays avait convenu de critères précis pour l’adhésion au groupe, qui sont essentiellement économiques, et rien ne permettait de supposer qu’ils étaient prêts à les transgresser pour des considérations politiciennes.
Aussi, et en apprenant, peu de temps avant l’ouverture du sommet de Johannesburg, que son pays n’allait pas avoir l’honneur de l’adhésion aux Brics, le président Tebboune a-t-il décidé de ne pas faire le déplacement lui-même en Afrique du Sud et d’y dépêcher son ministre des Finances.
Une économie de rente peu diversifiée
Les pays dont la candidature a été retenue et qui vont être membre de ce groupement mondial à compter du 1er janvier 2024, à savoir l’Iran, l’Argentine, l’Égypte, l’Éthiopie, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis ont un certain poids à la fois démographique, stratégique et économique. Ils ont aussi une économie assez diversifiée et qui pèse sur les plans régional et mondial. Ce qui n’est pas le cas de l’Algérie dont l’économie, malgré les efforts de diversification de ces dernières années, reste trop dépendante de la production du pétrole et du gaz.
A défaut d’un «miracle économique», l’Algérie a rêvé d’un «miracle diplomatique» qui n’eut finalement pas lieu, dans un monde nouveau où les affinités idéologiques – sur lesquelles nos voisins algériens ont exclusivement misé – ont moins d’importance que les intérêts économiques ? C’est là la seconde leçon à tirer de ce camouflet : aux yeux des Russes et des Chinois, les Emirats arabes unis et l’Arabie saoudite, alliés historiques des Etats-Unis et du bloc occidental, ont plus de poids stratégique que l’Algérie.
La Tunisie préfère temporiser
Dans ce contexte, et contrairement à l’Algérie, la Tunisie a fait une bonne analyse de ses moyens et de ses chances. Aussi s’est-elle gardée de présenter sa candidature pour l’adhésion à un groupe qui ne peut pas lui apporter grand-chose pour le moment, le pays étant fortement arrimé au bloc occidental, représentant près de 80% de ses échanges extérieurs.
Samir Saïed, ministre de l’Economie et de la Planification, avait d’ailleurs déclaré, lors d’une plénière à l’Assemblée, le 29 juillet dernier, que le volume de l’économie tunisienne ne lui permettait pas de rejoindre les Brics. «Nous devons être réalistes étant donné que le volume des échanges commerciaux avec ces pays (des Brics, Ndlr) est relativement modeste», a souligné, de son côté, l’Observatoire tunisien de l’économie (OTE) dans une note publiée à l’occasion du 15e sommet des pays membres à Johannesburg, intitulée «L’Afrique du Nord et les Brics».
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