Colloque à Tunis : «Mohamed Salah Mzali : la Tunisie du makhzen à l’État national»

Un colloque interdisciplinaire autour du thème «Mohamed Salah Mzali (1896-1984) : la Tunisie du makhzen à l’État national» se tiendra, les 14 et 15 décembre 2023, au Palais de l’Académie tunisienne des sciences, des lettres et des arts, Beït Al-Hikma, à Carthage Hannibal.

Ce colloque est organisé par le département des sciences humaines et sociales de Beit Al-Hikma, en partenariat avec l’Institut de recherche sur le Maghreb contemporain (IRMC) et le Centre national de la recherche scientifique (CNRS -France), à l’occasion de la réédition, par Beït Al-Hikma, Cérès éditions et l’IRMC, de l’ouvrage ‘‘Au fil de ma vie, mémoires de Mohamed Salah Mzali (1896-1984)’’.

Ce colloque ambitionne d’être une occasion de croiser les regards sur cette première partie du XXe siècle en Tunisie, à travers le prisme de l’aboutissement d’une trajectoire familiale, celle de Mohamed-Salah Mzali, marquée par une ascension continue vers et dans le makhzen. Sa trajectoire personnelle étant celle de l’émergence d’une nouvelle méritocratie s’appuyant sur les études. Il incarne cette frange du makhzen, inscrite dans la modernité, qui a cru en la possibilité d’un passage progressif de la féodalité à la modernité, d’une accession en douceur de la Tunisie et des Tunisiens vers la maîtrise de leur destin.

La Tunisie du protectorat au lendemain de l’indépendance

Mohamed Salah Mzali est l’un des tout premiers docteurs en droit tunisiens et est le premier à soutenir une thèse de doctorat en sciences économiques, en 1921. Avec 20 ans de services dans l’enseignement tant à Sadiki qu’à la Zitouna, 27 ans de services administratifs et 10 ans de participation au gouvernement dans différents secteurs (habous, affaires sociales, commerce, artisanat et industrie), il est le premier Grand Vizir tunisien à être également «raïs houkouma» (traduit alors par président du conseil). La nouvelle organisation des pouvoirs qu’il a mise en place sera reprise ensuite par les Grands vizirs Tahar Ben Ammar et Habib Bourguiba.

Il a été tour à tour (et parfois simultanément) enseignant, historien, acteur de la vie intellectuelle de son temps, haut fonctionnaire, homme politique, etc. Et ses mémoires sont ainsi à la fois un témoignage historique, politique et sociologique.

Du point de vue politique, sa participation au gouvernement Chenik et son implication dans la requête tunisienne à l’Onu, lui ont valu d’être déporté par les Français. Les accords Mzali-Voizard de mars 1954 ont été considérés comme une avancée par les uns et comme une trahison par d’autres et lui ont valu d’être condamné à l’indignité nationale après l’indépendance, puis amnistié. Sa relation avec Bourguiba a toujours été chaleureuse et tendue à la fois.

Sur le plan social Mohamed Salah Mzali est l’aboutissement d’une trajectoire familiale marquée par une ascension continue vers et dans le makhzen.

Sur le plan culturel, Mzali a été un acteur important de la vie intellectuelle de son temps et a participé aux instances des revues et sociétés culturelles et littéraires. Ses mémoires illustrent l’effervescence de cette époque.

Il consacre enfin les presque trente dernières années de sa vie à l’écriture et à l’histoire de la Tunisie. On dénombre, dans sa bibliographie, une dizaine de monographies et près de 30 autres publications, en français et en arabe qui, pour beaucoup d’entre elles, s’appuient sur les archives personnelles du général Khéredine dont il a été le dépositaire et le passeur. Une grande partie de ce que nous savons sur le général Khéredine résulte des publications de Mzali et Pignon.

Dans chacune de ces dimensions, le colloque se propose d’élargir le propos afin d’explorer les évolutions sociales, politiques et culturelles en Tunisie du protectorat au lendemain de l’indépendance.

Les travaux de ce colloque ambitionnent également de porter un regard distancié sur cette période – la veille de l’indépendance – caractérisée par sa complexité, par une tension permanente entre continuité et rupture, entre négociation et lutte armée et au cours de laquelle de nombreux acteurs ont apporté des contributions notables avant d’être ensuite balayés de l’histoire officielle.

Une analyse plus objective de cette complexité peut fournir des clés d’analyse de la dernière décennie et notamment de toute période où l’histoire semble faire face à des bifurcations majeures.

Les travaux du colloque de Beit Al-Hikma réuniront un florilège d’intervenants de Tunisie et de l’étranger, historiens, sociologues, économistes, spécialistes de littérature, etc.

Parmi les intervenants, on compte notamment Mahmoud Ben Romdhane (président de Beit al-Hikma), Ahmed Ounaies (président de l’Association des études bourguibiennes) et de nombreux universitaires de Tunisie tels que les professeurs Noureddine Dougui, Kmar Bendana, Slaheddine Larguèche, Khelifa Chater, Mohamed Kerrou, Samia Charfi-Kassab ou Adel Ben Youssef. On compte également la participation des professeurs M’hamed Oualdi (Sciences Po, Paris), Samia El Mechat (Nice Sophia-Antiplois), Anis Marrakchi (direction générale du trésor, Paris, spécialiste de l’économie de rente), Youssef Ben Ismaïl (Columbia University, spécialiste de Khéredine) et Elyès Jouini (Dauphine, Paris, éditeur des mémoires de Mzali).

Le colloque sera accompagné d’une exposition de documents d’archives inédits, de photos, de décorations et d’articles de presse qui illustrent l’itinéraire d’un intellectuel du makhzen dans la première moitié du 20e siècle. L’exposition se poursuivra les 16 et 17 décembre pour s’ouvrir à un public plus large que celui des participants au colloque.

Communiqué.

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