Jusqu’où l’Etat tunisien peut-il continuer à se financer auprès des banques locales ?

Le secteur bancaire tunisien est en mesure de répondre aux besoins croissants de financement de l’État en 2024, mais la forte dépendance à l’égard des banques et de la Banque centrale de Tunisie (BCT) pour répondre aux besoins de financement de l’Etat pourrait entraîner des risques macroéconomiques.

C’est ce qu’a indiqué l’agence internationale de notation financière Fitch Ratings, dans une note publiée le 7 mars 2024 où elle explique qu’«une croissance saine des dépôts et une faible demande de crédit contribuent à soutenir la liquidité du secteur», ajoutant que le recours des banques au refinancement auprès de la Banque centrale de Tunisie (BCT) était inférieur à 9 milliards de dinars (soit 7% du financement total du secteur) à fin août 2023, ce qui laisse présager une liquidité adéquate.

Néanmoins, la forte dépendance à l’égard des banques et de la BCT pour répondre aux besoins de financement pourrait entraîner des risques macroéconomiques, resserrer les conditions de liquidité des banques ainsi qu’augmenter leurs risques de solvabilité en cas de défaut souverain, a indiqué l’agence de notation financière.

En février 2024, l’État a emprunté 1 milliard de dinars sur le marché intérieur, dépassant son objectif de 750 millions de dinars (MDT) pour la première tranche de souscriptions à l’emprunt obligataire national 2024. Cela s’ajoute aux 7 milliards de dinars que le Trésor a empruntés à la BCT et qui lui ont permis de rembourser 850 millions d’eurobonds (réalisés le 17 février).

Le budget 2024 prévoit une augmentation de 20% des besoins bruts de financement par rapport à l’année dernière, à 28,7 milliards de dinars, dont 40% (environ 12,3 milliards) seraient couverts par les sources de financement intérieures et le reste par des financements extérieurs, précise Fitch, soulignant que le financement budgétaire doit être égal ou supérieur à 16% du PIB par an en 2024-2025, soit l’un des pourcentages les plus élevés parmi les États souverains notés «CCC+» ou moins.

Selon la même source, «le gouvernement pourrait ne pas être en mesure de lever plus de 2,5 milliards de dollars auprès de sources de financement extérieures en 2024, ce qui laisserait un écart d’au moins 2,5 milliards de dollars par rapport au financement extérieur prévu».

Fitch ne compte pas «sur un accord entre la Tunisie et le Fonds monétaire international (FMI) avant les élections présidentielles de cette année».

L’agence estime que près de 70% des besoins bruts de financement en 2024, soit 12% du PIB, devront être satisfaits par des sources nationales, à savoir les banques et la BCT. Mais cette source est-elle intarissable et jusqu’où les banques vont-elles pouvoir aller dans cet exercice dont la conséquence principale, outre le financement des dépenses grandissantes et peu productives d’un Etat insatiable, c’est l’assèchement des liquidités pour le secteur privé qui souffre déjà du tarissement du financement bancaire.

I. B.

 

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