Que contient la note interne de censure du New York Times sur Gaza?

Une note interne du New York Times révélée par le site d’investigation américain The Intercept indique que les dirigeants du journal pratiquent la censure concernant certains termes importants relatifs à la guerre à Gaza ce qui est de nature à balancer la couverture du journal du côté du narratif israélien. Cet épisode illustre aussi une bataille interne qui secoue le célèbre journal depuis le 7 octobre. Et prouve, s’il en est besoin, l’inanité des prétentions à l’objectivité des médias occidentaux en général dont le NYT reste l’un des emblèmes. Décryptage. 

Par Imed Bahri

L’article du site d’investigation américain progressiste The Intercept écrit par Jeremy Scahill et Ryan Grimm révèle que des instructions ont été données aux journalistes couvrant la guerre israélienne dans la bande de Gaza pour restreindre l’utilisation des termes «génocide» et «nettoyage ethnique» et d’éviter d’utiliser le terme «territoires occupés» quand ils abordent les territoires palestiniens. La révélation a été faite sur la base d’une note interne du NYT dont les journalistes de The Intercept ont obtenu une copie.

Ça ne s’arrête pas là. La note exige également des journalistes de ne pas utiliser le terme «Palestine» sauf «dans des cas très rares» et de ne pas utiliser le terme «camps de réfugiés» pour décrire les zones de Gaza où les Palestiniens déplacés et expulsés d’autres parties de leur territoire ont cherché refuge lors des précédentes guerres israélo-arabes. Les Nations-Unies reconnaissent ces zones comme des camps de réfugiés qui abritent des centaines de milliers de réfugiés enregistrés mais ce n’est pas du goût de la direction du NYT.

La note -rédigé par Susan Wesling, rédactrice en chef des normes du NYT et le rédacteur international Philip Pan et leurs adjoints- «fournit des conseils sur certaines des terminologies et d’autres questions avec lesquelles nous sommes aux prises depuis le début du conflit en octobre».

Soumission au narratif israélien

Alors que le document est présenté comme un aperçu général du maintien de principes journalistiques objectifs dans la couverture de la guerre à Gaza, plusieurs membres du NYT ont déclaré à The Intercept que certains de ses contenus montrent la preuve de la soumission du journal au narratif israélien. Une source de la rédaction du journal qui a requis l’anonymat par crainte de représailles a déclaré à propos de la note interne: «Je pense que ce genre de chose semble professionnel et logique si vous n’avez aucune connaissance du contexte historique du conflit palestino-israélien. Mais si vous le saviez, vous verriez clairement le degré de justification à Israël.»

Distribuées pour la première fois aux journalistes du NYT en novembre, ces lignes directrices –qui rassemblaient et développaient les anciennes directives de style concernant le conflit israélo-palestinien– ont été régulièrement mises à jour au cours des mois qui ont suivi. Ils présentent une fenêtre interne sur la pensée des rédacteurs internationaux du NYT alors qu’ils ont été confrontés à des bouleversements au sein de la rédaction suite à la couverture de la guerre à Gaza par le journal. «Publier des directives comme celles-ci pour garantir l’exactitude, la cohérence et la nuance dans la façon dont nous couvrons l’actualité est une pratique courante», a déclaré Charlie Stadtlander, porte-parole du NYT avant de poursuivre: «Dans tous nos reportages, y compris sur des événements complexes comme celui-ci, nous veillons à ce que nos choix linguistiques soient sensibles, actuels et clairs pour notre public.»

Les questions concernant les orientations stylistiques font partie d’une série de divisions internes au sein du journal concernant sa couverture médiatique de Gaza. En janvier, The Intercept a fait état de différends dans la rédaction au sujet d’un article d’enquête sur les violences sexuelles du 7 octobre. La fuite a donné lieu à une enquête interne très inhabituelle. Le NYT a fait l’objet de sévères critiques pour avoir prétendument ciblé des travailleurs du journal d’origine moyen-orientale et nord-africaine, ce que les dirigeants ont nié. Lundi, le rédacteur en chef Joe Kahn a déclaré au personnel que l’enquête sur les fuites avait été conclue sans succès.

Police de la pensée

Presque immédiatement après le 7 octobre et le lancement de la guerre de la terre brûlée par Israël contre Gaza, les tensions ont commencé à monter en ébullition au sein de la rédaction à propos de la couverture médiatique du NYT. Certains membres du personnel ont déclaré qu’ils pensaient que le journal faisait tout son possible pour s’en remettre au récit israélien sur les événements et n’appliquait même pas les normes dans sa couverture. Les disputes ont commencé à fomenter sur le groupe Slack (plateforme interne de communication entre collègues) et sur les autres groupes de discussion sur WhatsApp. 

Les débats entre journalistes du groupe WhatsApp dirigé par le bureau du NYT à Jérusalem, qui comprenait à un moment donné 90 journalistes et rédacteurs, sont devenus si intenses que Pan, le rédacteur international, est intervenu. Le bureau de Jérusalem est l’un des plus importants du journal dans le monde et fut dirigé il y a quelques décennies par Thomas Friedman après qu’il ait dirigé le bureau de Beyrouth. 

«Nous devons mieux communiquer les uns avec les autres lorsque nous rapportons l’actualité afin que nos discussions soient plus productives et nos désaccords moins distrayants», a écrit Pan dans un message WhatsApp du 28 novembre consulté par The Intercept et rapporté pour la première fois par le Wall Street Journal. «À son meilleur, ce canal de communication a été un espace rapide, transparent et productif pour collaborer sur une histoire complexe et en évolution rapide. Dans le pire des cas, c’est un forum tendu où les questions et les commentaires peuvent paraître accusateurs et personnels.»

Pan a déclaré sans ambages: «N’utilisez pas ce canal pour exprimer des inquiétudes concernant la couverture médiatique.»

Des «valeurs» à la tête du client

Parmi les sujets de débat au sein du groupe WhatsApp du bureau de Jérusalem et d’échanges sur Slack, examinés par The Intercept et vérifiés auprès de plusieurs sources de la rédaction, figuraient les attaques israéliennes contre l’hôpital Al-Shifa, les statistiques sur les morts de civils palestiniens, les allégations de conduite génocidaire d’Israël, et la tendance du président Joe Biden à promouvoir les allégations non vérifiées du gouvernement israélien comme des faits. Pan n’a pas répondu à une demande de commentaire.

Entre d’un côté l’Allemagne qui pulvérise tous les records pour soutenir lâchement Israël en n’hésitant pas à jeter à la poubelle la liberté d’expression et de manifestation quand il s’agit de la Palestine car l’Allemagne devient tyrannique et répressive s’agissant de cette cause, et d’un autre côté la police de la pensée qui sévit dans les plus grands journaux du monde comme le New York Times, l’Occident démocratique et droit-de-l’hommiste ne cessera de nous épater avec ces «valeurs» qu’il sert à son aise selon la tête du client!

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