La réunion tripartite tuniso-algéro-libyenne, tenue hier, lundi 22 avril 2024, à Tunis, en présence du présidents tunisien Kaïs Saïed et de son homologue algérien Abdelmadjid Tebboune, et du président du Conseil de la présidence libyen Mohamed Younes El-Menfi, a scellé la mort de l’Union du Maghreb arabe (UMA), sinon politiquement, du moins symboliquement. Il reste à tirer toute les conséquences de cette nouvelle donne.
Latif Belhedi
C’est ce que pensent de nombreux analystes politiques, notamment en Tunisie et en Algérie, les deux pays ayant manœuvré diplomatiquement pour organiser cette réunion tripartite devant désormais se tenir tous les trois mois dans l’un des trois pays, et impulser une nouvelle dynamique d’intégration régionale. On peut toujours rêver, au moment où les échanges entre les trois pays, si l’on excepte le marché informel, demeurent très faibles et où le principal passage frontalier entre la Tunisie et la Libye, celui de Ras Jedir, est fermé, côté libyen, depuis plusieurs semaines.
Au même moment, l’UMA, en état de mort clinique depuis sa fondation il y a plus de trente ans, est quasiment abandonnée à son sort, et son secrétaire général, le Tunisien Taïeb Baccouche, en poste depuis mai 2016, ne demande qu’à rentrer au pays après avoir désespéré de la possibilité de sortir cet ensemble régional de sa léthargie, et ce n’est pas faute d’avoir essayé.
Une débauche de bonnes intentions
«A part les nombreuses interrogations sur les dessous et l’opportunité de la réunion tripartite tuniso-algéro-libyenne, censée poser les jalons futurs d’une plus grande concertation et coordination multisectorielle entre les trois pays voisins palliant ainsi la paralysie de l’UMA, se pose la question lancinante de la légitimité et la durabilité de cette initiative dont deux auteurs (Tunisie-Algérie) sont en fin de mandat et le troisième (Libye) est pratiquement un figurant car dépourvu de légitimité et de pouvoir», a écrit, à ce propos, l’ancien ambassadeur Elyes Kasri, qui ne fait pas mystère de sa perplexité et de son scepticisme. Et pour cause : il en a vu des initiatives diplomatiques, annoncées à cor et à cri et dans une débauche de bonnes intentions et de promesses de lendemains qui chantent, se terminer en queue de poisson. Parce qu’elles ont été mal pensées, mal préparées ou mal engagées. Ou parce qu’elles ont été mises en œuvre à contretemps ou dans une conjoncture régionale ou internationale peu favorable ou carrément contraignante.
Le diplomate relève, d’autre part, que «cette réunion semble avoir scellé le sort de l’Union du Maghreb arabe dont il faudrait logiquement prononcer la dissolution et acter la liquidation de ses institutions afin d’éviter toute redondance et le paiement de contributions et de salaires superflus surtout pour une Tunisie qui a de la peine à joindre les deux bouts.»
Tirer les conséquences
Au final, personne ne regrettera la disparition d’un ensemble régional mort-né, qui n’a jamais vraiment fonctionné depuis sa fondation en février 1989 et n’a eu que peu d’influence sur la politique de ses États membre (Libye, Tunisie, Algérie, Maroc et Mauritanie), achoppant à chaque fois sur les désaccords sur le Sahara occidental opposant Alger et Rabat, les deux principaux responsables de cet échec monumental.
Cependant, si cet ensemble régional est mort, la Tunisie doit avoir de la suite dans les idées en prenant acte de cette situation nouvelle, en coupant sa contribution financière au budget de l’UMA et en rappelant à Tunis M. Baccouche, son secrétaire général, dont le mandat s’est terminé depuis belle lurette et qui n’a plus rien à faire, lui et les autres fonctionnaires basés à Rabat, à part recevoir leurs salaires à la fin du mois et bailler aux corneilles.
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