En ce début du mois de Ramadan, qui connaît habituellement une forte hausse de la consommation et des prix, l’économie tunisienne continue de lutter contre les pressions inflationnistes, affectant considérablement le pouvoir d’achat des citoyens, d’autant plus que les prix des denrées alimentaires et des produits de première nécessité ont fortement grimpé au cours de l’année écoulée.
Latif Belhedi
L’indice des prix à la consommation a enregistré des taux proches de 8 % au cours du second semestre de 2024, selon l’Institut national de la statistique. Ces taux sont parmi les plus élevés que le pays ait connu depuis les années 1980, suscitant des inquiétudes chez les économistes et les citoyens.
Plusieurs analystes du marché font état de tendances alarmantes. Par exemple, le prix du pain, l’aliment de base de nombreux Tunisiens, a augmenté de près de 25% depuis le début de l’année dernière, les estimations actuelles évaluant le prix d’un pain à 1,5 TND, contre 1,2 TND un an auparavant. Cette augmentation met encore plus à rude épreuve des ménages déjà vulnérables.
Les citoyens ont du mal à joindre les deux bouts
La hausse des prix ne s’arrête pas là. Selon les commerçants, d’autres produits de première nécessité comme l’huile de cuisson et le sucre ont également connu des hausses substantielles, les prix de l’huile de cuisson ayant grimpé de 40% au cours des six derniers mois. De nombreuses familles sont désormais obligées de faire des choix difficiles en matière de dépenses.
Selon un économiste, l’inflation érode la qualité de vie des Tunisiens ordinaires et les familles ont du mal à faire face à la situation. Certaines d’entre elles remplacent même des produits chers par d’autres qui le sont moins mais qui sont également de moindre qualité.
Les institutions et organisations chargées de surveiller les tendances économiques ont exprimé leur inquiétude face au risque de dégradation de la situation sociale, alors que de plus en plus de citoyens ont du mal à gérer leur budget familial. Par exemple, l’Organisation de défense du consommateur (ODC) ne cesse d’insister pour que les prix des produits de première nécessité soient plus abordables pour les petites bourses, exhortant le gouvernement à prendre des mesures rapides pour remédier à la situation.
Le gouvernement a réagi en adoptant diverses mesures visant à stabiliser l’économie et à maîtriser les taux d’inflation. Il a ainsi maintenu et augmenté les subventions sur les principaux produits alimentaires pour alléger le fardeau financier des familles. Pourtant, ces mesures ont suscité des débats sur la durabilité de ce soutien, en particulier dans un contexte de déficit budgétaire persistant.
«Les subventions sont nécessaires mais pourraient devenir intenables à long terme si les prix ne se stabilisent pas», a déclaré une citoyenne. Et d’ajouter : «Nous avons besoin de solutions durables et à long terme plutôt que de solutions temporaires.»
Stabiliser l’économie et réduire le coût de la vie
Les analystes suggèrent que des réformes structurelles sont nécessaires pour s’attaquer aux causes sous-jacentes de l’inflation, notamment en améliorant l’efficacité agricole et en garantissant la stabilité des coûts de l’énergie. La Tunisie est particulièrement dépendante des importations pour de nombreux produits de base, et toute fluctuation sur le marché international peut avoir des répercussions importantes au niveau national.
Les pressions politiques s’intensifient également, car divers mouvements sociaux ont émergé, exigeant des réformes importantes pour stabiliser l’économie et réduire le coût de la vie. De nombreux commentateurs politiques pensent que cette agitation croissante est le signe d’un mécontentement plus large à l’égard de la gestion des politiques économiques par le gouvernement.
Les touristes ont commencé à revenir en Tunisie, après les difficiles années 2015-2021, ce qui laisse entrevoir un certain espoir de relance de l’économie. Mais à l’approche de la saison estivale, certains appellent à ce que les bénéfices du secteur touristique soient répartis équitablement entre la population, plutôt que concentrés parmi les riches.
Si l’optimisme quant à la reprise demeure, de nombreux Tunisiens ordinaires ont encore du mal à joindre les deux bouts, l’inflation continuant d’affecter leur vie quotidienne. La capacité du gouvernement à répondre efficacement à ces défis sera essentielle pour la stabilité du pays.
Seul le temps nous dira si les mesures proposées parviendront à apaiser les inquiétudes pressantes liées à l’inflation, mais il est clair que le peuple tunisien observe la situation de près, espérant que de véritables réformes conduiront à des améliorations tangibles.
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