Tunisie : l’administration électronique entre promesses et réalités   

Cela fait plus de vingt ans que l’on parle en Tunisie de la mise en place de l’administration électronique ou e-administration, mais, à l’exception de quelques services pas encore entièrement fonctionnels et enregistrant parfois des ratés dont se plaignent les usagers, cette administration électronique tarde encore à se mettre en place.

Par Imed Bahri

Comment expliquer ce retard qui coûte de l’argent à l’Etat et aux contribuables et qui laisse la porte ouverte à la petite corruption que pratiquent les agents publics aux dépens des usagers souvent obligés de payer pour jouir d’un droit ?

Il y a sans doute l’incompétence des services en charge de la mise en place des plateformes et des réseaux, mais aussi une certaine résistance de la part d’une bureaucratie qui se plait dans l’immobilisme.

Sinon, comment expliquer que le service de retrait en ligne du Bulletin n°3 mis en place depuis 2016 par le ministère de l’Intérieur pour les Tunisiens résidents à l’étranger avant d’être généralisé à partir de 2017 aux Tunisiens résidents au pays, ne soit pas vraiment – en tout cas pas toujours – fonctionnel, puisque les citoyens continuent de se plaindre jusqu’à aujourd’hui des difficultés qu’ils trouvent à bénéficier de ce service en ligne.

Le manque de suivi et d’entretien

Le problème réside, souvent, dans le manque de suivi des projets lancés en grande pompe et l’absence d’entretien et de mise à jour des systèmes mis en place, lesquels finissent par bugger et tomber carrément en panne.

C’est ce qui explique la perplexité des citoyens face aux annonces tambours battants de nouveaux services d’accès à distance aux documents administratifs. Cette perplexité a été affichée par beaucoup de citoyens à l’annonce, hier, mercredi 3 août 2022, du premier Mobile ID, ou identité numérique mobile, censée être «la pierre angulaire de la stratégie de numérisation des services administratifs en Tunisie», comme l’a déclaré la Première ministre Najla Bouden.

«Ce nouveau service permettra de raccourcir les délais et d’assurer la transparence des transactions électroniques», a assuré la Première ministre lors d’une conférence de presse au palais du gouvernement à la Kasbah (Tunis), en ajoutant que «la numérisation est une priorité, d’autant plus qu’elle est un pilier dans la réalisation du développement économique et social du pays».

Le Mobile ID ou identité numérique, qui s’inscrit dans le cadre des mesures urgentes et des réformes annoncées par le gouvernement, est la clé qui permettra l’accès aux portails et plateformes électroniques. Elle est présentée comme un moyen efficace de vérifier l’identité et la signature électroniques et de commander des copies de documents officiels sans se rendre dans les bureaux administratifs, a déclaré la Première ministre, l’objectif étant de jeter les bases d’un système numérique garantissant la transparence et la qualité des services, mais aussi de garantir l’inclusion numérique et de réduire le fossé numérique entre les différentes régions du pays et les différentes couches sociales.

Au-delà des effets d’annonces

Le gouvernement travaille actuellement en coordination avec toutes les parties prenantes pour mener à bien plusieurs projets numériques dans différents secteurs, a encore indiqué Mme Bouden, en précisant que la politique de numérisation en Tunisie repose sur un certain nombre d’objectifs et de mesures, principalement la révision des cadres juridiques et le renforcement de la gouvernance du secteur pour suivre le rythme du développement rapide des nouvelles technologies.

Cependant, et au-delà de des effets d’annonces qu’affectionnent les politiques, qui ont tendance à faire du surplace en donnant l’impression d’avancer, la question est de savoir si, à l’appui des systèmes mis en place, on a prévu de mettre à niveau l’infrastructure des réseaux à large bande à travers tout le pays, car il ne s’agit pas de faire profiter de ces services uniquement les habitants des villes hyper-connectés.

Il s’agit de savoir aussi si on a prévu un accompagnement adéquat de ces infrastructures, réseaux et systèmes en termes d’entretien et d’amélioration constante, car les technologies de communication ont une durée de vie très courte et deviennent rapidement obsolètes.

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