Après avoir forcé son tempérament querelleur et observé une certaine discrétion aux cours des trois semaines ayant précédé le référendum constitutionnel du 25 juillet 2022, le secrétaire général de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), Noureddine Taboubi, commence à sortir de sa tanière pour faire entendre ses rugissements habituels.
Par Imed Bahri
S’exprimant jeudi 4 août courant au siège de l’Union locale du travail à Sfax, en marge de la 75e célébration des événements du 5 août 1947, le dirigeant syndical a déclaré que les 94% des électeurs du référendum du 25 juillet, qui ont voté pour la nouvelle constitution, doivent assumer la responsabilité de leur choix en cas de détérioration de la situation économique et sociale.
Donner le temps au temps
«L’UGTT, qui a laissé le choix à ses membres de voter pour ou contre la nouvelle constitution, sera prête à intervenir et à défendre les intérêts des citoyens, notamment en ce qui concerne les questions sociales et les droits et la liberté d’expression», a averti M. Taboubi, qui ne fait pas mystère de son opposition à la nouvelle constitution proposée par le président de la république Kaïs Saïed, et surtout au processus unilatéral avec lequel ce dernier a élaboré et fait voter son projet, sans véritable concertation avec les partis politiques et la société civile.
En fait, M. Taboubi savait qu’une grande partie de sa base allait voter oui au référendum et soutenait M. Saïed, et il a préféré éviter de se trouver en porte-à-faux par rapport aux membres de la centrale syndicale, et laisser le temps au temps, étant convaincu que le président de la république allait être rapidement rattrapé par les difficultés économiques, financières et sociales auxquelles il prouve, jour après jour, qu’il n’a aucune réponse.
«Le syndicat est ouvert au dialogue», a cependant ajouté M. Taboubi, en affirmant que «les grèves ne sont pas un objectif mais un moyen, surtout en l’absence de solutions aux difficultés et aux tensions sociales dans le pays», menaçant ainsi, en des termes à peine voilés, le pouvoir exécutif, incarné par le président de la république qui a accaparé tous les pouvoirs conformément à la nouvelle constitution, d’une reprise en force des revendications sociales, alors que les prix continue leur flambée, que l’inflation galope, que le pouvoir d’achat des salariés s’effrite et que le gouvernement, complètement sourd aux doléances des acteurs politiques, économiques et sociaux, poursuit sa fuite en avant dans une sorte d’autisme suicidaire, sachant que le nouveau prêt sollicité auprès du Fonds monétaire international (FMI) tarde à être accordé.
Une rentrée particulièrement chaude
Est-ce à dire que la machine revendicative de la centrale syndicale est en train de s’échauffer et que la rentrée, en septembre et octobre, c’est-à-dire à quelques semaines des législatives anticipées du 17 décembre, va être particulièrement chaude ?
On peut sérieusement le penser d’autant que le président Saïed poursuit son cavalier seul et que les lignes politiques se raidissent du côté du pouvoir, qui se sent renforcé par les résultats d’un référendum transformé en plébiscite pour le chef de l’Etat, et de celui de l’opposition, qui se sent flouée, marginalisée voire méprisée. Et croit pouvoir se rassembler pour rebondir avant les législatives.
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