Donald Trump a enfourché son cheval de bataille en reprenant les thèmes populistes ravageurs de sa première campagne présidentielle pour faire barrage à son rival Joe Biden. Il a appelé les électeurs à faire le choix entre le «rêve américain» qu’il affirme incarner, et le «socialisme destructeur» que propose, selon lui, le candidat démocrate.
Par Hassen Zenati
Entourés d’un impressionnant cordon de police, mettant à distance confortable quelques centaines de protestataires, les jardins de la Maison Blanche ont été inhabituellement transformés en arène politique, hérissée de drapeaux. C’est sur sa pelouse soigneusement taillée, entouré de son «clan», devant 1.500 invités triés sur le volet, que Donald Trump a choisi de prendre date avec les électeurs en acceptant «avec un cœur plein de reconnaissance et un optimisme sans limites», a-t-il dit, sa nomination par le Parti Républicain pour briguer un second mandat présidentiel.
L’«enchanteur du rêve américain» contre le «fossoyeur de la grandeur de l’Amérique»
Dans une ambiance survoltée, face à des fans chauffés à blanc, scandant : «Quatre ans encore», il a retrouvé ses accents d’animateur de téléréalité pour fustiger son rival Joe Biden, qu’il s’est employé à démolir systématiquement comme un fossoyeur de «la grandeur de l’Amérique». ll s’est présenté de nouveau comme l’homme de «l’ordre public» et «l’enchanteur du rêve américain» face à un candidat démocrate, qui se prépare, selon lui, à piétiner toutes ses réalisations.
«C’est l’élection la plus importante de l’histoire de notre pays. Tout ce que nous avons réalisé est dorénavant en danger. Si le Parti Démocrate veut se ranger du côté des anarchistes, des agitateurs, des émeutiers, des pilleurs et des brûleurs de drapeaux, c’est à eux de décider, mais moi, en tant que président, je n’y participerai pas. Personne ne sera en sécurité dans l’Amérique de Biden. Si la gauche l’emporte, elle va détruire les banlieues résidentielles, car Joe Biden est le cheval de Troie du socialisme», a déclaré le milliardaire républicain qui fait face depuis mars à une triple crise sanitaire, économique, sociale, émaillée de tensions raciales.
Raillant une expression favorite de l’ancien vice-président de Barack Obama, Donald Trump a martelé : «Joe Biden n’est pas le sauveur de l’âme de l’Amérique, il est le destructeur des emplois de l’Amérique. Si on lui en offre l’occasion, il sera le fossoyeur de la grandeur de l’Amérique». («Joe Biden is not the savior of America’s soul. He is the destroyer of America’s jobs, and if given the chance, he will be the destroyer of American greatness»).
Donald Trump lisait un discours soigneusement préparé, sans jamais le quitter des yeux, rompant ainsi avec des improvisations hasardeuses qui lui avaient valu plus que des désagréments.
Les émeutes anti-raciales s’invitent dans la campagne présidentielle
Depuis trois mois, les Etats-Unis sont secoués d’émeutes anti-raciales, réclamant justice pour George Floyd, mort étouffé sous le genou d’un policier blanc, le 25 mai 2020, à Minneapolis (Minnesota). «Pas de justice, pas de paix», scandent les manifestants, superbement ignorés par les autorités. Certains se sont donné rendez-vous devant la Maison Blanche en ce jour d’investiture de Donald Trump pour réclamer son départ. Quelques jours auparavant, une autre bavure policière semblable est survenue au Wisconsin, ravivant les blessures encore béantes de Minneapolis.
Le président sortant qui fait face à un choc économique historique, avec une chute d’un tiers du PIB et un nombre de chômeurs sans cesse croissant (1 million de chômeurs de plus la semaine dernière), a promis de «reconstruire la plus forte économie de l’histoire» et accusé Joe Biden de vouloir «abolir la production américaine de pétrole, de charbon, jetant à terre l’économie de Pennsylvanie, Ohio, Texas, Dakota du Nord, détruisant ces Etats».
Violemment opposé à toute mesure en faveur de l’écologie, il a repris les mêmes thèmes gagnants qui lui avaient permis de battre Hillary Clinton en 2016. Il s’est félicité du bilan de son premier mandat, qu’il dit avoir accompli contre l’avis des élites de Washington, ainsi que de la renégociation complète des accords de libre-échange internationaux, dont l’Accord Canada–États-Unis–Mexique. «Ensemble, nous avons mis fin à la domination de la classe politique en faillite, a-t-il martelé. Elle est désespérée de retrouver son pouvoir par tous les moyens. Elle est en colère contre moi, parce qu’au lieu de la mettre en premier, j’ai mis l’Amérique en premier», s’est-il exclamé.
«Terrassé» par la pandémie de la Covid-19, il espère être sauvé par la découverte d’un vaccin
Violemment critiqué pour sa gestion de la pandémie du coronavirus, qui a fait 180.000 morts, Donald Trump s’est accroché à l’espoir d’obtenir un vaccin d’ici la fin de l’année, e chargé violemment son rival pour incompétence. «Si nous avions écouté Joe Biden, des centaines de milliers d’autres Américains seraient morts», a-t-il asséné à son auditoire, en lui assurant que le programme de son adversaire serait une catastrophe économique pour le pays. «Il augmenterait, selon lui, les surdoses, les dépressions, l’alcoolisme, le taux de suicide et les crises cardiaques. Le plan de Joe Biden n’est pas une solution au virus, mais plutôt une capitulation. Le programme de Joe Biden est fabriqué en Chine. Mon programme est fabriqué aux Etats-Unis. Nous vaincrons le virus, mettrons fin à la pandémie et émergerons plus forts que jamais», a encore assuré sans se démonter le 45e président américain, très critiqué pour ses atermoiements face à la pandémie dont il a longtemps promis qu’elle disparaîtrait par «miracle». Et le miracle n’eut pas lieu…
Cela ne l’empêche pas de rester sur la position immuable selon laquelle, comme il n’a cessé de le répéter, il n’a commis aucune erreur dans la gestion de la pandémie.
Biden promet de rompre avec l’isolationnisme de Trump et relancer l’économie
L’ancien vice-président de Barack Obama, qui a choisi une femme de couleur sur son ticket présidentiel, une battante, Kamala Harris, se présente comme l’anti-Trump. Il se propose de détricoter le programme du président sortant, en donnant la priorité à la crise sanitaire et en mettant en œuvre un plan de relance économique verdi d’écologie, de 700 milliards de dollars.
Baptisé Build Back Better (Reconstruire mieux), il prévoit de retrouver les emplois effacés par la crise et d’en créer cinq millions de plus grâce à des investissements publics massifs sur quatre ans: 400 milliards de dollars seront alloués à la modernisation des infrastructures et 300 autres milliards iront à la recherche et développement (R&D), ainsi que dans les innovations technologiques. En politique extérieure, il veut rompre avec l’isolationnisme de Donald Trump qui a «rabaissé l’Amérique», et restaurer le leadership américain.
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