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La crise du Golfe secoue… la Tunisie

Le président Caïd Essebsi avec le roi d’Arabie saoudite et les émirs du Qatar et du Bahreïn.

Les dirigeants politiques tunisiens ont exprimé des positions divergentes vis-à-vis de la crise qui divise les pays du Golfe.

Par Abderrazek Krimi

La tension, qui règne depuis plusieurs semaines, dans la région du Golfe, entre des pays arabes supposés être «partenaires» dans le cadre du Conseil de coopération du Golfe (CCG), n’a pas manqué d’avoir des échos jusqu’en Tunisie.

Trois pays arabes, à savoir l’Egypte, les Emirats arabes unies et le Bahreïn, se sont empressés de s’aligner sur la décision de l’Arabie Saoudite, annoncée officiellement hier, lundi 5 juin 2017, de rompre ses relations diplomatiques avec le Qatar et de fermer ses frontières aériennes, terrestres et maritimes avec ce petit pays voisin.

La Tunisie appelle à la raison et au dialogue

Optant pour la prudence, la position officielle de la Tunisie, exprimée par le ministre des Affaires étrangères Khemaies Jhinaoui, s’est voulue délibérément vague et ne prenant position pour aucune des parties. Tout en suivant de près l’évolution de la situation au Golfe, la Tunisie, fidèle à ses traditions en matière de diplomatie, a toujours cherché à favoriser les relations de coopération entre les pays arabes, seul moyen pour éviter l’émergence de problèmes, a expliqué M. Jhinaoui, tout réitérant l’appel de la Tunisie à la raison et à favoriser le dialogue entre les pays frères.

Caïd Essebsi reçoit Cheikha Moza, la mère de l'émir du Qatar.

Caïd Essebsi reçoit Cheikha Moza, la mère de l’émir du Qatar, le 14 mars 2017.

Au niveau de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), les points de vue des députés ont divergé et ont été plus tranchants que la position officielle. Mongi Rahoui a indiqué que le Front populaire (FP) considère que l’Etat du Qatar est l’un des pays qui soutiennent et financent le terrorisme, ajoutant que le Qatar sert un agenda visant à déstabiliser les pays arabes et les démembrer, ce dont témoigne son rôle en Libye et en Syrie. Par conséquent, le député a appelé le gouvernement à prendre la position qui s’impose et qui prend en considération les intérêts de la Tunisie et de son peuple.

Le député du bloc Al Horra, Abderraouf Cherif, a appelé, de son côté, l’Etat tunisien à ne pas s’ingérer dans un conflit interne alimenté par des luttes pour la domination de la région du Golfe entre les monarchies pétrolières elles-mêmes d’une part et entre ces monarchies et l’Iran de l’autre. Le député a insisté sur la nécessité, pour les missions diplomatiques tunisiennes dans les pays de la région, de faire le nécessaire dans le cadre de la protection des ressortissants tunisiens installés dans ces pays.

Ennahdha et Marzouki: Les «Qataris» de service 

Le parti islamiste Ennahdha et l’ex-président provisoire de la république et actuel président du parti Harak Tounes Al Irada, Moncef Marzouki, ont exprimé une position totalement différente. Réputés pour leurs étroites relations avec l’émirat du Qatar, qui est leur principal soutien (notamment financier) à l’étranger, ils ont cru devoir faire part de leur soutien à ce «proto Etat» érigé sur un grand gisement de pétrole et de gaz.

Le Conseil de la Choura du parti islamiste, qui a pignon sur rue à Doha et qui est peu apprécié (c’est un euphémisme) à Riyad, Abou Dhabi, Manama et Le Caire, a, dans un communiqué publié hier, exprimé sa préoccupation face à la détérioration des relations entre les «frères arabes», indiquant que cette crise «ne sert pas les intérêts de la région et des peuples arabes» et appelant les pays de la région d’«opter pour le dialogue comme moyen de gérer le conflit».

L’intérêt de Rached Ghannouchi et de ses troupes est, on l’a compris, de sortir rapidement le Qatar de son isolement actuel, conséquence de son interventionnisme tapageur et parfois malfaisant dans les affaires du monde arabe.

Marzouki est, on le sait, un grand supporteur du Qatar en Tunisie (Photomontage). 

Pour Moncef Marzouki, qui est une groupie de l’émir du Qatar, auquel il pardonne tout, même ses abus en matière des droits de l’homme et son soutien aux groupes terroristes, a, quant à lui, exprimé une position soutenant plus clairement le Qatar, principal bailleur de fonds de son parti.

Plus royaliste que l’émir Al-Thani et s’érigeant en avocat de l’émirat, il a, dans une déclaration postée sur sa page Facebook, considéré que la décision de rupture des relations diplomatiques prise par certains pays arabes est «une tentative de chantage et de pression exercée sur les Qataris».

Il est à noter, qu’outre les quatre pays ayant annoncé, dans la matinée d’hier, la rupture de leurs relations diplomatiques avec le Qatar, d’autre pays arabes les ont rejoints dans l’après-midi. Il s’agit du gouvernement intérimaire libyen basé à Tobrouk, du Yémen de Abd Rabou Mansour Hadi et même d’un pays non-arabe, les Îles Maldives, qui a informé l’ambassadeur du Qatar de sa décision de rompre les relations diplomatiques.

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