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Baccalauréat et défaillance des transports : Lettre ouverte au ministre de l’Education

Dans cette lettre, l’auteur, homme de droit et de cœur, appelle le ministre de l’Education à trouver une solution aux trois jeunes filles qui n’avaient pas pu se présenter à la première épreuve du baccalauréat à cause d’une défaillance du transport.

Par Maître Taoufik Ouanes *

Monsieur le ministre et cher ‘‘Si’’ Hatem,

Je ne voulais pas vous adresser une lettre publique, mais le sujet en question est devenu public et vous l’avez commenté sur les média. C’est pour cela que, malgré notre relation personnelle de respect mutuel, je vous l’adresse «ouverte» car je vais y faire appel à des notions qui intéressent l’opinion publique et les règles dont l’Etat devrait tenir compte.

Il s’agit des trois jeunes filles qui n’avaient pas pu se présenter à la première épreuve du baccalauréat. Je ne vous cache pas que j’étais troublé par votre position intransigeante sur ce point lors de votre intervention dans l’émission ‘‘Midi Show’’ sur Mosaïque FM, hier, jeudi 7 juin 2018.

À ce propos je voudrais rappeler les points suivants :

1- Ces jeunes filles ne se sont pas intentionnellement mises en retard à l’heure de cette épreuve. La faute incombait au manque de moyens de transport et dès lors elles n’ont pas failli à leur obligation. Ce retard ne leur est donc pas imputable. Comme vous le savez, le transport est un domaine où l’Etat a des responsabilités spéciales et y assure un service public. C’est le cas dans plusieurs pays, y compris la Suisse que vous connaissez bien. Pour y avoir représenté la Tunisie à Genève auprès de l’Onu.

En plus, et sous réserve de vérification, la société de transport responsable de ce retard serait une société publique, ce qui aggraverait encore plus la responsabilité de l’Etat dans ce cas.

2- Vous n’êtes pas sans savoir les sacrifices que ces filles et leurs familles font pour faire des études et atteindre le niveau du baccalauréat. Particulièrement dans les contrées défavorisées en Tunisie comme celle d’où viennent ces élèves.

Vous n’êtes pas également sans imaginer le désarroi et le malheur vécu par ces élèves devant cette défaillance des transports, le jour même du début de l’examen du Bac qui reste une épreuve marquante dans l’esprit et la psychologie des jeunes.

Ce désarroi s’est actuellement transformé en tristesse et en désespoir car ils/elles savent qu’avec un zéro dans une matière, réussir le Bac devient une mission quasi impossible, même si vous avez affirmé le contraire lors de l’émission à la radio.

3- Je voudrais aussi faire appel au ministre et au juriste que vous êtes. En effet, dans une période où il est de plus en plus impératif que le peuple tunisien ait besoin de retrouver la confiance dans l’Etat et réciproquement, et où le sentiment que l’Etat doit être perçu comme compréhensif des soucis du peuple et soucieux de l’intérêt général, l’intransigeance n’est certainement pas le bon message, surtout quand il s’agit de situations de ce genre. En fait, et quelque soient les critères à retenir – et là je fais appel à votre qualité de juriste – les notions de «force majeure» ou le principe de droit administratif qui consiste à ce que l’administré ne paye pas les erreurs ou les défaillances de l’administration trouvent totalement leur application. Aussi, je vous prie de ne pas mal-placer l’idée du «Prestige de l’Etat» dans ce cas qui relève plutôt de l’humanisme et des droits de l’Homme, domaine que vous connaissez bien pour y avoir exercé des responsabilités nationales.

Je ne suis pas du tout convaincu de votre argument que rectifier cette triste situation relèverait de l’impossibilité logistique et de l’hérésie juridique. Il s’agit tout simplement d’organiser une épreuve unique, très limitée dans le nombre de candidats, et dans une seule et même localité.

Personne ne vous contestera cette compétence de faire que le règlement et les normes juridiques soient appliquées avec humanité.

Comme vous le savez aussi bien que moi, le respect du droit ne se fait pas par la rigidité, mais le plus souvent par son adéquation avec les dimensions sociales et humaines.

Finalement, je suis persuadé que vous trouverez le moyen utile et rapide pour redresser ce tort dont ont été victimes ces quelques jeunes.

Respectueusement,

* Avocat.

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