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Profil : Zouhair Dhaouadi, nouvellement nommé conseiller du président de la république par intérim Mohamed Ennaceur

Zouhaier Dhaouadi en 2001 à Paris avec l’écharpe du RCD.

C’est l’histoire très édifiante d’un activiste de l’extrême gauche maoïste devenu thuriféraire du régime dictatorial de Ben Ali finit par entrer, à 64 ans, au Palais de Carthage, huit ans après la révolution de la dignité. Zouhair Dhaouadi pour ne pas le nommer.

Par Abdellatif Ben Salem

Nous avons appris par le Journal officiel de la république tunisienne N’150 de 2019, daté du 30 août, que le président de république par intérim Mohamed Ennaceur a signé, cinq jours après son entrée en fonction au palais de Carthage, une ordonnance portant sur la nomination de Zouhair Dhaouadi (64 ans) en tant que conseiller du président.


Zouhair Dhaouadi à la célébration du 14e anniversaire du « Changement » à Paris, en 2001 (au milieu Ali Chaouch, ancien secrétaire général du RCD).

Ancien militant dans les années soixante-dix de l’organisation ultra gauchiste (marxiste-maoiste) Esho’la, ancêtre de l’une des branches de la mouvance Watad, Zouhair Dhaoudi dût prendre la fuite après les événements du Jeudi noir, le 26 janvier 1978, pour se réfugier en France où il travailla comme commis dans la librairie parisienne du Quartier Latin, Le Tiers-Mythe, appartenant à Abou-l-Hassan Bani Sadr, et au Dr Salamatian ainsi qu’à certains membres de l’opposition iranienne en exil.

«La conception de l’Etat : de Hegel à Ben Ali»

À la suite d’un retour négocié avec les autorités en 1985, il a dû se morfondre deux ans durant, avant qu’éclate le coup d’Etat du 7 novembre 1987. Pour Dhaouadi la déposition du président Habib Bourguiba était du pain béni et il n’hésita a adhérer au «golpe» proposant ses services au général putschiste, Zine El Abidine Ben Ali.

Il fut versé dans un premier temps au sein des structures du parti unique nouvellement rebaptisé Rassemblement constitutionnel démocratiue (RCD), avec attribution de fonction et de bureau au siège central de l’avenue 9-Avril, à Tunis.

Du gauchiste qui ne jurait auparavant que par Lénine, Staline et Mao, Dhaouadi a subi une métamorphose éclair en devenant l’un des apparatchiks les plus dévoués au régime et le plus verbeux des flagorneurs de Ben Ali, pissant un nombre incalculable de copies de propagande aussi ineptes et indigestes les unes que les autres. On se souviendra longtemps encore d’un de ses papiers intitulé «La conception de l’Etat : de Hegel à Ben Ali» où il se tortillait les méninges pour convaincre – les «simples d’esprit» que nous sommes – que le régime du 7-Novembre a accompli la conception hégélienne de l’Etat (pas moins !)

En récompense de ses bons et loyaux services, Ben Ali le nomme gouverneur de Nabeul, fonction de laquelle il ne tardera pas à être éjecté pour des raisons demeurées obscures. Suit un long blanc dans sa trajectoire RCDdiste au bout duquel il se voit attribuer un poste de consul en Allemagne, ensuite celui d’ambassadeur au Pakistan qu’il dut quitter quelques années avant la révolution dans des conditions rocambolesques.

Zouhair Dhaouadi en 2001 à Paris célébrant avec la communauté des RCDistes en France le 14e anniversaire du « glorieux changement ».

À l’avènement de la révolution tunisienne du 17 décembre-14 janvier 2011, loin de faire son mea culpa et adhérer aux nouvelles réalités du pays en participant à l’édification d’un régime démocratique basé sur les droits et les libertés, il organisa avec ses comparses de toujours, Moncef Gouja et Hassouna Mosbahi, la première riposte contre-révolutionnaire en éditant un site nostalgique de l’ancienne dictature où la menace contre les Tunisien-n-es, le disputait aux anathèmes jetés contre tous ceux qui bataillaient, malgré les dangers de la déferlante islamiste, pour sortir le pays des ornières de l’absolutisme et asseoir les bases d’un Etat démocratique et moderne.

Le conseiller de l’ombre de Mohamed Ennaceur depuis 5 ans

Zouhair Dhaouadi occupait depuis presque 5 ans le poste de conseiller de Mohamed Ennaceur, président de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) et rares sont ceux qui le savaient tant sa nomination était restée secrète.

Depuis sa reconduction dans ses fonctions de ministre des Affaires sociales le 27 février 2011 par feu Béji Caid Essebsi Mohammed Ennaceur a connu une ascension fulgurante : il est élu en 2014 président de l’Assemblée, en juillet 2019, il accède, grâce aux mécanismes de passation de pouvoir mis en place par la nouvelle Constitution de la deuxième république, à la magistrature suprême à la suite du décès du l’ancien président Caid Essebsi.

Cet aboutissement enviable et prestigieux à quatre vingt ans passés, pour un homme au crépuscule de sa vie, réalisé grâce à l’énergie de la jeunesse de la Tunisie doit l’inciter à plus de prudence dans ce registre, afin d’éviter d’offenser les élites de ce pays et froisser ses forces vives.

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