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Comment expliquer la «performance» de la Bourse de Tunis, en dépit de la pandémie du Covid -19 ?

Les analystes financiers sont unanimes pour relever que la Bourse de Tunis a été moyennement impactée par la crise du virus du corona (Covid-19), et ce, contrairement à la plupart des places financières mondiales qui se sont effondrées l’une après l’autre. Certaines ont même fermé leurs portes, ce qui n’est pas le cas de la Bourse de Tunis.

Par Khemaies Krimi

À ce propos, le président de la Bourse de Tunis, Mourad Ben Chaâbane a indiqué, sur les ondes de la radio privée Express fm, «qu’il est encore tôt pour réfléchir à une fermeture de la Bourse (…) d’autant plus que le fléchissement connu par la Bourse de Tunis n’est pas aussi catastrophique qu’il en a l’air notamment en comparaison avec d’autres pays».

Les raisons d’une performance

Interpellé sur «cette performance», lors d’un récent débat organisé par le magazine ‘‘L’Economiste Maghrébin’’, Bilel Sahnoun, directeur général de la Bourse des valeurs mobilières de Tunis (BVMT), a reconnu que, comparativement aux autres places internationales, «la place de Tunis a été réellement épargnée par la pandémie». Pour expliquer «cet exploit», il a mis en avant deux facteurs majeurs.

La première raison qui explique que la Bourse de Tunis a été épargnée par la crise du Covid-19 réside dans le fait que les secteurs impactés par la pandémie ne sont pas cotées à la Bourse de Tunis, s’agissant du tourisme, l’artisanat, la culture, les industries exportatrices, les industries importatrices de rente (franchises, sociétés de commerce international…), l’industrie automobile (IME), le transport aérien et maritime.

Il y a certes le transporteur public Tunisair qui est coté en bourse mais au regard de la grave crise financière dans laquelle ce groupe se débat, depuis des années, ses actions ont été rarement demandées et n’ont jamais valu grand-chose.

La deuxième raison serait que la Bourse de Tunis n’a pas connu, par l’effet de cette crise, un retrait massif des investisseurs étrangers comme cela a été le cas avec les places financières internationales.

Il a rappelé qu’en Tunisie la capitalisation des étrangers est de l’ordre de 24% dont 22% sont stables et stratégiques et ne bougent pas. C’est le cas de groupes français comme Alcatel, BNP Paris, la Société Générale. Ainsi seuls 2% sont volatils et flottants. «C’est pour cette raison qu’il n’y pas eu de crash boursier», a-t-il-dit.

Ce sont de mauvaises raisons pour les analystes

Abstraction faite des justifications des responsables de la Bourse de Tunis, les analystes financiers dont nombre d’intermédiaires en bourse pensent que la Bourse de Tunis est restée certes à l’abri de la crise, mais pour de mauvaises raisons. Ces dernières sont essentiellement le faible degré d’ouverture du marché aux investisseurs étrangers la très petite taille du marché et sa modique capitalisation.

Ce sont d’ailleurs ces mêmes contre-performances boursières qui ont permis à la BVMT de sortir indemne de la crise financière mondiale de 2007-2008 laquelle a été marquée par une raréfaction du crédit aux entreprises générée par une pénurie de liquidités et par une insolvabilité tant au niveau des banques que des États.

Pour l’histoire, la Bourse de Tunis a terminé en beauté l’année 2008, celle de la crise financière mondiale, avec une progression de 10,7% du Tunindex. Une réelle performance enregistrée pendant une année où la majorité des bourses mondiales ont connu de fortes régressions. La machine de propagande de l’ancien dictateur Ben Ali a saisi cette opportunité pour en faire une grande publicité à l’intérieur du pays.

La solution réside dans l’ouverture de la BVMT aux investisseurs étrangers
Pour mettre fin à ces fausses performances, les analystes financiers s’accordent à penser que la Bourse de Tunis gagnerait à s’ouvrir davantage aux investisseurs étrangers. «Car, à rester trop protégée, elle risque de rater la reprise attendue après la maîtrise du Cofid-19», estiment-ils.

C’est ce à quoi semble travailler Bilel Sahnoun. Toujours optimiste, il perçoit dans cette crise du Cofid-19 et du retrait massif des investisseurs étrangers des places internationales une opportunité pour en attirer une partie. D’après lui, les investisseurs qui se sont retirés des bourses étrangères pour investir dans des valeurs plus sûres comme l’or vont un jour revenir à la Bourse et c’est à ce moment-là que la Bourse de Tunis se doit de tout faire «pour les attirer et les encourager à investir en portefeuilles en Tunisie».

À cette fin, il compte sur la réforme des entreprises publiques, objet d’un projet de loi soumis actuellement à l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) depuis le mois de décembre 2019. «Ce projet de loi inscrit, dit-il, le marché financier comme un point de passage pour favoriser la transparence, l’actionnariat salarié et la diversification du marché financier, autant de facteurs qui peuvent enrichir l’offre de la BVMT et intéresser d’éventuels investisseurs étrangers». Dont acte.

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