Accueil » Ne tirez pas sur le soldat Mohamed Abbou !

Ne tirez pas sur le soldat Mohamed Abbou !

Écœuré par le blocage de l’horizon politique, encombré par les forces islamo-affairistes, et la mise en échec de ses tentatives pour mettre la lutte contre la corruption au cœur de toute réforme en Tunisie, Mohamed Abbou, président du Courant démocrate (Attayar) s’est résigné à jeter l’éponge en annonçant l’abandon de toute activité politique.

Par Imed Bahri

Les positions fermes de l’ex-ministre de la Fonction publique, de la Gouvernance et de la lutte contre la corruption, sur la nécessité de réformer la gouvernance publique, sans la quelle aucune amélioration ne saurait être apportée à la vie des Tunisiens, sa mobilisation contre le fléau de la corruption, qui s’est aggravé après la chute de la dictature de Ben Ali, en 2011, et ses critiques adressées aux partis aux financements occultes lui ont valu des attaques permanentes, notamment dans les réseaux sociaux et certains médias monnayés par la nomenklatura politico-affairiste, attaques colportant, outre d’honteuses intox, des atteintes à sa personne et à celle de son épouse, la députée Attayar Sami Abbou.

Une machine de désinformation massive mise en place par les partis Ennahdha et Qalb Tounes

Ces attaques émanent de personnes de bonne foi, travaillées au corps et manipulées par une machine de désinformation massive mise en place par les principaux adversaires de M. Abbou, les partis Ennahdha et Qalb Tounes, dont les dirigeants craignent sa détermination à aller jusqu’au bout dans la dénonciation de la proximité de ces partis avec l’argent sale de la corruption. C’est d’ailleurs cette crainte qui les a poussés à maintenir la pression sur le gouvernement Elyes Fakhfakh jusqu’à le faire tomber de la manière que l’on sait.

Elles émanent aussi de ses adversaires politiques qui ne supportent pas sa rigidité morale, son sens aigu du droit et son refus de toute concession sur le front de la lutte contre la mauvaise gouvernance et la corruption. L’homme est, il est, inflexible, peu malléable voire rigide au goût de la nouvelle classe politique tunisienne, plus soucieuse de ses intérêts sectaires que de l’intérêt général de la nation.

Au-delà de sa rigidité, qui ne le rend pas particulièrement sympathique au regard des copains et des coquins qui profitent aujourd’hui de la quasi faillite du pays, Mohamed Abbou a eu l’ingénuité de croire qu’il est en mesure de s’attaquer, avec quelques dirigeants de son parti, tout aussi ingénus que lui, à la citadelle islamo-affairiste qui a pris possession du pays au lendemain de la chute de Ben Ali et qui n’est pas prête à céder ses privilèges, quitte à déstabiliser le pays, à affaiblir l’Etat, à dévoyer ses institutions et à faire désespérer les Tunisiens.

L’écœurement de M. Abbou devrait être celui de tout citoyen qui rêve d’un pays assaini et débarrassé de ses démons

Fort du soutien de l’ex-chef de gouvernement Elyès Fakhfakh et, à un degré moindre, du président de la république Kaïs Saïed, Mohamed Abbou a surestimé les moyens dont il dispose pour faire bouger les lignes. Ses premiers faits et gestes (notamment l’envoi de plusieurs dossiers de corruption à la justice) n’ont pas tardé à braquer la nomenklatura islamo-affairiste contre lui et celle-ci a fini par avoir sa peau, par reprendre le pouvoir, après une parenthèse de six mois, et par le marginaliser lui et ses semblables en les renvoyant dans une improbable opposition parlementaire, aussi inutile qu’inefficace.

L’une des raisons de l’écœurement de Mohamed Abbou, qui s’est résigné à abandonner la partie, c’est le constat de la déliquescence avancée de certaines institutions républicaines, sur lesquelles il croyait pouvoir compter dans son combat, et qui se sont révélées gangrenées par la corruption et le clientélisme politique, et parmi ses institutions, on citera la justice : une véritable boîte noire dont l’indépendance présumée s’est révélée être un grand mensonge.

Alors, de grâce, ne tirez pas sur Mohamed Abbou, car son écœurement et son désespoir devraient être ceux de tout citoyen qui rêve d’un pays assaini, débarrassé de ses démons et qui se soucie de l’avenir de ses enfants.

Donnez votre avis

Votre adresse email ne sera pas publique.

error: Contenu protégé !!