Accueil » La Tunisie peut-elle abandonner la séance unique ?

La Tunisie peut-elle abandonner la séance unique ?

Bureau-ferme

Comme chaque année, à pareille période, le débat sur la séance unique s’impose aux citoyens et aux hommes politiques en Tunisie. Mais il n’avance guère…

Par Skander Farza

Que dire qui n’a déjà été dit sur la séance unique d’été (juillet-août)? Faut-il oui ou non la conserver et est-elle vraiment nuisible à l’économie du pays? Le débat est loin d’être tranché entre  «abolitionnistes» et «conservateurs», «réactionnaires» et «progressistes», «libéraux» et «populistes», comme se désignent les protagonistes de ce débat entre eux dans les forums de discussion, et notamment sur internet.

Rentabilité proche de zéro

En surface, on retrouve les principaux arguments en faveur de la séance unique. Selon certains, elle permettrait de faire des économies d’énergie, notamment sur la climatisation. On retrouve aussi les mêmes griefs : la séance unique serait néfaste pour l’économie, car elle placerait la Tunisie dans un état de léthargie durant la période estivale.

Reste qu’en l’absence d’études sérieuses sur le sujet, cet argument n’est pas étayé par des données statistiques fiables. Il se base, surtout, sur les observations et les vécus des citoyens qui se trouvent confrontés aux lenteurs de l’administration, des services publics et de la machine économique. Comme le décrit cet internaute: «Restaurants fermés à partir de 13h00. Moyens de transport rarissime au-delà de 14h00. Etablissements administratifs fermés durant toute l’après midi posant un sérieux problème pour les délais de certaines transactions et autres tâches».

Qui faut-il pointer du doigt? Là aussi, les points de vue divergent. Certains s’en prennent directement aux fonctionnaires en se basant sur une enquête réalisée l’année dernière par l’Association tunisienne de lutte anti-corruption (ATLC), qui pointe les fonctionnaires tire-au-flanc, la faible rentabilité ou encore l’absentéisme chronique. Ce qui fait dire à cet entrepreneur, qui déplore le manque de productivité de ses employés, notamment durant la saison estivale: «A force de glander, la Tunisie restera éternellement dans le tiers-monde.»

Comment en sortir ?

Pour sortir du manichéisme du «pour» et du «contre» la séance unique, certains osent faire de nouvelles propositions à leurs yeux viables. C’est le cas d’Ennahdha, qui a souhaité, il y a trois ans, quand ce parti dominait la coalition gouvernementale, étendre ce régime à toute l’année. Cette proposition, qui avait fait beaucoup de bruit à l’Assemblée autant que dans les médias et sur la toile, n’a cependant pas été retenue, même si elle a trouvé quelques défenseurs, notamment parmi les femmes, soucieuses de resserrer les liens familiaux.

Les adversaires de la séance unique ne manquent pas d’arguments pour appuyer leur position. Mais le problème est ailleurs: car il serait difficile de rompre avec un régime de travail auquel sont attachés beaucoup de Tunisiens, par habitude, par commodité ou par opportunisme. Quant à la productivité, la rentabilité et la qualité, il faudra repasser… Ceci sans compter les grèves, sit-in et autres occupations d’usines, qui viennent ralentir encore davantage la machine de production. La devise de nombreux Tunisiens n’est-elle pas «travailler moins et gagner plus»?

Si on ne peut supprimer définitivement ce système, devenu intouchable, alors que faire? Certains appellent à prolonger la séance unique d’une heure ou deux, à réduire sa durée dans l’année (un mois au lieu de deux) ou à prévoir une séance nocturne, comme dans plusieurs pays chauds, comme l’Espagne, l’Italie ou l’Arabie saoudite. Ainsi, on épargne aux travailleurs les conséquences de la canicule pendant la journée, sans pour autant réduire le temps de travail.

Donnez votre avis

Votre adresse email ne sera pas publique.