La Tunisie serait bien inspirée de promouvoir les banques en ligne pour obliger les banques traditionnelles à moraliser la tarification de leurs prestations et à améliorer leur qualité de service.
Par Mohamed Chawki Abid *
Les frais bancaires rapportent aujourd’hui aux banques tunisiennes environ 400 millions de dinars, qu’elles prélèvent à leurs clients et le plus souvent à leur insu. Le pire, c’est que cette ligne de produit connaissait depuis 7 ans un accroissement excessif, stimulé par l’augmentation régulière des tarifs sur les commissions existantes ainsi que par la tarification d’opérations basiques ou électroniques historiquement gratuites. À ceci s’ajoute l’effet date-de-valeur, qui prend du volume sans justification objective de par la parfaite numérisation des opérations de crédit/débit en compte. Pourtant, les banques tunisiennes reconnaissent les atouts de la digitalisation des opérations, des prestations et des communications. En effet, la digitalisation est un moyen de réduire les frais imposés aux clients et un levier pour recruter des prospects.
Augmentation unilatérale des frais bancaires
Cette pratique que l’on n’hésite pas à qualifier d’abusive, qui consiste à augmenter unilatéralement les frais bancaires, agace de plus en plus les clients particuliers et professionnels, mais aussi la clientèle des entreprises. Certains observateurs estiment que ces prélèvements bancaires s’apparentent à de la taxation indirecte.
En Tunisie, la physionomie de la concurrence bancaire n’est pas assez profitable au consommateur, dans la mesure où deux banques privées (pdm ≈ 30%) se partagent le rôle de market-maker, alors que les 3 banques publiques (pdm ≈ 35%) demeurent passives, les 11 autres banques restant suiveuses.
Ce faisant, le marché bancaire ne fait pas l’objet d’une concurrence loyale et constructive, et demeure influencé par les initiatives et les anticipations des deux premières banques privées, tant en sur-commissions qu’en sur-tarification. Par conséquent, la pseudo-concurrence ne donnera pas de résultats probants.
Cependant, plusieurs solutions sont faciles à mettre en œuvre par les autorités du pays, pour contenir les abus des banques traditionnelles, voire y mettre fin.
Les banques en ligne peuvent aider à moraliser le secteur
En dehors de la réhabilitation du département de supervision bancaire auprès de la Banque centrale de Tunisie (BCT), pour veiller à la légitimation de la tarification des produits et services bancaires, on peut citer la promotion des banques en ligne, qui ont obligé – en Europe et en Amérique du Nord – les banques traditionnelles à moraliser la tarification de leurs prestations et à améliorer leur qualité de service.
En France par exemple, les banques en ligne ont étoffé leur offre et proposent des services ultra complets qui combinent plusieurs services comme le compte courant, le placement, l’assurance vie, la bourse, le crédit à la consommation, et même le crédit immobilier. Des offres aux fonctionnalités tellement variées qu’elles répondent aux besoins de tout client potentiel.
Mais en Tunisie, le lobby des banques privées ne semble pas être prêt à lâcher une part de marché aux banques électroniques, en faisant pression sur les autorités compétentes et en amadouant les principaux leaders des partis politiques au pouvoir.
* Ingénieur économiste.
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