Abir Moussi vient de critiquer les forces progressistes du mouvement du 18-Octobre (1). Seulement, la présidente du Parti destourien libre (PDL) et de son bloc parlementaire aurait mieux fait de se remettre en question avant de jeter le tort aux autres.
Par Leith Lakhoua *
Certes, l’opposition traditionnelle progressiste s’est trompée en s’associant aux islamistes, et le prix était fortement payé. Mais Mme Moussi continue de commettre une erreur monumentale en dénigrant la révolution de janvier 2011 et en justifiant les dépassements et les erreurs de l’ancien pouvoir dictatorial. Car il ne faut pas oublier que si elle s’exprime aussi librement qu’elle le fait et se présente en tant que candidate aux différentes élections c’est grâce à cette révolution, et ceci est une évidence incontournable, continuer à l’ignorer est une erreur énorme qui, avec le temps, risquerait de lui porter un préjudice fatale.
De même, continuer à justifier les comportements dictatoriaux de l’ancien système de Ben Ali et ne pas reconnaître les erreurs du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), l’ex-parti du pouvoir, est d’une maladresse colossale.
La présidente du PDL, qui a aujourd’hui le vent en poupe dans les sondages, ne doit pas s’enflammer et perdre la boussole. Car elle ne peut espérer un quelconque leadership qui pourrait la ramener aux plus hautes fonctions de l’Etat dans ce pays – sans doute qu’elle y pense fortement en se coiffant le matin – que si elle réussit brasser large au-delà de la petite famille du PDL en se débarrassant de ces deux lourdes étiquettes. Ce n’est qu’à ce moment-là, et au prix de sérieuses révisions, qu’elle pourrait constituer, au regard de la majorité des Tunisiens, une alternative aux islamistes, en rassemblant autour de sa personne et de son programme une opposition forte et efficace. Encore faut-il aussi qu’elle abandonne cet état d’esprit paternaliste et condescendant qui a toujours sévi chez les Destouriens depuis Habib Bourguiba, et accepter de se mettre à pied d’égalité que les autres leaders de l’opposition, même s’ils ne plafonnent pas comme elle dans les sondages d’opinion.
Mme Moussi entraîne dans son sillage une énorme force vive mais elle risque de perdre cet avantage en un claquement de doigts, comme cela a été le cas de beaucoup de leaders qui l’ont précédée, comme Néjib Chebbi, Moncef Marzouki, Mustapha Ben Jaafar, Hamma Hammami, et d’autres encore aujourd’hui presque disparu de la scène, mais la présidente du PDL retiendra-t-elle la leçon ?
* Indépendant.
1- La grève de la faim entamée le 18 octobre 2005, et ui a duré 32 jours, par 8 figures de la scène politique et de la société civile tunisiennes, alors âgés de 39 à 66 ans – Ahmed Nejib Chebbi, Hamma Hammami, Mokhtar Yahyaoui, Lotfi Hajji, Samir Dilou, Ayachi Hammami, Abderraouf Ayadi et Mohamed Nouri, pour réclamer la liberté d’organisation politique et associative, la liberté d’expression et une amnistie générale pour tous les prisonniers d’opinion.
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