«Faster, higher, farther»: L’administration Volkswagen prenait les Américains pour des pigeons

L’affaire de la marque automobile allemande Volkswagen aux Etats-Unis démontre que la tentation existera toujours pour toute société quelle qu’elle fut de réaliser des bénéfices contre les lois en vigueur, et que les contrôles réalisés par les autorités publiques seront toujours nécessaires.

Par Dr Mounir Hanablia

La marque automobile allemande Volkswagen est connue dans le monde entier pour la qualité de ses voitures. C’est Adolf Hitler qui avait eu l’idée d’une voiture populaire accessible aux bourses des ouvriers allemands, sans doute pour les éloigner du communisme, et de la tentation révolutionnaire, et c’est au constructeur Ferdinand Porsche que fut confiée la responsabilité de sa production.

Après la guerre, les usines Volkswagen furent placées sous la responsabilité d’un administrateur anglais et c’est sous sa férule que VW devint une marque de renommée internationale, la famille Porsche y détenant une part prépondérante.

La Coccinelle fut un succès mondial, en particulier aux Etats-Unis où durant les années 60 elle a symbolisé la voiture de la jeunesse libérée et contestataire. Cependant avec l’émergence des marques asiatiques, les parts des sociétés européennes et américaines se sont rétrécies, même sur le marché américain. Et les questions liées à l’écologie étant devenues une priorité politique, les constructeurs automobiles se sont retrouvés confrontés à l’obligation de diminuer les émissions d’oxyde et de dioxyde de carbone, à effets de serre, d’oxyde d’azote destructeur de la couche d’ozone protectrice contre les rayons UV, et de vapeurs de plomb, tous ces gaz étant toxiques et occasionnant des problèmes complexes de santé publique.

Des bénéfices contre les lois en vigueur

Afin de faire face à des législations de plus en plus contraignantes et à un accroissement continu des prix des carburants, les fabricants devaient en diminuer la consommation, et ils avaient le choix entre soit utiliser des carburants moins polluants comme l’hydrogène, soit minimiser les émissions nocives grâce à des pots catalytiques, soit s’orienter vers les moteurs électriques en passant par l’étape des hybrides.

Au sein de la maison VW, le choix avait été fait d’utiliser un diesel moins polluant et l’invention du moteur à injection en avait fortement réduit la consommation tout en améliorant le rendement  énergétique. Seules les émissions d’oxyde d’azote continuaient à poser un problème et malgré tous ses efforts, le constructeur allemand n’y trouvait pas de solution, alors même qu’il obtenait l’autorisation de commercialiser ses voitures diesel et d’ouvrir une usine de fabrication en Amérique, avec évidemment l’obligation expresse d’en respecter les normes environnementales. La suite, tout le monde la connaît: un algorithme était placé dans l’ordinateur de bord de chaque véhicule rendant ses émissions de gaz conformes aux normes américaines, mais uniquement lors des contrôles en garage.

Le pot aux roses fut découvert quand des universitaires eurent l’idée de tester les gaz d’échappement sur des voitures en circulation. On s’aperçut alors que les voitures VW Diesel étaient bien plus polluantes que ce que le règlement autorisait. Finalement, la direction dut reconnaître la réalité de la fraude. Cela lui valut des poursuites civiles et la société dut débourser près de 30 milliards de dollars de dédommagements, et quelques-uns de ses membres firent l’objet de poursuites pénales aux Etats-Unis, mais une fois n’est pas coutume, l’Allemagne refusa de les livrer et de se plier aux exigences de la justice américaine.

La recherche du tout électrique

Tout cela a marqué évidemment la fin du carburant diesel super performant, et depuis lors tous les grands constructeurs automobiles se sont lancés dans la recherche du «tout électrique», au détriment de l’hydrogène, pourtant abondant, accessible, et peu polluant. Or la construction de batteries électriques pose de nombreux problèmes et contribue également au réchauffement climatique, et ses composants sont rares.

Cependant, malgré l’ampleur des pertes financières subies, le constructeur allemand a pu se rétablir, sa réputation n’a que peu été touchée en dehors des Etats-Unis, ses voitures jouissent toujours à travers le monde de la confiance et de l’engouement du public, Mais cette affaire démontre que la tentation existera toujours pour toute société quelle qu’elle fut de réaliser des bénéfices contre les lois en vigueur, et que les contrôles réalisés par les autorités publiques seront toujours nécessaires.

* Médecin de pratique libre.

«Faster, Higher, Farther: The Volkswagen Scandal», de Jack Ewing,  22 mai 2018, 384 pages

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