«Farewell Kabul» : A trop vouloir compter sur l’oncle Sam…

Le fiasco de l’intervention militaire en Afghanistan est un exemple parmi d’autres de l’aveuglement américain à toujours miser sur le mauvais cheval, comme ils l’ont fait en soutenant le pouvoir d’Ennahdha, au cours des dix dernières années en Tunisie. Faut-il s’étonner dès lors que les récentes exigences du département d’Etat relativement à la normalisation des relations avec Israël ait conduit à une crise diplomatique entre Tunis et Washington. (Illustration: Christina Lamb en Afghanistan en 2006 – Ph. Justin Sutcliffe).

Par Dr Mounir Hanablia *

L’auteur, une journaliste britannique, reprend dans cet ouvrage toutes les erreurs commises par les administrations américaines successives en Afghanistan depuis le premier jour de l’invasion, du refus du déploiement des troupes nécessaires au moment opportun ayant conduit à la fuite des dirigeants d’Al-Qaïda et de Ben Laden des montagnes de Tora Bora, à la possibilité accordée aux Pakistanais d’évacuer les Talibans de Mazar, jusqu’aux bombardements ordonnés par Barack Obama des zones tribales par des drones, causant de nombreuses victimes collatérales et renforçant les sentiments anti-américains des populations, en passant par le soutien accordé à un régime politique corrompu au service des seigneurs de la guerre et des trafiquants de drogue, au nom du soutien à une démocratie factice.

L’issue inéluctable d’un échec diplomatico-militaire

Le livre écrit plusieurs années auparavant prévoyait déjà l’issue inéluctable de l’échec diplomatico-militaire américain et du jeu ambigu mené par les services secrets pakistanais: le retrait militaire en 2021 et le retour au pouvoir des Talibans plus virulents que jamais et auréolés du prestige de la résistance, dans un pays dévasté.

Y avait-il une alternative à ce fiasco? Certainement. L’éducation et les projets de développement menés sur une grande échelle et d’une manière soutenue auraient pu assurer une certaine prospérité et changer la société en profondeur, à un coût bien moindre. Mais cela aurait nécessité la neutralisation des seigneurs de la guerre et des réseaux politico-tribaux de la corruption sur lesquels les Américains comptaient pour mener la contre-guérilla.

Par ailleurs, les Etats Unis ne disposent plus des diplomates expérimentés tels que Richard Hellbrook capables de négocier et d’obtenir les solutions de compromis nécessaires à l’établissement de paix durables. 

Désormais, ce sont les généraux, forts des moyens matériels considérables à leur disposition, ou bien des think tank associant experts et universitaires opérant en vase clos et n’ayant aucune expérience du terrain, qui se fixent des objectifs chimériques et imposent la marche à suivre, et l’Administration ne fait en général que s’exécuter.

La crise diplomatique avec la Tunisie

Il était donc nécessaire de rappeler tout le passif de l’aveuglement américain à toujours miser sur le mauvais cheval, après le fiasco des dix années de pouvoir d’Ennahdha, et les récentes exigences du département d’Etat relativement à la normalisation des relations avec Israël, et conduisant à une crise diplomatique avec le président tunisien.

Il est vrai que les manifestations chauvines locales d’un panarabisme anachronique sont plutôt incongrues. Il est non moins vrai que les Etats Unis d’Amérique ne sont pas un pays sur qui on puisse compter, ne serait-ce que sur le moyen terme.

* Médecin de libre pratique.

“Farewell Kabul: From Afghanistan to a More Dangerous World”, essai de Christina Lamb, éd. William Collinsn, 2015, 640 pages.

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