D’habitude, après les moments d’euphorie, l’heure de la vérité arrive avec son lot d’actifs et de passifs. A cet égard, la 8e édition de la Conférence internationale de Tokyo sur le développement en Afrique (Ticad 8), tenue à Tunis les 27 et 28 août 2022, ne déroge pas de cette norme comptable universelle. Voyons ça de plus près !
Par Mahjoub Lotfi Belhedi *
Une organisation bien ficelée s’appuyant sur une synergie tuniso-japonaise efficiente en termes d’organisation et de logistique, adossée à une Union africaine de plus en plus impliquée dans les questions de développement…
Une présence de chef d’Etats africains en-deçà des attentes : comparativement à la sixième éditions de la Ticad tenue á Kenya en 2016, on constate l’absence de plusieurs présidents africains de la catégorie des poids lourds à l’échelle continentale.
Au final, la Ticad 8 a accueilli seulement huit présidents (Sénégal, Comores, Gambie, Seychelles, Guinée-Bissau, Burundi, Centrafrique et Madagascar)…
Une opacité totale quant aux critères de présélection des 81 projets présentés par la Tunisie à d’hypothétiques investisseurs japonais: pourquoi a-t-on retenu tel projet et rejeté tel autre rejeté ? Un mutisme total entoure cette question capitale et l’opération a été menée dans une logique d’entre-soi que les Japonais, on l’imagine, apprécient peu.
Un format «investment» incompatible avec la vocation triangulaire de la Ticad : les structures tunisiennes directement impliquées dans la présélection des projets se sont peut-être trompées d’adresse en privilégiant le bilatéral sur le multilatérale ou tripartite, qui est celle de la Ticad, et au lieu de s’associer activement à des mégaprojets régionaux ayant plus chance d’être acceptés par la partie nippone, on a préféré jouer seul dans un monde des affaires qui fonctionne en réseau…
Résultat final: un bilan non consolidé fait de vagues contacts, de promesses gênées et d’«on verra»! Etant entendu que le bilan réel sera fait dans trois ou quatre ans, en comptant le nombre de projets ayant réellement démarré.
Pour nos dirigeants politiques, l’effet recherché a été atteint : on a fait croire au peuple qu’après la Ticad, des investissements lourds vont pleuvoir sur une Tunisie en crise où même l’investissement national est en berne depuis une décennie. Ne dit-on pas que «les promesses n’engagent que ceux qui y croient» ?
* Universitaire, spécialiste en droit et en questions stratégiques.
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