Les potins du cardiologue : pomper l’air, c’est salutaire

Une gêne respiratoire inhabituelle doit toujours être prise au sérieux et explorée rapidement, même dans un contexte à priori normal, lorsqu’elle ne s’accompagne pas d’autres signes cliniques, car ses causes sont diverses et parfois inattendues.

Par Dr Mounir Hanablia *

La dyspnée est une sensation de gêne respiratoire. Elle amène souvent le patient à consulter, plus ou moins rapidement selon sa tolérance. Elle a été «popularisée» par la pandémie de coronavirus avec l’utilisation devenue accessible du saturomètre. Elle est due à une oxygénation insuffisante des tissus, et celle-ci provoque en retour une accélération du rythme respiratoire, par effet de compensation; l’organisme essaie de pomper plus d’air pour assurer ses besoins.

Il y a des dyspnées légères qui surviennent pour des efforts qui auparavant étaient bien tolérés, et ces dyspnées s’aggravent progressivement au fil du temps pour des efforts de plus en plus légers et finissent par survenir au repos, ou plus grave encore, en position allongée, imposant la position assise.

Mais il y a aussi les dyspnées qu’on appelle paroxystiques qui sont d’emblée graves et qui s’accompagnent de toux avec crachats abondants spumeux comme celles de l’œdème pulmonaire, qui équivaut à une véritable noyade, et elles surviennent brusquement chez un patient qui auparavant n’éprouvait aucune gêne.

Le traitement commence souvent en milieu hospitalier par l’oxygénation par voie nasale, mais il faut bien sûr rechercher et traiter la cause. Celle-ci peut être due à un débit cardiaque insuffisant, à des échanges gazeux insuffisants à travers la paroi pulmonaire, à une défaillance des muscles aidant à la respiration ou aux nerfs qui les commandent, à un transport d’oxygène insuffisant par le sang, à un mélange anormal entre le sang artériel et le sang veineux, ou une augmentation de l’acidité sanguine.

C’est pour cela que le contexte clinique (tabac), l’auscultation cardiaque, la mesure de la tension artérielle, la radio du thorax, un électrocardiogramme et quelques analyses sanguines sont souvent d’un apport considérable et suffisent à orienter le diagnostic. Mais il arrive que ces examens soient normaux et cela ne doit pas empêcher d’autres explorations (écho doppler cardiaque). Avant d’imputer au stress et à l’angoisse ainsi que le fait souvent la vox populi, il faut quand même penser à l’embolie pulmonaire, un gros diagnostic souvent méconnu et mortel, de plus en plus fréquent depuis la pandémie, mais qui peut révéler d’autres maladies méconnues, par exemple un cancer. Dans ce cas, le dosage des produits de lyse du caillot est d’importance pour orienter, et l’angioscanner pulmonaire apporte la confirmation.

Quoiqu’il en soit, toute gêne respiratoire inhabituelle doit toujours être prise au sérieux et explorée rapidement, même dans un contexte à priori normal, lorsqu’elle ne s’accompagne pas d’autres signes cliniques.

* Médecin de libre pratique.

Articles de la même série :

Donnez votre avis

Votre adresse email ne sera pas publique.