Alhambra, le massacre des Abencérage et la chute d’Al-Andalus  

Al-Andalus, il y a 530 ans, à la veille du désastre de 1492 : le massacre de 36 chevaliers de la noblesse arabe des Abencérage (les Benserraj, Benserradj, Abencerrajes, ou Banou Serraj) par Boabdil, El Chico, l’infortuné, dernier roi de Grenade.

Par Abdellaziz Guesmi *  

Grenade est à feu et à sang. Les rois catholiques et leurs soldats assiègent la ville. Dans l’Alhambra, Boabdil, au lieu de défendre Al Andalus, soupçonnant sa sultane, la comploteuse Aixa (Aïcha), d’avoir une relation amoureuse avec un Abencérage, massacre, dans une salle du palais, 36 nobles des Abencérage pour se venger.

En réalité, la puissante famille des Abencérage est victime d’un complot ziride : elle est accusée de vouloir renverser Boabdil pour sauver Al-Andalus. 

Querelles entre Arabes et Berbères

Les Abencérage étaient une tribu arabe du royaume de Grenade établie en Espagne depuis le VIIIe siècle. Elle était opposée à celle des Zirides (des Berbères Sanhadja). Ces deux factions faisaient et défaisaient les sultans de Grenade au gré de leurs alliances du moment. Les querelles entre Arabes et Berbères ensanglantent Grenade de 1480 à 1492 et hâtent la chute du royaume.

L’extermination de valeureux chevaliers Abencérage dans un bain de sang fait l’objet d’une anecdote liée à la salle située au sud de la cour des lions dans le palais de l’Alhambra qui porte leur nom : «La fontaine d’apparat ne laissait plus couler de l’eau, mais leur sang…».

La Salle des Abencérage  est en face de la Salle des Deux Sœurs et elle est ainsi appelée parce que la tradition populaire raconte que des chevaliers Abencérage ont été tués dans cette salle. Il existe une tache de rouille qui couvre une partie du bassin en marbre au milieu de la salle et qui est considérée comme une tache de sang de ces chevaliers.

Massacre des Abencerage, une peinture de Maria Fortuny.

Les murs de la salle sont couverts de plâtrières et d’une plinthe d’azulejos du XVIe siècle, du style de la Renaissance. Une magnifique coupole de «muqarnas» (éléments en nid de poule, stalactites) repose sur huit trompes qui sont également de muqarnas. Sur ces trompes est écrite l’inscription : «Il n’y a plus d’aide que celle qui vient de Dieu, le clément et miséricordieux ».

Les fenêtres, situées où la coupole commence, laissent passer une lumière faible qui éclaire les muqarnas et crée une atmosphère magique.

Les derniers Abencérage

Les Maures d’Espagne (ceux qui n’ont pas été massacrés) se dispersent en Afrique. Les tribus des Zirides et des Goméles s’établissent dans le royaume de Fez, dont elles tiraient leur origine. Les Vanégas et les Alabès s’arrêtent sur la côte, depuis Oran jusqu’à Alger. Enfin, les Abencérage se fixent dans les environs de Tunis sous le nom de  Benserraj ou Serraj.

François-René de Chateaubriand a écrit en 1826 Les Aventures du dernier Abencérage. C’est une fiction relatant les aventures d’un survivant de la famille Abencérage après la prise de Grenade en 1492.

L’écrivain français revient dans ses Poésies diverses sur le drame d’Alhamra et des Abencérage, dont nous extrayons ces vers :  

«O bel Alhambra !
O palais d’Allah !
Cité des fontaines !
Fleuve aux vertes plaines !
Un chrétien maudit
D’Abencérage
Tient l’héritage :
C’était écrit !»

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