Le poème du dimanche : ‘‘L’amitié des poètes’’ de Amjad Nasser

Amjad Nasser est poète, romancier et auteur de relations de voyage. Sa poésie s’inscrit dans la modernité et fait charnière avec la poésie classique. Avec des thèmes innovateurs.

Né en 1955 à Torrah, en Jordanie, il était journaliste et dirigeait à Londres, la page culturelle du journal arabe Al-Quds al-Arabi. Il décède en 2019, laissant une œuvre importante, dont huit recueils.

Quelques titres (en français) : Le royaume d’Adam, anthologie personnelle, trad. Antoine Jockey, Sindbad/Actes Sud, 2021. Et en arabe : Eloge d’un autre café, 1979; L’arrivée des exilés, 1990; La trace du passant, 1995; Une vie comme une narration discontinue, 2004.

Tahar Bekri

1

Celui qui me voit ne me demande plus de tes nouvelles

Celui qui te voit ne te demande plus de mes nouvelles

Si cela se produit nous répondons par murmure

Non comme nous hennissions avant.

Il semble que nous ayons pris de l’âge soudainement

Nous avons dépassé la quarantaine que n’atteignent

Que ceux qui n’ont pas dilapidé l’énergie de la trahison

auprès de ceux qui passent

Les poètes qui nourrissent le crocodile de l’amitié

avec la chair de leurs épaules meurent,

habituellement, près de leurs premiers poèmes.

2

Tu courais avec mes poèmes avec la rapidité

du coureur des petites distances

Je courais avec tes poèmes pour te devancer

à la ligne d’arrivée

Nous n’hésitions pas à donner des coups

à celui qui risquait la critique des poèmes

de l’absent parmi nous.

Maintenant

Je pense

J’étire mes lèvres

Je réponds sèchement avec des mots objectifs

à propos de ton niveau poétique

J’essaie de ne pas montrer mon exaspération

que tu es encore en vie d’écriture

et je n’en doute pas, tu fais de même.

3

Où est le timbre de cuivre qui distinguait nos voix

quand tu parlais de moi et je parlais de toi ?

Où sont les poings que nous levions à la figure de ceux

qui nous critiquaient, qui, sûrement,

sont devenus plus nombreux

dans les cafés maintenant ?

Où sommes-nous, nous-deux,

quand d’autres voyaient l’un de nous

le prenaient pour deux ?

4

Deux jeunes qui se rencontrèrent sous les orages

des promesses dans une Nuit arabe

qui cache une vie qui marche

en avant, la tête en arrière

L’un écrit un poème en prose bucolique   

L’autre, un poème métrique qui quitte le lyrisme doucereux,

S’étendent maintenant

côte à côte sur la terre de l’amitié verte et se lisent

des poèmes qui n’acceptent

pas moins que de changer le monde !

(Traduit de l’arabe par Tahar Bekri).

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