L’année civile 2024 débute avec une compétition d’envergure internationale, à laquelle va participer le gotha du football africain. Depuis la fin de l’an 2022, le ballon rond Made in Africa est à l’honneur grâce au coup de poker marocain lors de Coupe du Monde Qatar 2022.
Par Jean-Guillaume Lozato *
La Côte d’Ivoire va en effet accueillir la Coupe d’Afrique des Nations à partir du 13 janvier, une compétition de plus en plus intéressante au fil des années, aux faux airs de Coupe du Monde.
Le foot africain en pleine forme
Comme l’a démontré le dernier Mondial joué en Péninsule Arabique, le contient africain a été un pourvoyeur de créativité et de dynamisme. A en juger par les performances ou coups d’éclat du Sénégal qualifié avec brio pour le Second Tour, de la Tunisie vainqueur de la France, du Cameroun triomphant du Brésil au phase de poules, du Ghana posant problème au Portugal et surtout de l’épopée d’un Maroc se montrant étincelant et passant en demi-finale.
Cette CAN 2024 sera l’occasion de conserver des acquis, tout en tentant de les bonifier avant la Coupe du Monde 2026 qui acceptera davantage d’équipes africaines et qui fera plus ou moins office de répétition avant le Mondial qui sera organisé sous la responsabilité du Maroc en 2030.
Toutefois, pour l’observateur attentif le saut de qualité allié à l’intensité avait déjà commencé avec la CAN proprement dite en 2019 (victoire finale de l’Algérie) et en 2022 (victoire du Sénégal).
Par la suite, si nous observons les matchs disputés entre nations africaines et celles du reste du monde, les statistiques confirment cette tendance. Ainsi depuis le coup de sifflet final de Qatar 2022, on a assisté à des démonstrations marocaines puis tunisiennes face à l’Amérique du Sud (Les Lions de l’Atlas ont battu le Brésil 2-1, puis, puis ont tenu tête au Pérou; tandis que les Aigles de Carthage ont défait le Chili deux 2-0). Alors que, toujours en match amical, le Sénégal s’en est allé battre le Brésil par 4-2. Et le Sénégal est l’équipe tenante du titre…
Le Sénégal et le Maroc seront donc les équipes à battre.
Entre doutes et certitudes
Le sol ivoirien et ses spécificités sont là pour accueillir, avec la vivacité de son public, les équipes qualifiées pour cette phase finale 100% africaine.
A domicile, les Ivoiriens auront à cœur de faire bonne figure devant leurs supporters. Les défier chez eux ne sera a priori facile pour aucun adversaire. Dans cette première poule de l’épreuve, la tâche sera rude face à l’impressionnant Nigeria, qui les rencontrera en compagnie de la Guinée Bissau et de la Guinée Equatoriale. A noter que cette dernière détient les capacités pour gérer un résultat en cueillant l’adversaire à froid ou en contre comme elle l’a montré en phase qualificative (1-1 en Libye, victoire 1-0 contre la Namibie, victoire 1-0 au Liberia).
Le groupe suivant, lui, devrait voir l’Egypte passer, en compagnie du Ghana. La dernière place se jouant entre Cap-Vert et Mozambique. Mais attention aux premiers nommés qui avaient réussi il y a quelques mois un méritant 0-0 au Maroc.
Le groupe d’après composé du Cameroun, de la Gambie, de la Guinée et du Sénégal disposant d’un excellent Sadio Mané devrait être riche en spectacle. Avec des Sénégalais premiers et des Camerounais commençant la compétition au diesel avant d’enclencher le super par la suite.
Le quatrième groupe (Algérie, Angola, Burkina Faso, Mauritanie) devrait voir les Algériens parvenir logiquement au deuxième tour, grâce au mangement du coach Djamel Belmadi et des apports de jeunes prometteurs comme Aït Nouri.
L’avant-dernier groupe est peut-être le plus gros «piège» de cette CAN (composé d’Afrique du Sud, Mali, Namibie et Tunisie). Si la Tunisie parvient à varier son jeu et surtout à éviter le jeu aérien devant des garçons comme Kalifa Koulibaly (Mali), alors elle pourra espérer passer ce tour en misant entre autres sur les coups de pieds arrêtés, et en faisant jouer la complémentarité entre Bassem Srarfi et le jeu en soutien. Sachant que le Mali dispose d’un réservoir de gardiens meilleur que celui de l’Afrique du Sud…
Enfin le groupe F sera très attendu avec le Maroc, qui se disputera vraisemblablement la première place avec la RD Congo. Attention au jeu très physique pratiqué par la Tanzanie et à la Zambie sur le jeu aérien.
Quelles suppositions ?
A supposer que le premier tour se passe selon la physionomie édictée lors des lignes précédentes, alors nous retrouverons du beau monde : Côte d’Ivoire, Nigeria, Egypte, Ghana, Cameroun, Sénégal, Algérie, Angola ou Mauritanie, Mali, Afrique du Sud ou Tunisie, Maroc, RD Congo.
Le Sénégal fait très forte impression et semble avoir renforcé ses lignes défensives, variant son jeu par un milieu tantôt à plat tantôt en losange. Le Cameroun, lui, a les moyens de se montrer adepte de plusieurs schémas de jeu selon l’équipe adverse ou… l’humeur du moment. L’une de ces deux équipes a les moyens pour défier la Côte d’Ivoire dans le dernier carré. Un dernier carré ou pourraient se retrouver Algérie et surtout Maroc.
Les hommes menés par Walid Regragui ont conservé une osmose évidente, tout en intégrant un nouveau venu en mesure de devenir une surprise de ce tournoi : Amir Richardson. Mais l’Egypte veille, tapie avec son arme fatale : son attaquant vedette Mohamed Salah, meilleur buteur potentiel auteur d’une énième prestation des plus convaincantes contre Tottenham le week-end dernier. Ce qui nous amène aux individualités.
Concernant les vedettes de cette CAN, que ce soit les confirmations ou les révélations, des noms viennent à l’esprit : tout naturellement Mohammed Salah, qui a l’avantage de jouer dans une équipe nationale dont le pays est un spécialiste de la victoire en Coupe d’Afrique des Nations, une nation capable de rivaliser de la tête avec les meilleurs équipes subsahariennes. Les Marocains Ayoub El Kaabi, Amir Richardson et Hakim Ziyèche auront leur mot à dire. Tout comme l’Algérien Aït Nouri et son co-équipier Riyad Mahrez, et le Sud-Africain Evidence Magkopa, Sadio Mané et Abdallah Sima (Sénégal) devraient aussi proposer du spectacle. Côté tunisien, Aissa Laïdouni devra quadriller l’entrejeu dans le même registre que Sofyan Amrabat pour le Maroc, et par ce biais pourra faire partie de l’équipe-type du tournoi si la Tunisie travaille sa relance et va loin. Alors que les Nigérians Ademola Lookman, Ahmed Musa et plus particulièrement Victor Osimhen chercheront à terrifier leurs adversaires.
Vivement le 13 janvier et le commencement de cette grande fête continentale qu’est la Coupe d’Afrique des Nations. Un événement toujours enclin à nous divertir de par son intensité et son originalité.
La CAN a évolué en ce sens que les styles de jeu se sont diversifiés par rapport à il y a une quinzaine d’années. Désormais, cela se jouera sur des détails comme l’expérience et plus seulement la condition physique, comme le fait de gérer l’impact physique et les blessures, comme l’avantage de pouvoir compter sur trois ou quatre gardiens de qualité au sein d’un même effectif.
Et pour la finale, un classique Egypte opposé à une formation d’Afrique Noire, ou un duel Sénégal-Côte d’Ivoire ou encore un duel 100% maghrébin entre Algériens et Marocains?
* Enseignant universitaire et analyste de football.
Donnez votre avis