A l’instar de nombreux autres projets structurants, celui de zone de libre échange de Ben Guerdane, censé devenir une passerelle entre le nord et le sud du Sahara, risque, comme beaucoup d’autres avant lui, de rester dans les cartons. Et ce serait une grosse perte pour l’économie de la Tunisie, qui stagne dangereusement. (Illustration : signature du contrat constitutif de la Société de gestion et d’exploitation de la zone franche d’activités commerciales et logistiques de Ben Guerdane, le 22 février 2024, sous l’égide de la ministre du Commerce et de la Promotion des exportations, Kalthoum Ben Rejeb).
Par Leith Lakhoua *
Au cœur de la région de Ben Guerdane, ville frontalière entre la Tunisie et la Libye, se dessine un projet d’envergure : la création d’une zone de libre-échange destinée à devenir une plateforme commerciale internationale, ouvrant les portes de l’Afrique et stimulant le développement économique de la région. Conçue pour répondre à plusieurs objectifs, cette initiative vise principalement à réduire les phénomènes de la contrebande et du commerce parallèle qui prospère généralement dans les zones frontalières.
Structurée en trois composantes stratégiques, la zone de libre-échange comprendra des espaces commerciaux dédiés aux opérateurs et commerçants, des infrastructures logistiques pour le stockage des marchandises, ainsi qu’une composante de services comprenant des administrations et des entreprises publiques. Couvrant une superficie de 150 hectares, ce projet ambitieux nécessitera un investissement global estimé à 35 millions de dinars tunisiens (MDT).
Ce qui distingue cette initiative, c’est son engagement à inclure une dimension de service destinée aux investisseurs, une première dans l’histoire de la Tunisie. En effet, en plus de favoriser les échanges commerciaux, la zone de libre-échange vise à attirer les investisseurs étrangers en offrant des services adaptés à leurs besoins spécifiques.
La concrétisation de ce projet devrait également avoir un impact significatif sur l’emploi, avec la création attendue de 2000 emplois directs et 8000 emplois indirects. Ces opportunités d’emploi contribueront à dynamiser l’économie locale et à améliorer les conditions de vie des habitants de la région de Ben Guerdane.
Cependant, malgré les efforts initiaux en 2019 pour le lancer, ce projet a malheureusement stagné pendant plusieurs années. C’est seulement récemment, le jeudi 22 février 2024, qu’une nouvelle impulsion a été donnée avec la signature d’un contrat constitutif de la Société de gestion et d’exploitation de la zone franche d’activités commerciales et logistiques de Ben Guerdane, sous l’égide de la ministre du Commerce et de la Promotion des exportations, Kalthoum Ben Rejeb.
Toutefois, cette relance est entachée par les craintes persistantes que le projet ne soit une fois de plus abandonné ou laissé dans les cartons, à l’instar d’autres projets majeurs qui ont été relégués aux oubliettes, tel que celui de port en eaux profondes d’Enfidha.
Ces craintes sont renforcées par les avancées réalisées par l’Égypte dans un projet similaire, soulignant l’urgence pour la Tunisie de maintenir sa compétitivité régionale et de garantir la réussite de tels projets structurants.
En effet, les retards dans la réalisation des projets d’infrastructures cruciaux ont un impact direct sur la position logistique de la Tunisie sur la scène internationale, laissant le pays à la traîne derrière ses concurrents régionaux tels que l’Égypte et le Maroc. Pour éviter un tel revers, une gestion proactive et un engagement continu sont indispensables pour concrétiser la vision de Ben Guerdane en tant que moteur de développement économique et commercial pour le sud de la Tunisie.
* Consultant en logistique et développement industriel.
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