Pour une diplomatie dynamique, proactive et créative

La conférence annuelle des chefs de missions diplomatiques et consulaires de Tunisie, qui s’ouvre le 31 juillet 2024 au siège du ministère des Affaires étrangères, de la migration et des Tunisiens à l’étranger à Tunis, doit fixer pour nos représentants officiels à l’étranger des objectifs clairs et précis, une charte de travail, une feuille de route axée sur la défense de la souveraineté globale du pays, le refus de toute ingérence dans ses affaires intérieures et la défense des causes justes, en particulier celle de la Palestine occupée.

Raouf Chatty

Les travaux de cette conférence se dérouleront sur trois jours et il est attendu que le président de la république, le premier responsable de la diplomatie tunisienne, s’adresse aux participants et, à travers eux, à tous les Tunisiens. 

Quel que soit le thème principal de la conférence de cette année, pour la  hiérarchie, pour les ambassadeurs, les  consuls, le personnel diplomatique exerçant au ministère à Tunis et les opérateurs tunisiens avec l’extérieur, ces assises sont un rendez-vous annuel majeur, tout comme pour la communauté diplomatique étrangère accréditée en Tunisie.

Ce rendez-vous doit être mis à profit de manière judicieuse pour mesurer la contribution de notre diplomatie au renforcement de la sécurité globale dans la région et dans le monde, évaluer de manière objective  sa contribution à la coopération, au développement de la Tunisie, à son rayonnement international et à la défense de ses intérêts cruciaux. 

Ces assises devront également permettre aux représentants officiels de notre pays à l’étranger de mieux se fixer sur les attentes du gouvernement à leur endroit, d’échanger avec de hauts responsables et de hauts fonctionnaires de  l’administration centrale sur les moyens les plus appropriés pour promouvoir au mieux la Tunisie à l’étranger, utiliser le plus judicieusement possible la ressource diplomatique au service  du développement du pays et défendre ses intérêts dans un environnement régional et international difficile, incertain et en pleine mutation.

Une nécessaire coordination

Il est important dans ce cadre de rappeler que tous les organismes publics et privés  qui entretiennent des relations  avec l’étranger doivent comprendre qu’il est dans l’intérêt de la  Tunisie de coordonner leurs actions avec le ministère des Affaires étrangères, la coordination étant, on ne cessera de l’affirmer, un véritable atout pour le succès de toute entreprise en rapport avec l’étranger. 

Pour que ces assises soient le plus possible utiles et efficaces, les intervenants devront faire preuve d’imagination, sortir des sentiers battus en se gardant dans  leurs interventions de verser dans les généralités, les descriptions fleuves de la scène internationale et les nombreuses difficultés qu’elle traverse. 

De fait, il n’est secret pour personne  que la société internationale est en train de vivre des mutations profondes, des bouleversements géopolitiques et stratégiques majeurs et que de nouveaux rapports de force sont en train de voir le jour, suscitant, à la faveur des changements scientifiques et techniques extraordinaires, des inquiétudes, des angoisses, des luttes sans merci entre les grandes puissances, qui rendent la scène internationale instable et incertaine et où chaque pays cherche à se positionner pour défendre au mieux ses intérêts et assurer sa sécurité.

La conférence devrait d’emblée prendre acte de ce constat et placer ses travaux  dans une perspective orientée sur l’identification, si besoin est région par région  géographique, des secteurs et domaines qui doivent occuper le quotidien de nos chefs de poste, souligner les actions qu’ils doivent privilégier en exploitant judicieusement et au mieux les changements majeurs impactant les relations internationales dans tous les domaines, le but étant d’en tirer le plus de profit pour le bien  de  la Tunisie…

La question de la diplomatie économique, culturelle et environnementale (eau, réchauffement climatique…), le rôle de nos communautés à l’étranger, qui compte aujourd’hui quelque deux millions d’âmes, et l’immigration des Subsahariens en Tunisie doivent tout particulièrement retenir l’attention de la conférence, laquelle devra plancher sur les moyens à mettre en œuvre pour donner corps aux  composants essentiels de toute activité diplomatique. 

Sortir des sentiers battus

La conférence ne doit pas se perdre dans les détails. Nous attendons qu’elle fixe pour nos représentants officiels à l’étranger des objectifs majeurs clairs et précis, une charte de travail, une feuille de route axée sur la défense de la souveraineté  globale de la Tunisie, le refus de toute ingérence dans les affaires intérieures, la défense des causes justes, en particulier celle de la Palestine occupée, la  participation à la construction  de la force politique et économique de notre pays, le renforcement des atouts de cette souveraineté, et la défense des intérêts des communautés tunisiennes établies à l’étranger.  

En agissant de la sorte de manière intelligente, ordonnée et rigoureuse, notre diplomatie s’inscrira dans la lignée de la politique des pères fondateurs et des idées forces du président de la république en la matière. Celui-ci  n’a-t-il pas toujours  rappelé avec force dans ses interventions que la souveraineté de la Tunisie est  inaliénable, qu’elle prime sur tous les autres principes, qu’elle constitue un tout indivisible, qu’elle dicte toutes les actions de l’État et qu’ elle s’exerce  dans le cadre du respect mutuel et de la primauté du droit international.

Le président de la république s’est toujours inscrit contre toutes les formes d’ingérence dans les affaires intérieures des pays. Il a toujours appelé à  l’établissement de relations internationales équilibrées et justes tenant compte des intérêts légitimes de chaque  pays.

La concrétisation de ces principes toujours défendus par la diplomatie tunisienne depuis l’indépendance du pays doit demeurer en tête des préoccupations de nos représentants à l’étranger qui peuvent faire beaucoup et davantage pour le développement de la Tunisie et pour son rayonnement, à charge pour eux d’utiliser judicieusement les ressources diplomatiques dont ils disposent, de prendre appui sur les travaux de l’Académie diplomatique de Tunisie et de savoir sortir des sentiers battus de faire preuve d’un tant soit peu d’imagination et de courage.

* Ancien ambassadeur. 

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