Alors que la majeure partie d’Alep, deuxième ville syrienne, avec ses bâtiments administratifs, son aéroport et sa prison a été prise par les rebelles syriens menés par le groupe islamiste Hay’at Tahrir al-Sham, le régime syrien semble subir un contexte complètement défavorable. Ses alliés sur le terrain sont mal en point. Le Hezbollah sort épuisé d’une guerre contre Israël et ses positions en Syrie ainsi que celles des Gardiens de la révolution iraniens ont été pilonnées par l’aviation israélienne et des dépôts d’armes du régime ont été également bombardés. Quant à la Russie, qui lui assurait un soutien aérien, elle a d’autres chats à fouetter en Ukraine. Les vents contraires soufflent de plus en plus fort sur le régime du Baas syrien et l’inoxydable Bachar Al-Assad.
Imed Bahri
Le journal israélien Jerusalem Post estime que le régime syrien est sur le point de perdre sa ville d’Alep, dans le nord du pays, au profit des groupes rebelles syriens dirigés par Hay’at Tahrir al-Sham en raison de sa faiblesse et de la faiblesse du soutien de l’Iran et du Hezbollah dont les positions en Syrie ont fait l’objet de multiples frappes israéliennes ces derniers mois.
Le journal explique dans une analyse de Seth J. Frantzman que la région du Moyen-Orient se trouve à un carrefour important puisque Hay’at Tahrir al-Sham peut désormais porter le coup le plus dur au régime du président syrien Bachar Al-Assad en 2017. Des années après, on pensait, il y a encore quelques jours, que ses partisans à Moscou et à Téhéran étaient capables de le protéger.
Les alliés traditionnels ont la tête ailleurs
En regardant en arrière plusieurs années pour comprendre l’importance de ce moment, l’analyste rappelle que le commandant de la Force Al-Quds des Gardiens de la révolution iraniens, Qassem Soleimani a joué un rôle clé dans l’intervention de la Russie en Syrie et a personnellement dirigé la bataille d’Alep en décembre 2015 après s’être rendu à Moscou pour convaincre la Russie d’intervenir militairement dans la guerre contre les rebelles et le régime syrien.
La Russie et l’Iran étaient présents en Syrie ainsi que le Hezbollah libanais qui a déplacé ses forces vers la Syrie en 2012 via Qusayr depuis le nord du Liban. Après 2016, le régime syrien a continué à s’emparer de davantage de zones aux rebelles qui ont fini par se diviser: certains se sont mués en mandataires de la Turquie et d’autres se sont installés à Idlib pour vivre sous le règne de Hay’at Tahrir al-Sham.
Ce groupe était liée à Al-Qaïda il y a des années avant de changer de nom à plusieurs reprises. Il a déclaré avoir pris des mesures pour se rapprocher de l’Occident et tenter de communiquer avec les États-Unis, mais il reste toujours la faction la plus extrémiste parmi les rebelles syriens, tout en disposant de forces importantes sur le terrain. Ce qu’il a démontré après s’être emparé de dizaines de villages et d’avoir vaincu les forces du régime syrien, et marché sur Alep.
En 2015 et 2016, le régime syrien bénéficiait de l’aide précieuse de milliers de membres du Hezbollah et du soutien de l’Iran via sa force Al-Quds présente en Syrie ainsi que des avions de guerre russes. Aujourd’hui, il semble impuissant en partie à cause de l’attention portée par Moscou à l’Ukraine où la guerre fait rage et où la Russie elle-même a besoin de davantage d’effectifs mais surtout à cause des coups portés par Israël au Hezbollah qui ne peut plus envoyer de forces via Qusayr et même s’il le pouvait la route est devenue impraticable car détruite par l’aviation israélienne.
Le régime syrien pensait que l’histoire évoluait en sa faveur alors qu’il normalisait ses relations avec l’Égypte et plusieurs grands États du Golfe mais aujourd’hui les rapports de force sur le terrain semble être en sa défaveur, estime Seth J. Frantzman, ajoutant que la crise à Alep pourrait contraindre ce régime à démanteler les défenses ailleurs dans le pays. Ce qui aiderait l’Etat Islamique ou inciterait les milices irakiennes à pénétrer dans certaines zones de la Syrie.
Ces milices pourraient finir par menacer le Golan ainsi que les forces américaines en Syrie comme elles l’ont fait par le passé. C’est important et cela intervient alors que le nouveau président américain Donald Trump se prépare à prendre ses fonctions. Ce dernier avait cherché à retirer les forces américaines de Syrie en 2018 et 2019. Cela signifie que de nombreux fronts sont en jeu actuellement dans la région.
Les rapports de force ont changé, les vents contraires soufflent de plus en plus fort et l’unique survivant des printemps arabes, l’inoxydable Bachar Al-Assad va-t-il pouvoir s’en sortir seul alors que ses alliés qui lui permis de tenir jusque-là sont plus affaiblis que jamais? Le doute est permis mais seul l’avenir proche pourra indiquer si le règne de la dynastie Al-Assad qui dure depuis 53 ans va se poursuivre ou bien s’il vit son crépuscule.
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