Le Groupe de l’Espagne et de l’Italie avait été annoncé comme «le groupe de la mort» du championnat d’Europe des Nations 2024 qui se joue actuellement en Allemagne. Une passation de pouvoir autour de ce statut serait-elle en train de s’effectuer? (Illustration: Kanté contré par trois Néerlandais).
Jean-Guillaume Lozato *
Vendredi 21 juin. Premier jour de l’été officiellement. Les hostilités de la poule D ont commencé avec un instructif et un peu injuste Autriche-Pologne. Prolongées par un très attendu France-Pays-Bas.
L’Autriche a gagné en se faisant peur. Le tableau d’affichage a évolué de 1-0 à 1-1 puis 3-1 en fin de rencontre.
Avec un jeu plus rationnel, les Germanophones ont frappé les esprits à partir de la 9e minute et un but de la tête de Trauner, entraîné par un service sur une longue touche par le numéro 2 Mwene. Leurs adversaires du jour ont cherché à répondre dans les plus brefs délais, que ce soit par l’offensive (17e minute, tentative du droit juste au-dessus du numéro 24 Slisz) ou par l’opposition défensive (à retenir l’initiative de leur goal Szczesny de courir hors de sa surface pour éloigner le danger de la tête, ce qui démontre autorité et compétence).
La mi-temps suivante a confirmé la tendance à aller de plus en plus haut des joueurs au maillot rouge.
En dépit d’un répondant affiché du camp d’en face, les compagnons d’Arnautovic ont trouvé le chemin des filets par deux fois. D’abord par Baumgardner, qui bien qu’un peu plus esseulé (les Autrichiens devraient revoir les notions de mieux relayeur et défensif…) que face à la France, a encore livré une sacrée prestation. Puis sur penalty par le capitaine et pensionnaire de l’Inter Arnautovic.
L’après-midi bi-cromatique fondé par l’Autriche et la Pologne, dont les deux drapeaux rouges et blancs ont comme un air de famille, s’est terminé ainsi. Laissant place à la «grande affiche».
Le Bleu blanc rouge en plat principal
Le temps d’ajouter la couleur bleue aux débats pour former les étendards des deux rivales, le match de la soirée nous a offert une première mi-temps un peu déconcertante. Cette opposition entre deux équipes talentueuses a démontré des accès de faiblesse de part et d’autre dans la coordination.
Le sens du spectacle s’est invité d’entrée de jeu sous la forme d’une frappe de Frimpong pour les hommes au maillot orange, détournée par Maignant. Les intentions étaient claires. Chez les bleus aussi puisqu’ils ont riposté presque tout de suite par Griezman contraignant Verbruggen à concéder le corner. Ce sera le message de cette première mi-temps. Un échange de riposte, soit par des contres ou des débordements hollandais, soit par un jeu plus axial côté français. Les vice-champions du monde ont légèrement dominé mais ont tiré au but hors cadre comme avec Dembélé juste avant la demi-heure de jeu.
Le reste du match a été offensif, dans la lignée de ce qui a précédé, mais plus brouillon. On a pu assister à des duels plus intenses physiquement, mais à l’impact plus maladroit. Chez les Néerlandais, Dumfries, Depay se sont mis en évidence. Tandis que Kanté s’improvisait meneur de jeu par intermittence, Saliba se montrait très bon au replacement et en marquage individuel, sous le parrainage de la force tranquille d’Upamecano. Chez les entrants en fin de match, Giroud et Wheghorst ont livré un jeu tout en déviation pour leurs équipes respectives.
Le résultat au tableau d’affichage : 0-0. Un score surprenant qui apparaît pour la première fois depuis le début de la compétition. Issue d’un duel entre deux nations aux drapeaux bleu-blanc-rouge. Une disposition de coloris disposée à la verticale pour la France, à l’horizontale pour la Hollande. Une figuration qui est en parfait accord avec la verticalisation recherchée par les hommes de Didier Deschamps, tandis que ceux coachés par Ronald Koeman ont cherché à condenser le milieu de terrain en le quadrillant. Une guerre tactique qui a donné un aspect de losange ou parfois de triangle isocèle selon les déplacements de Rabiot. Avec dans le même temps des Hollandais formant une sorte d’hexagone – comble de l’ironie puisqu’il s’agit du surnom donné à la physionomie du territoire français en cartographie – perturbant le dispositif qui leur était opposé.
L’appartenance à un groupe en commun. Mais deux résultats dissemblables et une issue pas totalement imprévisible, mais pas très attendue non plus à l’origine. Les spéculations s’en trouvent relancées, tant personne n’a convaincu à 100%.
L’Autriche continuera à pratiquer un jeu vif mais épuisant ? Et la Pologne ? France et Pays-Bas joueront-ils encore au jeu des figures géométriques ?
L’Euro 2024 poursuit son chemin. Vivement la suite.
* Enseignant universitaire et analyste de football.