Le président de la Coalition tunisienne contre la peine de mort (CTCPM), Chokri Latif, estime que le débat sociétal et politique autour de la peine de mort est important, mais qu’il faudrait le lancer dans des circonstances ordinaires, et pas lorsqu’un crime atroce se produit, car en l’occurrence, les réactions de l’opinion publique sont généralement émotionnelles, selon lui, manquant, par conséquent, d’objectivité.
L’invité de «Midi show», sur Mosaïque FM, a insisté, ce lundi, 28 septembre 2020, sur l’importance de lutter contre les crimes en s’attaquant aux racines, c’est-à-dire à leurs causes, déplorant notamment les failles sécuritaires et l’impunité dont jouissent certains auteurs des crimes organisés, tout en estimant que ce n’est pas la peine de mort qui résoudrait le problème.
Pour soutenir son idée, Latif a cité les exemples de l’Arabie saoudite et du Texas, où la peine de mort est rigoureusement appliquée et où le taux de criminalité et de meurtres demeure pourtant élevé. Et ce, contrairement à d’autres pays, où la peine de mort est abandonnée depuis des lustres, à l’instar de la Norvège.
«Une étude que nous avons réalisée en 2012 a montré que la plupart des personnes condamnées à la peine de mort sont issues des classes démunies. Des chômeurs ou des agriculteurs pauvres, notamment. Pire, ils sont originaires de régions défavorisées et marginalisées. Le même constat est réapparu dans une autre étude réalisée en 2019», a-t-il développé, toujours pour argumenter sa thèse, selon laquelle il faut éradiquer les causes des crimes plutôt qu’exécuter les criminels, contre lesquels le châtiment doit être raisonnable et en harmonie avec les droits de l’homme.
«Ceux qui souffrent de pulsions criminelles devraient être poursuivis pour ensuite être placés dans un hôpital psychiatrique ou en prison sans avoir la possibilité d’en sortir», a-t-il ajouté.
L’ancien vice-président de l’Organisation tunisienne de la lutte contre la torture (OTLT) a également rappelé le caractère irréversible de la peine de mort et ses conséquences humainement désastreuses en cas d’application sur des innocents condamnés à tort.
Sur un autre plan, il a dénoncé l’instrumentalisation politique de l’affaire Rahma Lahmar, estimant que certaines parties islamistes s’opposant aux principes mêmes d’un État civil et aux droits de l’homme y ont trouvé une bonne occasion pour revendiquer la peine de mort, étant une sanction ordonnée par la charia, et ce, avec l’intention de réinstaurer, sur le long terme, la loi divine et le reste des «houdoud», peines dictées par le Coran.
C. B. Y.
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