La 1ère édition du Forum tuniso-africain de la santé sous le thème : «Sfax pôle de santé», s’est tenue les 17 et 18 mai 2017, dans la capitale du sud tunisien.
Par Wajdi Msaed, envoyé spécial
Organisé à l’initiative du Conseil d’affaires tuniso-africain (Tunisia Africa Business Council-TABC), en partenariat avec le Syndicat régional des cliniques privées à Sfax, ce forum a été marqué par la présence du ministre-conseiller auprès du chef du gouvernement chargé du suivi des projets et des programmes publics, Ridha Saidi, de la ministre de la Santé, Samira Meraï, ainsi que de ses collègues du Burkina Faso et de la Guinée Conakry, et de plusieurs délégations subsahariennes.
A travers ses quatre volets promotionnels (conférences scientifiques, rencontres B2B, expositions et visites guidées), cet événement vise, comme l’a indiqué Kamel Kammoun, président du bureau régional TABC Sfax, à sensibiliser un auditoire composé de professionnels du secteur et de décideurs de premier rang sur «l’importance, sur les plans quantitative et qualitative, sur le potentiel d’intervention et de production des structures de santé opérant en Tunisie et particulièrement à Sfax (polycliniques, firmes industrielles, services médicaux…), dont un échantillon représentatif d’une vingtaine d’unités a meublé les stands mis en place pour l’occasion».
Un système basé sur les compétences
«C’est une occasion pour le partage d’expériences et la création d’une synergie entre opérateurs et décideurs pour élaborer une stratégie d’exportation des services de santé», a déclaré Mme Meraï, en formant l’espoir de voir ce forum aboutir à des partenariats gagnant-gagnant entre les professionnels tunisiens du secteur et leurs homologues africains subsahariens, qui ont montré un intérêt pour l’offre de services tunisienne dans ce domaine.
Basé sur la compétence et le savoir-faire de ses praticiens dans beaucoup de domaines, le système de santé tunisien est jugé assez performant, a souligné la ministre, en ajoutant que cette performance est le résultat de la complémentarité entre le public et le privé.
Le secteur public, qui compte 2058 centres de soins de base, 167 hôpitaux dont 23 CHU, reste une référence pour le secteur privé, qui regroupe, lui, 90 cliniques avec une capacité d’accueil de plus de 5.000 lits, en plus des 120 centres d’hémodialyse et des nombreux centres d’analyses biologiques et de radiologie.
Dans ce contexte, Sfax, qui veut devenir un pôle régional de santé, dispose d’un potentiel à même d’intéresser les patients africains. La région compte, en effet, 1.790 médecins, dont 1113 spécialistes, soit une densité de 1,84 médecin pour 1.000 habitants. Elle compte, par ailleurs, 7 hôpitaux, dont 2 universitaires, alors que le secteur privé regroupe 17 cliniques dotées d’équipements de haute qualité, avec une médecine de pointe dans différentes spécialités, sans oublier le développement remarquable de l’industrie pharmaceutique avec une cinquantaine d’unités, dont 37 spécialisées dans la production des médicaments.
Un marché dynamique
«Le secteur de la santé en Tunisie est un marché dynamique en perpétuelle croissance et qui est en mesure de faire de notre pays une plateforme de référence pour l’exportation des services de santé», a encore souligné la ministre de la Santé, qui se réfère à une étude réalisée par la Banque africaine de développement (BAD) sur ce sujet et qui a relevé le haut potentiel dont dispose la Tunisie dans ce domaine et sa forte compétitivité.
Tout en soulignant l’engagement du gouvernement à développer l’exportation des services de santé, Mme Meraï a affirmé que, dans un souci de bonne gouvernance, son département est en train de mettre en place un registre répertoriant les patients étrangers traités dans les hôpitaux et les cliniques tunisiens, ainsi qu’un cahier des charges réglementant et réorganisant les agences spécialisées dans l’évacuation sanitaire. Et ce dans le but de mettre fin aux dépassements et abus commis dans ce domaine et dont se sont parfois plaints les patients.
Une nouvelle ère de partenariat
Le forum de Sfax inaugure une nouvelle ère de partenariat fructueux entre les différents pays du continent africain, a indiqué, pour sa part, Ridha Saidi, qui a mis en exergue l’importance que revêt la région de Sfax en tant que pôle économique, technologique et services sanitaires.
De son côté le ministre burkinabé de la Santé, Nicolas Medah, a fait savoir que la visite effectuée à des cliniques, à Tunis et à Sfax, lui a permis, ainsi qu’à la délégation l’accompagnant, de prendre connaissance des services offerts par ces structures et de s’enquérir de la santé des patients burkinabés qu’elles accueillent, faisant remarquer que des difficultés persistent encore dans l’évacuation des malades, mais, s’est-il empressé d’ajouter, «les propos de Mme la ministre nous rassurent que le secteur sera bientôt assaini, ce qui nous encourage à accorder la priorité à la destination Tunisie pour les évacuations sanitaires à partir du Burkina Faso».
Evoquant le protocole d’accord signé récemment entre les deux pays dans ce domaine, M. Medah a exprimé le souhait de voir la coopération bilatérale se développer davantage afin de dégager les perspectives d’une meilleure prise en charge des malades et d’une meilleure formation des spécialistes et des acteurs de la santé au Burkina.
Le ministre burkinabé a, par ailleurs, salué les initiateurs de ce forum et notamment le rôle important joué par le TABC, qui, estime-il, «un modèle à suivre dans toutes les capitales africaines».
Besoin pressant en compétences médicales
Pour le ministre de la santé en Guinée Conakry, Abdourrahmane Diallo, ce forum offre un cadre adéquat pour le développement de la coopération sanitaire entre les Etats africains et pour exposer les besoins de la Guinée dans ce domaine et étudier les moyens pour les satisfaire.
Tout en rappelant les efforts fournis par son gouvernement, à travers le plan national de développement sanitaire visant à améliorer l’état de santé de la population et la qualité de vie des citoyens, M. Diallo a évoqué les difficultés rencontrées en matière de services de soins, de la qualité des prestations, du manque manifeste d’équipements de base et de la faiblesse de la gouvernance et de la gestion des structures de la santé dans son pays.
Prenant connaissance des nombreux atouts dont dispose la Tunisie dans le domaine de la santé, le ministre guinéen a exposé les besoins de son pays en matière de formation de cadres médicaux et paramédicaux, sollicitant la participation des cadres tunisiens à l’effort de formation grâce à des stages en Tunisie pour les encadreurs guinéens.
Dans le cadre du développement du partenariat public-privé entre les secteurs médicaux et pharmaceutiques, le ministre guinéen a souhaité l’ouverture du capital des entreprises sanitaires guinéennes à des opérateurs tunisiens et l’approvisionnement de la Pharmacie centrale de Guinée en produits pharmaceutiques produits en Tunisie. «Il existe un fort potentiel de coopération mutuellement avantageuse entre nos deux pays», a conclu M. Diallo.
Une stratégie de partage
Bassam Loukil, président du TABC, initiateur de ce grand messe sfaxien, s’est montré confiant quant à la réussite et au succès du forum, dont témoignent la forte participation tunisienne et étrangère et les attentes exprimées de part et d’autre.
Le forum a commencé par une cérémonie de bienvenue organisée à l’hôtel de ville en présence du maire, mais en l’absence remarquée du gouverneur. «Cette première édition n’est qu’un début. Son succès nous encourage à préparer l’édition suivante, afin de renforcer les synergies positives entre la Tunisie et les pays de l’Afrique subsaharienne», a ajouté M. Loukil, en se projetant sur l’avenir d’un continent, qui cherche, selon ses mots, «à dépasser un passé difficile et dont les populations, qui ont longtemps souffert, méritent des conditions de vie meilleures». «La plupart des dirigeants africains sont déterminés à renverser la tendance et à mieux prendre en charge les destinées de leurs peuples», a-t-il assuré.
Cela passera, selon lui, par l’instauration de ce qu’il a appelé «une stratégie de partage» des compétences et des savoir-faire, qui est déjà à l’oeuvre dans le domaine de la santé. Et c’est, dans ce contexte, que le forum a été organisé, qui vise à développer davantage les synergies entre la Tunisie, et particulièrement la région de Sfax, d’une part, et les pays d’Afrique subsaharienne, d’autre part.
Le président de TABC s’est dit, par ailleurs, convaincu que «Sfax avec ses établissements sanitaires équipés des dernières technologies, ses ressources humaines (femmes et hommes de terrain, médecins et paramédicaux dévoués à leur métier), et son industrie pharmaceutique dispose de tous les atouts lui permettant d’offrir à ses partenaires subsahariens une plateforme médicale de qualité à la pointe de ce qui se fait dans le domaine des soins de santé».
Cet échange s’inscrit, selon lui, dans une vision de coopération sud-sud efficace, mutuellement bénéfique et durable».
«Notre mère Afrique est fatiguée, lasse de voir ses enfants périr à cause des guerres, des maladies et de la mal-vie. Elle a besoin, aujourd’hui, de la conjugaison des efforts de ses enfants qui, ensemble, pourront la porter vers le progrès et le mieux-être», a dit M. Loukil en conclusion.
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