14 Oct 2016 | 10:30 A LA UNE, TRIBUNE, Tunisie
Rached Ghannouchi reçu le 13 octobre 2016 par le président Béji Caïd Essebsi : une insupportable co-présidence.
Rached Ghannouchi n’est pas digne d’être reçu en grande pompe au Palais de Carthage afin de co-présider, jusqu’en 2019, aux destinées des Tunisiennes et Tunisiens.
Par Jomâa Assâad *
Interviewé par ‘‘Al-Qods El-Arabi’’, Rached Ghannouchi a déclaré que «Daech représente l’islam en colère». Le leader d’Ennahdha a surenchéri: «Lorsqu’on on est en colère, on peut se laisser aller jusqu’à commettre des folies».
Pour tout lecteur, normalement constitué allais-je dire, ceci reviendrait à assimiler les actes des «Daéchiens» à des actes de folie. Ce qui constituerait, au bout du compte, une condamnation des méfaits de l’organisation terroriste de l’Etat islamique ou Daech.
Une connaissance plus approfondie de la logorrhée de M. Ghannouchi montrera qu’il n’en est rien en fait. Les écrits du théoricien de l’«islamisme» en Tunisie se caractérisent par une particularité, à ce point accentuée, qu’elle en devient singulière. Le conséquent, chez ce rhéteur confirmé, contredit scrupuleusement l’antécédent. A tel point que l’on serait fondé à en faire l’archétype du sophisme réussi.
L’Etat islamique selon le président d’Ennahdha
Il nous a été donné de consulter, pour les besoins de la cause, certains de ses écrits, notamment son livre ‘‘Les libertés publiques dans l’Etat islamique’’. Un exemple, entre tous, significatif. Ayant intitulé l’un des chapitres de son livre : «La citoyenneté générale et particulière», il commence par y déclarer: «L’homme, nonobstant ses croyance et nationalité, jouit du droit imprescriptible à vivre dignement. Ce faisant, il a le droit d’adhérer aux principes et objectifs constituant le fondement de l’Etat, sachant que l’islam en est la pierre angulaire, ou de s’y refuser. S’il y adhère, étant musulman, il ne se distinguera de ses frères musulmans que par ses aptitudes. En revanche, s’il s’y refuse, il sera alors contraint, afin d’acquérir les droits de citoyenneté, à faire signe d’allégeance à l’Etat [islamique], reconnaissant son autorité et s’abstenant de mettre en péril sa sécurité par toute forme de désobéissance armée ou d’allégeance au profit de ses ennemis. Cependant, sa citoyenneté sera d’ordre particulier et ne deviendra pleine et entière qu’une fois converti à l’islam» (op. cit., pp. 290 à 292). S’ensuit une longue liste de restrictions et brimades au détriment de notre pauvre non-musulman, contrevenant au postulat de départ : «droit imprescriptible à vivre dignement». Si bien, qu’au bout du compte, la prémisse posée au début du laïus est totalement contredite par la conclusion qui en constitue la chute. Le but du jeu consistant à opposer à tout éventuel contradicteur la prémisse, montrant patte blanche, et à faire passer le message «obscurantiste» sous couvert de développement du principe, «politiquement correct», énoncé en premier lieu.
L’exercice de décryptage est encore plus ardu lorsqu’il s’agit de décrire le modus operandi destiné aux milices islamistes. Pour décoder le message du cheikh à ses «disciples», il faudrait, en l’occurrence, procéder au moyen d’un raisonnement par l’absurde. Déclarant que : «[Le mouvement islamiste] doit agir en plein jour. Même si les circonstances l’amènent à quitter, provisoirement, l’avant-scène politique, pour se consacrer à l’action culturelle et sociale. Tant il est vrai que la réalisation de l’intégralité des objectifs de la religion n’est pas un devoir requis, à tout moment, du musulman, mais qu’il demeure tributaire de l’opportunité» (op. cit., p. 313), notre stratège détermine pour ses «fidèles» la marge de manœuvres en cas de passage à la clandestinité. Les mots d’ordre en sont : noyautage (action sociale), endoctrinement (action culturelle) et efficience «opérationnelle» (opportunité).
Or, pour peu que l’on se remémore un principe incessamment martelé par le théocrate : «La Foi [musulmane] constitue le principe et l’objectif de l’Etat islamique» (op. cit., p. 314), l’on constatera que pour la tête pensante des islamistes tunisiens, l’action occulte des actuels Nahdhaouis demeure une constante et la publicité une simple variante. Une nébuleuse agissant dans l’ombre et dont la cible privilégiée est l’honnête citoyen tunisien. «Le mouvement islamiste doit prioritairement cibler la foule plutôt que d’approcher l’élite» (op. cit., p. 313), intime-t-il à ses colonnes en bon ordre de marche. Et c’est au moyen de ce genre de mots d’ordre, aussi populistes que démagogiques, que nous nous retrouvons, s’agissant des Nahdhaouis, aux antipodes de la fameuse image d’Epinal, véhiculée lors des élections de 2011 : «Votez pour ceux qui craignent Dieu».
Le wahhabite Ghannouchi blanchit les Daéchiens
Pour l’heure, munis de notre grille de lecture, revenons-en aux déclarations du cheikh. Nous en étions aux supposées «folies» commises par les Daéchiens.
A lire le développement de cette prémisse, elles ne seraient plus si folles que ça leurs folies. Elles trouveraient même leur justification dans le fait que : «Les sunnites ont subi le supplice de Tantale en Irak et en Syrie». Précisant sa pensée, il ajoutera : «Lorsque les chiites comprendront qu’il est impossible de développer leur secte dans la zone, tous les problèmes seront résolus».
Outre le fait que M. Ghannouchi dédouane de la sorte Daech des atrocités commises, ce qui est une constante chez lui. Ne disait-il pas des jihadistes qu’«ils lui rappelaient sa jeunesse»? Propos sortis de leur contexte? Soit. Mais n’est-ce pas le même cheikh qui disait : «Les courants islamistes prônant la violence, bien qu’étant minoritaires, ne l’ont pas fait pas principe, mais en réaction à la violence de l’Etat et à l’obstruction totale de tout horizon» (op. cit., p. 312)? Citant un manifeste du jihad, Rached Ghannouchi finit par conclure: «Ce manifeste [des jihadistes] comporte des arguments assez convaincants auprès des milieux islamistes» (op. cit., p. 279).
Cette fois-ci, c’est en wahhabite que le cheikh blanchit les Daéchiens. Wahhabisme qu’il revendique lui-même dans son introduction au livre ‘‘Les libertés publiques dans l’Etat islamique’’, désignant : «l’apôtre de l’unicité: le cheikh Muhammad Ibn Abd Al-Wahhab» comme étant son maître à penser, ou pour reprendre sa propre expression «le pionnier de l’Université islamique» (op. cit., p. 5).
Et c’est en invoquant une guerre sunnite-chiîte, qui n’a de réelle existence que dans l’anachronique paranoïa wahhabo-saoudienne, qu’il légitime l’horreur daéchienne. N’étant pas à un anachronisme près – n’est-ce pas lui qui déclarait en plein 21e siècle : «Pour le mouvement islamiste, le modèle de gouvernement et de civilisation c’est l’Etat du Prophète et des califes lui ayant immédiatement succédé» (op. cit., p. 314) ? –, il ose encore discourir des projets «modernistes» d’Ennahdha en faveur des Tunisiennes dont, souligne ce fin lettré et non moins avant-gardiste politologue, «les principales caractéristiques s’articulent autour de leurs fonctions sexuelles» (‘‘La femme entre le Coran et la réalité des musulmans’’, p. 50).
Alors, monsieur le président de la république, persisteriez-vous à penser que pareil personnage soit digne d’être reçu en grande pompe au Palais de Carthage afin de co-présider, jusqu’en 2020, aux destinées des Tunisiennes et Tunisiens ?
* Universitaire.
Avec votre analyse bancale unidirectionnelle et votre haine « explosive » vous allez finir par me faire apprécier ghannouchi
une autre TAKIA se manifeste .personnellement je l’aime ,il est mon voisin et il n’a jamais chercher la petite bête ,il n’échange même pas un mot ,ni bonjour ni bonsoir .et c’est tant mieux « MALLA RAHA » .je joue avec mon chien et je partage avec lui le bonheur de la vie tout en oubliant le paradis aux oiseaux du paradis .
c’est une façon de l’aimer .
Depuis qu il est revenu le pays va de mal en pis. De quel droit il est recu a Carthage si ce n est pour detruire le pays. Des nonagenaires qui regnent en Tunisie. C est le comble.
Il est reçu en grande pompe pour une raison très simple ,notre gourou draine plus que 20% des tunisiens derrière lui ,tout le reste est de la littérature..
Monsieur Assâad,je vous comprends,vous êtes courageux mais pas téméraire!Vous vouliez dénoncer son hypocrisie et sa malhonnêteté intellectuelle!Alors qu’il n’a rien d’un intellectuel…laissez-moi rigoler ! pardonnez-moi,mais votre indulgence coupable vous a poussé à lui tresser même une couronne de laurier(inconsciemment)!
J’attends toujours un discours pour dénoncer l’imposture et déconstruire cette fable d’un gourou érudit capable d’écrire des livres de qualités et même philosophiques……et je passe sur ses pieds plats….pour le reste,vous autres le savez mieux que moi!
La mano dans la mano de Si Béji avec Ghannouchi l’islamiste frère musulman mais chacun cache à l’autre ce que fait l’autre main…
j’avais analysé la pensée politique de Ghannouchi et son rêve de Califat à partir de ses écrits, à l’époque (il y a 3 ans) j’avais nourri un mince espoir sur sa volonté de réformer sa pensée, aujourd’hui je pense que ce que j’ai écrit il y a 3 ans est plus que jamais d’actualité.
Voir mon article du 24/08/2013 sur KAPITALIS : de la démocratie au Ghannouchistan
http://www.kapitalis.com/tribune/17813-de-la-democratie-au-ghannouchistan.html
Quelle honte d’être rattaché à un pays dominé de façon à peine occulte par ces hyènes quasi-daèchiotes ! Et je suis pessimiste, j’estime la Tunisie incapable de se débarrasser de ce chancre, tellement elle est devenue gélatineuse depuis le « grand n’importe quoi » de 2011. Wake up, Tunisia ! Piss off, you dirty beards !
« Alors, monsieur le président de la république, persisteriez-vous à penser que pareil personnage soit digne d’être reçu en grande pompe au Palais de Carthage afin de co-présider, jusqu’en 2020, aux destinées des Tunisiennes et Tunisiens.»
Au-delà des « écrits » ou des hallucinations de Ghanouchi et de sa manière de voir l’état dans sa conception « islamiste » ou de Califat et du rôle obligatoire des citoyens musulmans et non musulmans, avec certains avantages et désavantages selon le cas, ce monsieur aurait pu passer toute sa vie soit à Londres soit à Washington, les deux villes qui hébergent – pour des raisons politiques bien précises et conformes aux intérêts de leur hégémonie sur pratiquement toute la planète, hier et aujourd’hui tous les islamistes – mais les nécessités de l’empire et du néolibéralisme étaient devenues tellement urgentes pour déstabiliser le monde et particulièrement le monde arabe, semer les chaos, les désordres et les destructions, et ainsi le plan A, a fonctionné à la perfection, au point d’être du jour au lendemain considéré comme une « Révolution » ou un « Printemps ». Et ainsi nous a été parachuté cet individu au lendemain d’un certain 14 janvier 2011 avec certains autres comme Marzouki. Tous avec une mission bien définie : servir les intérêts de leurs commanditaires et hébergeurs.
Sans exclure le rôle joué par plusieurs autres personnages des services secrets ou « diplomatiques », un personnage usaméricain était et se trouve aujourd’hui encore derrière tous ces plans ou ces révolutions du monde arabe, et, précisément de la Tunisie jusqu’à l’Ukraine qui n’est autre que le fameux John McCain et ses nombreux collaborateurs et complices. Tout le monde sait le genre de relations que maintiennent Ghanouchi et tous ses condisciples avec ce même personnage et tous les milieux officiels et officieux du pouvoir de l’empire.
Non seulement mais pour donner une continuité à leur plan, les usaméricains comme le pivot de l’empire vont aller repêcher des personnages non moins hideux que Ghanouchi, comme ce monsieur qui occupe aujourd’hui le Palais de Carthage et qui est largement célèbre dans tous les milieux du pouvoir de l’impérialisme. Normalement il devrait, rien que par un sens de dignité, se trouver depuis longtemps à la retraite, mais l’addiction au pouvoir est plus puissante que toute valeur morale et toute sénilité.
Par conséquent l’amphitryon de Carthage et son invité sont deux associés aux services des mêmes commanditaires. L’un comme l’autre n’auraient jamais été là où ils se trouvent si ce n’est cette urgence de l’empire. Mais bientôt il ne restera plus rien de ce plan, ni en Tunisie ni en Libye, ni en Syrie ni au Yémen et encore moins de tous ces wahhabites et leurs complices du Golfe. Et peut-être alors, si la planète continuera d’exister après l’apocalypse nucléaire, commencera un chemin vers une véritable révolution…
quelle mauvaise foi! Vous utilisez un livre que personne lira pour en extraire que les passages qui servent vos objectifs et en omettre le reste 😀 Voyons!!
Modérateur de Kapitalis: Et qu’est-ce qui vous empêche de lire le livre en question? La paresse intellectuelle n’est pas un argument.
Regardez comme la vie était paisible à Cordoue et Bagdad quand ce que dit Ghannouchi dans son livre était appliqué. La citoyenneté relative des non-musulman a un sens. Ce n’est pas par stigmatisation que l’on accorde pas la pleine citoyenneté mais bien au contraire. Les non croyants payaient des taxes dans le buts d’avoir un sentiment d’appartenance à la communauté. Faudrait lire un peu quand même. Interessez vous aux livres de spécialistes du nationalisme pour comprendre le pourquoi du comment.
Modérateur de Kapitalis: Qui vous a dit que la vie était paisible à Cordoue ou en Irak ? Où avez-vous lu cela? Vous avez une vision déformée et idyllique de l’histoire. La longue histoire du monde musulman, comme celle de autres régions du monde, est une longue chaîne de despotisme, de violences et de sang versé.